6 histoires d’archéologie de 2018 qui m’ont fait repenser mon monde
Qui l’eût cru ? L'archéologie est une thérapie ; une météorite a peut-être détruit Sodome et Gomorrhe ; il y a de nouveaux trésors des Rouleaux de la mer Morte à déchiffrer
Transformant des épées en socs de charrue, un petit groupe de vétérans de l’armée américaine a passé plusieurs semaines de l’été dans une fouille archéologique du parc national Beit Shearim d’Israël. Contrairement à beaucoup de ceux qui prennent part à des fouilles saisonnières, les anciens soldats participaient autant pour se soigner que pour trouver des objets.
En écrivant des articles au sujet de l’archéologie, j’ai eu le privilège de traiter de nombreuses découvertes importantes qui peuvent modifier la manière dont nous comprenons l’ancien monde. Dans ce cas précis, c’est l’action même de fouiller qui modifie la manière dont les vétérans voient le monde.
Dans une conversation Skype avec Stephen Humphreys, fondateur de Rétablissement archéologique des Vétérans américains, l’ancien officier de maintenance de l’armée de l’air américaine a déclaré, « Dès que j’ai touché la poussière, je suis tombé amoureux ».
Dans mon article de septembre intitulé « Des vétérans américains combattent les troubles de stress post-traumatique en menant des fouilles archéologiques en Israël, Humphreys déclarait que pour ses anciens soldats, venir dans un pays où le service militaire est encore largement obligatoire les aidait à se sentir à nouveau normaux. De la même manière, ils se sentaient chez eux avec le style de communication brusque d’Israël ».
Pourtant, alors qu’ils fouillaient physiquement dans le passé, les expériences traumatisantes des vétérans américains du Moyen-Orient (qui avaient servi pour la plupart en Irak ou an Afghanistan) ont commencé à s’estomper.
La fouille à Beit Shearim est dirigée par les docteurs Adi Erlich et Rona Evyasaf de l’université d’Haïfa. C’est une communauté de fouille ouverte à tous – des enfants aux personnes âgées. La seule condition est de vouloir travailler, a déclaré Erlich. L’équipe de vétérans s’est retrouvée à travailler aux côtés d’Israéliens de toutes sortes – Juifs et Arabes – pour laver des objets, creuser et pousser des brouettes.
Tout en étant prudent pour éviter toute publicité excessive, Humphreys a décrit les fouilles comme une expérience très positive.
L’archéologue Erlich était aussi d’accord : »Je vois que la fouille, le travail physique, la poussière sont très bons pour des expériences de traitement. C’est une façon d’oublier le passé, et de comprendre que l’on est tout petit dans l’univers ».
Et voici cinq autres histoires de 2018 qui m’ont fait repenser mon monde.
Une météorite aurait détruit la biblique Sodome, selon des scientifiques
La Genèse 19:24–25 décrit une vision totalement horrible : « Alors le Seigneur a fait pleuvoir du soufre brûlant sur Sodome et Gomorrhe – en provenance du paradis. Ainsi, il a renversé ces villes et la plaine entière, y compris tous ceux qui vivent dans les villes – et aussi la végétation dans la terre ».
Une équipe d’archéologues modernes a proposé une nouvelle théorie qui pourrait bien soutenir cette description biblique désastreuse.
Dans un article publié en commun et intitulé « La fin de la civilisation. L’événement 3.7KYrBP : données archéologiques, analyses d’échantillons et implications bibliques » du projet de fouilles Tall el-Hammam de Jordanie, le directeur de l’analyse scientifique Phillip J. Silvia et le co-directeur Dr. Steven Collins ont écrit « les preuves physiques de Tall el-Hammam et des sites voisins montrent les traces d’un événement thermique d’une puissance destructrice que l’on pourrait s’attendre quand on lit ce qui est décrit dans la Genèse 19 ».
Selon les auteurs, une énorme explosion aérienne d’une météorite pourrait rendre compte de la preuve archéologique d’un événement très désastreux – comme celui dépeint dans la bible.
Basée sur des preuves bien documentées d’explosions modernes similaires dans le monde, leur théorie m’a conduit à réfléchir.
Parfois, dans l’analyse universitaire d’objets archéologiques, si l’on n’obtient pas un résultat du premier coup, on essaie, on essaie encore et encore… Cette année, le Dr. Eshbal Ratson de l’université d’Haïfa a réussi à déchiffrer l’ancien hébreu codé de l’un des derniers Rouleaux de la mer Morte non publiés.
Selon Ratson, cette mission presque impossible, qui durait depuis des années, revenait « à rassembler les pièces d’un puzzle, sans savoir à quoi ressemblait le puzzle ».
Ratson, peut-être plus que toute autre personne, a été surprise par les résultats de son travail intensif. Lors d’une longue conversation avec le Times of Israël, Ratson a déclaré qu’elle pensait réaliser un travail technique complexe. « Mais le puzzle a progressivement pris forme et je me suis rendue compte que je tenais quelque chose ».
Le travail de Ratson a reçu la couverture médiatique internationale qu’il méritait. Cette année aussi, des minuscules fragments de Rouleau de la mer Morte, jamais vus auparavant et conservés dans des boîtes à cigares depuis que des archéologues les avaient exhumés dans les années 1950, ont été identifiés lors d’une conférence internationale célébrant le 70ème anniversaire de la découverte du rouleau.
