Un historien israélien de la Shoah à la tête d’une commission sur Srebrenica
Le professeur Gideon Greif dirigera la nouvelle enquête sur le massacre survenu en 1995. Un autre universitaire israélien s'intéressera aux "souffrances des Serbes à Sarajevo"
Un historien israélien a été désigné pour diriger une nouvelle commission controversée établie par le gouvernement de la République serbe de Bosnie, une entité bosniaque contrôlée par les Serbes en Bosnie-Herzégovine, et qui enquêtera sur les crimes de guerre commis en 1995 à Srebrenica pendant la guerre de Bosnie.
Selon les médias bosniaques, le professeur Gideon Greif a été nommé à la tête de la commission dont les travaux porteront sur le massacre de Srebrenica après le rejet, l’année dernière, par le Parlement serbe bosniaque d’un rapport émis par le précédent gouvernement serbe en 2004. Celui-ci reconnaissait en effet les meurtres, en 1995, par les Serbes de Bosnie de milliers d’hommes et jeunes garçons bosniaques à Srebrenica, dans l’enclave bosniaque orientale.
Greif est un spécialiste de la Shoah et professeur d’histoire juive et israélienne à l’université du Texas, à Austin. Son livre paru en 1999 consacré aux Sonderkommandos (Les Juifs chargés d’évacuer les corps d’autres Juifs, assassinés dans les chambres à gaz) à Auschwitz, intitulé « We Wept Without Tears », a été la source d’inspiration du film « Le fils de Saul« , récompensé aux Oscars.
Le responsable serbe bosniaque Milorad Dodik avait estimé au mois d’août 2018 que le rapport était partial, qu’il ne mentionnait pas les victimes serbes et avait réclamé la mise en place d’une nouvelle commission. « Les crimes de Srebrenica sont une tragédie mise en scène visant à diaboliser les Serbes », avait dit Dodik sans donner de détails.
Milorad Kojic, chef du centre de recherche sur la guerre, les crimes de guerre et de recherche des personnes portées disparues en République serbe, a expliqué jeudi lors d’une conférence de presse que la nouvelle commission « déterminera la vérité sur les souffrances de toutes les populations à Srebrenica et ses alentours entre 1992 et 1995.”
Une seconde commission a été établie pour enquêter « sur les souffrances des serbes à Sarajevo pendant la guerre », selon des informations publées jeudi par Balkan Insight. Elle sera dirigée par l’universitaire israélien Rafael Israeli, professeur-émérite de l’université hébraïque de Jérusalem.
Les Etats-Unis ont critiqué la mise en place de ces commissions. L’ambassade américaine à Sarajevo a appelé au « respect des décisions du tribunal et à affronter et accepter la vérité avec bravoure, indépendamment de la douleur ressentie », selon des informations locales.
Pendant presque deux semaines, au mois de juillet 1995, presque 8 000 hommes et petits garçons musulmans avaient été tués par les forces serbes bosniaques à Srebrenica, une ville de la république de Serbie. Ces atrocités sont connues sous le nom de « massacre de Srebrenica ».
Ces meurtres avaient été reconnus comme génocide par deux tribunaux internationaux : la cour internationale de Justice et le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie.
Un certain nombre de responsables serbes bosniaques sont actuellement derrière les barreaux pour leur inculpation dans massacre et d’autres crimes commis pendant cette guerre qui a sévi entre 1992 et 1995, notamment le leader en place pendant la guerre, Radovan Karadzic, et l’ancien commandant militaire Ratko Mladic – autrefois surnommé le Boucher de Bosnie.
Même si la cour internationale a qualifié les meurtres de Srebrenica de génocide, les Serbes n’ont jamais admis que leurs soldats s’étaient livrés à ce massacre et les hommes politiques nationalistes du pays considérent Mladic et Karadzic comme des héros.
La Bosnie d’après-guerre est divisée en deux entités semi-indépendantes – la république serbe et la fédération croate musulmane.
Elles sont liées par un gouvernement central et une présidence tripartite qui comprend des représentants issus des trois communautés majeures.
La république de Serbie est majoritairement constituée de Serbes orthodoxes chrétiens, qui représentent un tiers des 3,5 millions d’habitants de la Bosnie.
Les musulmans forment la moitié de la population du pays, tandis que les Croates catholiques en constituent le troisième groupe ethnique majeur, comptant pour 15 % de la population totale.