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Avant d’être élu au Labour, Corbyn appartenait à un groupe Facebook antisémite

Alors que le parti a suspendu des membres pour racisme, un rapport de 280 pages détaille une quantité de contenus racistes et anti-israéliens publiés sur le forum de Palestine Live

Jeremy Corbyn, chef du Parti travailliste britannique, lors d'un rassemblement à Glasgow, en Écosse, le 28 mai 2017 (Crédit : AFP / Andy Buchanan)
Jeremy Corbyn, chef du Parti travailliste britannique, lors d'un rassemblement à Glasgow, en Écosse, le 28 mai 2017 (Crédit : AFP / Andy Buchanan)

LONDRES — Jeremy Corbyn, avant de devenir le chef du Labour britannique, était un membre actif d’un groupe Facebook accueillant des négationnistes de l’Holocauste et des antisémites.

Corbyn semble avoir été membre du groupe Palestine Live pendant au moins un an, et l’a quitté peu de temps après être devenu chef de l’opposition au mois de septembre 2015.

Dans un rapport de 280 pages rendu public mercredi, David Collier, chercheur et blogueur, a détaillé une série de contenus antisémites et anti-israéliens partagés par les membres du groupe.

Un membre a expliqué être en train de lire Mein Kampf, suggérant que « tout le monde devrait être obligé de le lire, en particulier les Juifs qui ont leur propre programme, afin de savoir pourquoi ils ne sont pas aimés ».

D’autres ont discuté de l’usage des termes « Zionazi » ou « Juifnazi », débattu d’un éventuel contrôle par les Juifs de la BBC et partagé des théories conspirationnistes sur la famille Rothschild et le rôle présumé d’Israël dans les attentats du 11 septembre et de Paris, en 2015.

Les membres de ce groupe privé qui réunit 3 000 personnes – parmi lesquelles le négationniste Paul Eisen — auraient également partagé des articles de David Duke, ancien grand sorcier du Ku Klux Klan, ainsi que des liens vers des contenus néo-nazis.

Le négationniste Paul Eisen, à droite, parle au musicien israélien Gilad Atzmon, que l’ADL comme l’organisation Southern Poverty Law Center ont toutes les deux qualifié d’antisémite.

Dans un post, Jackie Walker, ancienne vice-présidente du groupe Momentum pro-Corbyn et suspendue du parti travailliste suite à des accusations d’antisémitisme, dit : « Il est vraiment sûr ce groupe ? »

Ce à quoi répond l’un des trois administrateurs : « Très… Personne ne peut entrer si la confiance manque… Je fais très attention… Et c’est un groupe secret ».

Le parti travailliste a lancé une enquête et promis l’adoption de mesures disciplinaires contre ses membres dont il serait avéré qu’ils ont publié des contenus antisémites. Un certain nombre de membres de la formation travailliste auraient été suspendus.

Jackie Walker, militante du Parti travailliste britannique, en 2016. (Crédit : capture d’écran YouTube)

Parmi d’autres membres présumés du groupe Palestine Live, le fils du chef du Labour, Seb, haut-conseiller du président honoraire du cabinet fantôme, John McDonnell, ainsi qu’un certain nombre de membres du Parlement et militants éminents pro-Corbyn. Deux anciens parlementaires des démocrates libéraux auraient également appartenu au groupe.

Rien ne laisse suggérer qu’aucun d’entre eux – ou le leader du Labour – aient eu conscience de la nature des contenus partagés par certains membres.

Malgré tout, Corbyn a posté sur la page à un certain nombre d’occasions, selon Collier. Dans un commentaire, il fait l’éloge du docteur Mads Gilbert, médecin et activiste politique norvégien qui avait affirmé que la responsabilité des attentats terroristes du 11 septembre revenait aux « politiques suivies par l’Occident ». Gilbert a été interdit d’entrée en Israël.

Le docteur norvégien Mads Gilbert à l’hôpital Shifa de Gaza durant l’opération bordure protectrice en 2014 (Capture d’écran : YouTube)

Corbyn faisait part de son « immense respect » pour « mon ami » Gilbert, ajoutant qu’il serait « ravi de l’inviter à Westminster ». Le chef du Labour suggérait ensuite que l’organisation Palestine Solidarity Campaign soit à l’origine de l’invitation.

Corbyn avait également commenté un fil qui s’attaquait à la députée Tzipi Livni, ancienne ministre des Affaires étrangères et cheffe du parti israélien Hatnua, où le terme péjoratif « Zio » était utilisé. A une autre occasion, il avait fêté le vote du Parlement britannique, en 2014, définissant la reconnaissance unilatérale de la Palestine, post dans lequel un autre membre faisait référence aux « Juifs capricieux qui ne méritent même pas d’avoir un pays ».

Un porte-parole de Corbyn a dit que « Jeremy condamne l’antisémitisme sous toutes ses formes et dans les termes les plus forts. Il ne veut pas du soutien des antisémites, qui n’ont aucunement leur place dans le mouvement du Labour ».

Toutefois, Jennifer Gerber, directrice des amis d’Israël au sein du Labour, a condamné avec force l’ancienne appartenance au groupe de Corbyn :

« Que Jeremy Corbyn ait été membre d’un groupe sur Facebook fréquenté par des antisémites, des négationnistes et des théoriciens du complot qui haïssent Israël est à la fois affligeant et extrêmement non surprenant. Cela fait longtemps que nous savons quel genre de gens il côtoie et c’est simplement une confirmation de plus d’un comportement qui est profondément perturbant », a dit Gerber.