C’est toujours excitant de découvrir une pile de fragments minuscules qui, au départ, étaient considérés comme une série de fragments sans forme et de se rendre compte que l’on peut en tirer un texte qui fait sens », a déclaré le professeur Noam Mizrahi de l’université de Tel Aviv sur l’analyse de Ratson. C’est important à un certain nombre de niveaux ».
Mes cours de yoga ne seront plus jamais les mêmes. Quand mon professeur dit, d’une voix chantante, à ma classe d’inspirer et d’expirer, j’imagine invariablement – depuis que j’ai parlé avec le Dr Ella Been de l’Académie Ono – le modèle 3D d’une cage thoraciue de Néandertal qui a changé à jamais la façon dont je vois ces premiers humains.
Les hommes de Néandertal marchaient droit, avaient des colonnes vertébrales plus droite que celles de l’homme moderne, auraient été forts et robustes, et respiraient profondément de leur cages thoraciques en forme de cloche – et non de tonneau – selon Been, membre de l’équipe internationale de recherche scientifique qui a récemment publié « Reconstruction virtuelle en 3D du thorax Kebara 2 de Néandertal » dans la revue spécialisée Nature Communications.
Ils ont tiré leur conclusion d’une reconstruction virtuelle en 3D récemment finalisée de la cage thoracique du squelette Kebara 2 – alias « Moïse » – la dépouille sans tête, mais presque complète de Néandertal, exhumée en 1983 dans une cave du nord d’Israël et maintenant conservée à l’université de Tel Aviv.
Ce qui est frappant dans la nouvelle étude est l’analyse géométrique morphométrique – une comparaison entre la structure reconstituée et les squelettes de l’homme moderne. Le modèle 3D de la cage thoracique de Néandertal comparé à celui de l’homme moderne « nous a permis de prendre en compte des éléments que nous ne pouvions pas voir ou mesurer avant », a déclaré Been.
Selon elle, étudier les hommes de Néanderthal donnerait plus d’espace aux médecins afin de mieux accepter les différences à l’intérieur de la population.
« Je pense que comprendre d’où nous venons nous donne une perspective afin de comprendre qui nous sommes. Dans le domaine médical, nous avons souvent pensé les choses d’une manière, ‘normal et anormal’. Nous oublions de regarder la diversité », a-t-elle déclaré.
En juillet, un duo de chercheurs, dans leur soixantaine, a descendu une falaise de 30 mètres pour retrouver de la vaisselle vieille de 2 000 ans tandis qu’un soldat israélien de 18 ans les protégeait au bord de la frontière avec le Liban.
A l’intérieur de la cave de 3 mètres sur 1,5, l’équipe a trouvé des poteries de toutes tailles – des grandes vaisselles pour cuisiner mais aussi des jarres pour contenir du vin – qui occupaient tout l’espace au sol.
« Au début, j’ai dû faire des acrobaties pour ne pas marcher sur la poterie », a déclaré le Dr Danny Syon, un archéologue expérimenté de l’Autorité israélienne des Antiquités.
Le Dr. Yinon Shivtiel de l’université Zefat, qui a supervisé de nombreuses fouilles de grottes en Galilée au cours des 30 dernières années, a déclaré que, selon son expérience, « les gens qui vont dans ce genre de grotte sont soumis à un stress. Ils ont dû se cacher pour survivre, a-t-il déclaré. Ce ne sont pas des gens qui vont en vacances, a-t-il plaisanté. Tous les équipements que nous y avons trouvés étaient utilisés pour la survie », a déclaré Shivtiel.
Alors que Tsahal continue sa destruction des tunnels du Hezbollah non loin de cette grotte, ces anciens objets, ramenés à la lumière par un duo d’universitaires passionnés, prennent une résonance assez particulière dans le contexte contemporain.
Un petit joueur dans l’histoire humaine, le pou est important – et ici pour rester
Poussée par une infestation malheureuse à la maison, j’ai finalement eu une application pratique de mon travail de reconstitution du passé : les poux. Regarder dans les petits coins s’est presque transformé en obsession et, alors que mes amis et ma famille, qui en ont souffert, pourront en témoigner, il s’agissait du projet dont j’ai le plus parlé cette année.
En menant des recherches pour mon article sur le pou, j’ai lu de nombreuses études scientifiques et j’ai parlé avec des experts. Cela m’a conduit à enquêter sur les origines mêmes de l’humanité, il y a environ 6 à 7 millions d’années.
Il s’est avéré qu’Israël dispose des meilleures preuves conservées des premiers poux : au site préhistorique Nahal Hever, des archéologues ont découvert les restes de têtes de poux vieux de 9 000 ans, tandis qu’à Massada, ils ont retrouvé des vêtements et des peignes infestés de poux. L’analyse des fragments de cheveux vieux de deux mille ans a donné des preuves directes des conditions difficiles au sommet de la montagne pendant le siège romain.
Le Prof. Kosta Y. Mumcuoglu, un grand expert israélien des poux et entomologiste médical, est un fan inconditionnel de ces petites créatures. Il n’a pas été très optimiste sur leur éradication totale des têtes de nos enfants dans un futur proche.
« Nous en faisons tellement pour nous débarrasser d’eux, mais je peux vous garantir qu’ils continueront à survivre pour les centaines d’années à venir », a déclaré Mumcuoglu.
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