Une pièce d’argent datant de 2 000 ans, restituée aux autorités israéliennes aux USA
Un quart de shekel frappé en 69 de l'ère commune s'est retrouvé sur le marché noir ; une enquête internationale a permis de le restituer à l'Autorité israélienne des antiquités
Stuart Winer est journaliste au Times of Israël

Une pièce d’argent ancienne très rare, frappée comme un acte de défi par les rebelles juifs contre l’Empire romain il y a plus de 2 000 ans et pillée en Israël en 2002, a été rendue aux autorités israéliennes à New York lundi, à la suite d’un effort international.
La pièce d’un quart de shekel date de la quatrième année de la Grande Révolte juive contre les Romains, qui s’est déroulée de 66 à 73 de l’ère commune, a indiqué l’Autorité israélienne des Antiquités (IAA) dans un communiqué publié mardi. Elle a été frappée en 69 de l’ère commune, un an avant la destruction du Second Temple de Jérusalem par les autorités romaines qui cherchaient à réprimer la Révolte juive.
Une cérémonie de restitution a eu lieu au bureau du procureur du district de Manhattan. Parmi les personnes présentes figuraient le directeur de l’IAA, Eli Eskosido, le consul général d’Israël à New York, Asaf Zamir, l’ambassadeur d’Israël auprès des Nations unies, Gilad Erdan, et le procureur du district de Manhattan, Alvin Bragg.
« Il s’agit d’une réalisation historique pour l’État d’Israël et pour la préservation de ses biens culturels, car c’est seulement la deuxième fois qu’un bien pillé et sorti clandestinement d’Israël est restitué à l’État », a déclaré Eskosido. « C’est le signe d’une tendance très positive et importante pour la restauration des biens du patrimoine culturel. »
Zamir a qualifié la pièce de « preuve irréfutable du lien millénaire du peuple juif avec la terre d’Israël ».
La pièce faisait partie d’un magot découvert par des pilleurs palestiniens en 2002 dans la région de la vallée d’Elah. Elle est sortie clandestinement du pays, passant par des marchés illicites d’antiquités en Israël, en Jordanie et au Royaume-Uni. À Londres, de faux certificats ont été utilisés pour exporter la pièce vers les États-Unis, où elle a été mise en vente en 2017 lors de la vente de pièces mondiales et anciennes à l’Heritage Auction, à Denver, dans le Colorado.
L’IAA a passé vingt ans à essayer de retrouver la pièce et, au début de cette année, en collaborant avec l’unité de lutte contre le trafic d’antiquités du bureau du procureur du district de Manhattan, elle a enfin pu réunir suffisamment de preuves pour exécuter un mandat de saisie, et une ordonnance du tribunal exigeant qu’elle soit restituée à l’État d’Israël.

L’enquête a bénéficié de la coopération du ministère américain de la Sécurité intérieure, du ministère égyptien des Antiquités, du New Scotland Yard britannique et du ministère jordanien des Antiquités.
Le colonel Matthew Bogdanos, chef de l’unité chargée du trafic d’antiquités du bureau du procureur du district de Manhattan, a déclaré que le rapatriement de la pièce « n’est autre qu’une pièce historique précieuse qui rentre enfin chez elle. Mais elle représente également un partenariat tout aussi extraordinaire entre l’unité de lutte contre le trafic d’antiquités de New York et l’Autorité israélienne des Antiquités ».
Cette coopération « devrait servir de modèle pour la récupération du patrimoine culturel pillé dans le monde entier », a-t-il ajouté.
Erdan, émissaire auprès des Nations unies, a déclaré que la pièce « est la preuve du lien éternel entre le peuple juif et la terre d’Israël » et qu’elle servirait à dissiper « les mensonges de nos ennemis » qui veulent « cacher l’histoire de notre peuple et effacer notre lien avec la terre d’Israël ».
L’Empire romain exerçait un contrôle étroit sur la frappe de la monnaie, permettant aux dirigeants locaux de frapper uniquement des pièces de bronze, en fonction de leur importance pour le gouvernement central, selon l’IAA. La production de pièces d’argent était un privilège limité accordé uniquement à un petit nombre de villes.
« Pour cette raison, la frappe de pièces d’argent par les dirigeants de la Grande Révolte était en fait une déclaration d’indépendance des Juifs en terre d’Israël, une déclaration contre le puissant empire qui se dressait devant eux », a expliqué Ilan Hadad, archéologue et inspecteur chargé du commerce à l’Unité de prévention des vols d’antiquités de l’IAA.

De nombreuses pièces d’argent « rebelles » ont été frappées sur des pièces d’argent impériales, avec des motifs juifs recouvrant le visage des empereurs.
« Cela donnait à la pièce une valeur symbolique beaucoup plus importante que la valeur monétaire de la pièce elle-même », a déclaré Hadad dans le communiqué.
La pièce restituée n’est que la quatrième de ce type connue dans le monde à ce jour, et aucune pièce de ce type n’a été trouvée in situ lors de fouilles archéologiques. Une pièce similaire a été acquise dans les années 1930 par le British Museum, et environ trois autres « circulent » officieusement sur le marché noir des antiquités et parmi divers collectionneurs, a précisé l’IAA.