« M. Corbyn a échoué à de nombreuses occasions à présenter ses excuses à la communauté juive et à reconnaître le mal causé par des actions et associations passées. Ce serait aujourd’hui le bon moment pour lui de le faire », a-t-elle affirmé.

Joseph D. Glasman, chef des enquêtes politiques et gouvernementales de l’organisation Campaign Against Anti-Semitism (Capture d’écran : YouTube)

Corbyn a également essuyé les vives critiques de Joseph D. Glasman, chef des enquêtes politiques et gouvernementales au sein de l’organisation Campaign Against Antisemitism. « Il n’y a pas de justification concevable à la participation de Jeremy Corbyn dans ce groupe. L’un des slogans de Corbyn est ‘se lever, pas rester sans rien faire’, mais dans ce cas, il ne s’est non seulement pas levé, mais il a participé de manière active », a dit Glasman.

Une semaine de scandales

Les révélations concernant Palestine Live sont la deuxième controverse suscitée ces derniers jours par l’attitude de Corbyn au sujet d’Israël.

Au cours du week-end, il avait été rapporté qu’un membre du personnel du leader du parti travailliste avait qualifié Israël « d’état apartheid », l’accusant d’avoir commis un « génocide » durant la guerre de 2014 à Gaza et suggérant que le comportement de l’Etat juif n’était toléré « qu’à cause de l’Holocauste ».

Le Labour a été en proie à des accusations d’antisémitisme depuis l’arrivée de Corbyn à sa tête et également accusé d’avoir échoué à gérer le problème.

Dans une interview publiée jeudi, l’ancien grand rabbin britannique, Lord Jonathan Sacks, a expliqué qu’il refuserait de s’entretenir avec Corbyn jusqu’à ce que la formation travailliste « montre des signes clairs d’action résolue » contre l’antisémitisme dans ses rangs.

Lors de son interview sur J-TV diffusée le 21 juin 2016, l’ancien maire de Londres Ken Livingstone a dit qu’il inviterait à dîner celui qui réussirait à prouver qu’il avait tort sur le ‘fait’ qu’Hitler avait soutenu le sionisme. (Crédit : capture d’écran YouTube )

La semaine dernière, la controverse portant sur l’ancien maire de Londres, Ken Livingstone, avait pris un autre tour après confirmation de la prolongation de sa suspension du parti.

Livingstone avait suggéré en 2016 que Hitler avait soutenu le sionisme et avait clamé l’année dernière qu’il y avait eu « une collaboration réelle » entre les nazis et les Juifs. La décision prise par le parti au mois d’avril 2017 de ne pas l’expulser en raison des propos tenus avait suscité la colère de la communauté juive ainsi que d’un grand nombre de députés du Labour.

Des militants modérés au sein du parti ont mis en doute jeudi l’engagement pris par le Labour à agir contre les membres ayant posté des contenus antisémites sur la page Palestine Live.

Richard Angell, directeur du groupe centriste Progress, a averti qu’il « est temps que le Labour contrôle tout cela. A trop d’occasions, le parti a fait des promesses et ne les a pas tenues lorsqu’il a fallu gérer l’antisémitisme. Nous sommes assurés du fait que la nouvelle définition du parti de l’antisémitisme et les possibilités d’agir sont en place : Ce qu’il manque, c’est la volonté d’agir. Cela brise le coeur ».

Illustration:Un jeune partisan du Labour montre son tee-shirt à l’effigie de Jeremy Corbyn avant un discours de campagne du leader de l’opposition à Basildon, le 1er juin 2017 (Crédit : AFP/Justin Tallis)

Beaucoup de juifs au Royaume-Uni se disent inquiets car les électeurs ne semblent pas comprendre cette dimension antisémite présente chez Corbyn.

Des controverses portant sur sa description passée des groupes terroristes du Hamas et du Hezbollah comme étant ses « amis » et ses liens avec des négationnistes de l’Holocauste et des antisémites avaient largement éclaté avant son élection à la tête du Labour.

Les problèmes de la formation travailliste avec l’antisémitisme avaient également bénéficié d’une couverture médiatique extensive avant les élections générales de l’année dernière lorsque, dans un bouleversement majeur, Corbyn était parvenu à empêcher le parti conservateur de la Première ministre Theresa May de maintenir sa majorité au parlement.

« C’est un vrai défi pour la communauté juive », avait alors suggéré un haut-responsable communautaire. Ce dernier avait spéculé que les électeurs pourraient ne pas avoir autant conscience du problème parce qu’ils pourraient manquer de connaissance sur la nature de certains discours antisémites.

L’auteur de cet article est également l’auteur du livre « The Honorary Jew: How Britain’s Jews Helped Shape Margaret Thatcher and Her Beliefs ». Il est l’ancien rédacteur en chef d’un magazine centriste indépendant du Labour, « Progress », auquel il contribue dorénavant. Ses articles sont apparus dans The Jewish Chronicle, The Sunday Times, The Guardian, Commentary et History Today. Il a été conseiller spécial au Bureau d’Irlande du nord et au Bureau du Cabinet.

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