Yehuda Barkan, l’homme qui aura fait rire Israël, succombe à la COVID-19
Cette icône de 75 ans était connue pour ses classiques devenus culte dans les années 1970 et ses irrésistibles caméras cachées
L’acteur Yehuda Barkan, décédé samedi à l’âge de 75 ans après avoir été vaincu par la COVID-19, aura été un pilier des comédies classiques israéliennes et un maître de la farce dont le penchant pour les canulars téléphoniques aura aidé à asseoir la carrière – une carrière qui aura duré pas moins de 55 ans.
Acteur, producteur et réalisateur adoré par le public, Barkan, dont le nom de famille de naissance était Berkowitz, avait vu le jour dans la ville côtière de Netanya. Ses parents, originaires de Pologne et de Tchécoslovaquie, parlaient le yiddish.
Barkan s’était lancé dans une carrière d’acteur après son service militaire, lorsqu’il avait rejoint la bande dite du commandement Dizengoff, aux côtés d’autres anciens militaires, s’illustrant dans des spectacles combinant chants et sketchs parodiques. Il était ensuite entré à l’école des Arts du spectacle de Bvei Zvi mais il avait été renvoyé trois mois après, avait expliqué Barkan dans un entretien accordé au mois de juin 2020 au ministère de la Culture et des Sports, parce qu’il n’avait pas la patience nécessaire pour simplement apprendre.
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Il avait découvert son domaine de prédilection – la farce et l’humour – grâce à l’émission radiophonique « Hamim VeTaim » où, aux côtés d’autres comédiens comiques, il excellait dans le canular téléphonique.
Barkan avait commencé à apparaître dans des films au début des années 1970 – un grand nombre d’entre eux devaient se trouver à la base des films bourekas israéliens, ces classiques populaires de la comédie devenus cultes, qui tournaient en dérision les tensions ethniques existant entre les Israéliens mizrahis et ashkénazes.
L’un de ses tous premiers films avait été « Lupo ! », une comédie israélienne en anglais tournée à Tel Aviv, une œuvre qui, qui, selon le New York Times, s’était apparentée au comique propre à la Seconde avenue yiddishophone. Barkan, qui était alors âgé de 25 ans, était en tête d’affiche dans le rôle de Lupo, veuf d’âge moyen et petit vendeur de meubles.
« Sous toutes ces couches de maquillage et de charme, Barkan est – je le soupçonne – un acteur d’un vrai talent », avait écrit en 1971 Vincent Canbi, critique cinématographique du New York Times.
En 1975, l’un des films de Barkan, « Hagiga B’Snooker », avait aidé à immortaliser le genre Bourekas – en partie grâce au personnage campé par l’acteur, Azriel, qui tentait de faire croire à un rabbin qu’il était un Juif religieux alors que sa bouche était remplie de bourekas.
Deux pères fondateurs du genre, Zeev Revach et Barkan, y tenaient le premier rôle, avec un script largement improvisé devant les caméras.
Au mois de juin 2020, Revach avait expliqué au radiodiffuseur Kan que « c’est notre état d’esprit qui a fait le film ».
« Je savais que cela ferait rire Yehuda », avait-il ajouté. « Il se roulait par terre ».
Dans des interviews, Barkan avait également raconté qu’une grande partie du scénario avait été improvisée sur le tournage.
« Je ne me souviens pas qu’il y ait eu la simple idée de faire à l’occasion une deuxième prise dans le film. Tout s’était presque fait en une seule prise », avait-il déclaré.
Barkan était ensuite devenu réalisateur, dans les années 1990, avec une série de comédies appelées « Abba Ganouv », dans lesquelles il prêtait ses traits à un skipper, père célibataire, qui tentait d’obtenir la garde son fils. Cette série avait permis à Barkan de se faire connaître auprès d’un nouveau public plus jeune qui, une fois encore, avait été séduit par son humour.
Barkan ne devait jamais quitter le genre, réalisant et produisant des caméras cachées même si l’échec de son film de 1993, « Mehapeset Baal Al Arba, » devait l’amener à la faillite.
Au début des années 2000, Barkan était devenu religieux, il s’était marié pour la troisième fois et il s’était installé au sein d’une communauté religieuse avec sa famille. Il avait à nouveau rencontré des difficultés financières et il avait été arrêté par l’Autorité fiscale israélienne, soupçonné d’évasion fiscale.
Il avait repris sa carrière de comédien, en 2010, lorsqu’il était apparu dans le rôle du grand-père d’un jeune autiste dans la série télévisée israélienne « Yellow Peppers », saluée par la critique. Il avait ensuite endossé le rôle d’un rabbin dans « Kipat Barzel » (« Dôme de fer »), une série télévisée réalisée en 2018 et consacrée à une unité religieuse de l’armée israélienne.
Le goût de Barkan pour la farce ne devait jamais disparaître, depuis les caméras cachées qui avaient surpris des passants aspergés avec du ketchup jusqu’à « Matchmakers » – une émission de caméra cachée datant de 2014 sur des couples ignorant qu’ils allaient se rendre à un rendez-vous amoureux.
L’apparition de Barkan dans le film « Love in Suspenders » avait été le dernier rôle de Barkan, en 2019. Il y avait interprété un homme âgé au caractère difficile se battant pour payer son loyer et qui tombe amoureux d’une femme aisée de son âge, qui était jouée par Nitza Saul, qui avait déjà tourné avec lui dans « Hagiga B’Snooker » en 1975.
Cela devait être la dernière fois que Barkan devait apparaître sur un écran, même s’il avait été filmé, au mois de juin 2020, par le ministère de la Culture et des Sports, s’exprimant sur sa vie et sur sa carrière, sur son éveil religieux et sur sa vie professionnelle.
Cet entretien, qui avait été diffusé quatre mois avant sa mort, avait permis de retrouver l’humour irrésistible et éternel de Barkan, son penchant pour les accents yiddish et son amour – comme toujours – pour la farce.
Barkan s’est éteint samedi des suites du coronavirus. Cela faisait quelques semaines qu’il était hospitalisé à l’hôpital Hadassah de Jérusalem.
Transmettant ses « profondes condoléances » à la famille du comédien, le président Reuven Rivlin a salué, samedi, une « source de joie, un acteur formidable, aux multiples facettes, qui était également plein d’esprit et un être humain d’une grande générosité. Nous continuerons à aimer les trésors qu’il a laissé à la culture israélienne, encore et encore, et nous nous souviendrons de lui avec beaucoup d’amour et avec un sourire. »
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu, pour sa part, a dit que Barkan portait « un amour immense » à son peuple et à son pays. Barkan, a-t-il continué, « a amené de la joie à des générations entières d’Israéliens… il nous manquera énormément à tous ».
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