Une recherche d’informations sur une famille juive cachée pendant la Shoah à Niort
Les Moncœur auraient caché la famille Rapaport en 1941-1942 ; un descendant recherche aujourd’hui des témoignages
Une famille juive, les Rapaport, composée des deux parents et de leurs deux enfants, aurait été cachée par une famille de Niort (Deux-Sèvres), les Moncœur, pendant un an (1941-1942). Plus de 80 ans plus tard, l’un des petits-enfants du couple Moncœur, Patrick Lenormand, tente d’en savoir plus sur cette histoire, et a lancé un appel à informations, en espérant une prise de contact avec des personnes directement ou indirectement liées à cette famille, les Rapaport, ou à ces faits.
Alors qu’il mène déjà ses recherches auprès de multiples associations juives françaises, l’homme explique que la famille juive cachée était probablement composée d’un garçon et d’une petite fille, de ce que lui en ont dit sa mère et sa tante, qui ne disposaient que de très peu d’informations à leur sujet. Selon elles, le couple aurait été fourreurs à Paris, avant de quitter la capitale face à la menace antisémite.
« Cette famille était cachée dans le grenier de la maison au 39, rue de la Regratterie à Niort afin d’éviter qu’ils soient découverts lors de visites de voisins ou de patrouilles allemandes inopinées (ce qui est arrivé au moins une fois, selon le récit que nous en a fait ma mère) », explique Patrick Lenormand.
« Selon ma mère et ma tante, la famille est restée chez mes grands-parents de 1941 à 1942, date à laquelle ils sont repartis. Dans l’histoire de l’Occupation à Niort, l’année 1942 correspond à une première vague d’arrestations de familles juives ; ce contexte plus dangereux pour eux pourrait expliquer pourquoi M. et Mme Rapaport auraient préféré repartir. Ma mère comme ma tante nous ont ensuite dit qu’ils n’avaient plus eu aucune nouvelle de la famille Rapaport. »
« En discutant avec mon cousin Philippe, j’ai appris qu’en fait ma tante Lucienne avait été contactée par téléphone, à deux reprises, par une femme qui semblait être l’enfant Rapaport cachée. Elle cherchait visiblement à retrouver la trace de mes grands-parents et de ses enfants et avait, semble-t-il, initié une démarche de reconnaissance de Justes de son côté. Elle avait laissé ses coordonnées à ma tante… qui a mis ce papier à la poubelle, selon mon cousin. La personne a rappelé une deuxième fois, et ma tante a apparemment mis fin rapidement à l’échange, en disant que cette démarche ne l’intéressait pas, que ce que ses parents avaient fait à l’époque était juste ‘normal, voilà tout’. Je m’interroge toujours sur cette réaction de ma tante : pas envie de revivre le passé et cette période trouble, pas envie de se rappeler le souvenir de leur père disparu auquel ses enfants étaient très attachés… »
Jusqu’ici, explique Patrick Lenormand, ses recherches n’ont ainsi rien donné, en partie parce que ses informations sont trop lacunaires : nom de la famille très courant, ignorance du prénom des parents comme des enfants. Quant aux deux témoins dont ils étaient proches, sa mère n’est plus là, et sa tante est touchée par la maladie d’Alzheimer.
Il cherche ainsi tout témoignage ou information qui pourrait l’aider dans ses recherches, et peut être contacté à l’adresse mail suivante : lenormandpatrick@gmail.com
« J’ai toujours pensé que cette histoire de famille témoignait d’un grand courage de la part de mon grand-père, d’autant que la peur rétrospective et durable de deux de ses filles (ma mère et ma tante) montrait à quel point même des enfants sentaient combien cette démarche était dangereuse pour toute la famille, et que ce courage ne devait pas être oublié. Je n’ai malheureusement pas connu ce grand-père, mort assez jeune (53 ans) de maladie. J’ai connu ma grand-mère mais nous ne voyions celle-ci qu’une fois par an, nous avions très peu de relations avec elle ; j’étais très jeune (16 ans) quand elle est morte à son tour en 1978 », explique Patrick Lenormand.
« Ma démarche est ma façon de leur rendre hommage à tous les deux, notamment en retrouvant les éléments de cette histoire par l’intermédiaire des enfants ou descendants Rapaport si je parviens à les retrouver. Si ma recherche aboutit au final à ce que mes grands-parents soient reconnus comme Justes, ce ne serait que mérité, je pense. »
Au 1er janvier 2022, le titre de Juste parmi les nations a été décerné par Yad Vashem à 4 206 personnes en France et 28 217 à travers le monde. La Pologne, les Pays-Bas et la France sont les pays qui comptent le plus de Justes.