Coup porté à Israël, la “Palestine” devient membre d’Interpol
75 des 133 membres électeurs ont soutenu la candidature de Ramallah lors d'un scrutin à bulletin secret, malgré les objections d'Israël et des Etats-Unis
Raphael Ahren est le correspondant diplomatique du Times of Israël
Dans ce qui marque une cinglante défaite pour Israël, la plus importante organisation policière internationale a accepté mercredi comme membre à part entière « l’Etat de Palestine ».
Lors de l’assemblée générale annuelle d’Interpol qui a eu lieu à Pékin, la candidature des Palestiniens a recueilli 75 voix « pour », 24 voix « contre » et 34 abstentions.
Israël s’est vivement opposé à l’adhésion des Palestiniens à Interpol, affirmant que le soutien qu’apporterait Ramallah au terrorisme risquait d’entraver les efforts de l’organisation plutôt que de les aider. L’administration américaine a également soulevé des objections face à cette candidature, et a aidé Israël à faire pression en sa défaveur.
Quelques minutes après le vote, l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) a célébré cette victoire sur son compte Twitter en écrivant : « Plus de 75 % des membres d’Interpol viennent de voter pour l’adhésion de la Palestine. Félicitations ! Alf Mabrouk Palestine! Merci. »
Over 75% of #INTERPOL members just voted in support of #Palestine's full membership. Congratulations! Alf Mabrouk #Palestine! #Thankyou ????????
— Palestine PLO-NAD (@nadplo) September 27, 2017
« L’adhésion de la Palestine à l’institution illustre la volonté de ses membres de défendre sa raison d’être et ses valeurs fondamentales. C’est un rejet clair des tentatives de manipulation cynique et d’intimidation politique », a réagi le ministre des Affaires étrangères de l’Autorité palestinienne, Riyad al-Malki, dans un communiqué.
« Nous cherchons à être dans toutes les institutions internationales, y compris Interpol, en tant qu’Etat organisé », avait indiqué samedi à l’AFP Jibril Rajoub, un haut responsable palestinien.
« Notre but, c’est que l’Etat palestinien apporte une contribution positive en matière de sécurité et de stabilité, dans la région et au sein de la communauté internationale », avait-il déclaré.
L’opposition d’Israël s’explique selon lui par le fait que l’Etat juif « ne veut aucune avancée vers un Etat palestinien. »
« Israël ne veut déjà pas que nous soyons dans la FIFA. Pourquoi voudrait-il de nous à Interpol ? », avait-il déclaré.
Ce vote peut être considéré comme une défaite cinglante pour Israël, dans la mesure où Jérusalem affirme depuis longtemps que sa position au sein de la communauté internationale n’a jamais été plus forte et que la majorité arabe automatique tend à s’éroder rapidement.
Et comme la Palestine a été admise au sein d’Interpol à l’occasion d’un vote à bulletin secret, il est difficile pour les responsables israéliens d’affirmer que les nations du monde soutiennent secrètement l’Etat juif, même si elles ne désirent pas pour le moment s’afficher à ses côtés publiquement.
La police israélienne a refusé de commenter l’inclusion de la Palestine au sein d’Interpol, ni les éventuelles répercussions de cette adhésion sur la coopération israélienne avec l’organisation internationale.
L’année dernière, Israël avait réussi à empêcher les Palestiniens de rejoindre Interpol avec 62 membres du conseil exécutif qui avaient voté pour reporter la requête. La première demande déposée par l’AP en 2015 avait été rejetée par Interpol qui avait déclaré qu’elle avait été soumise trop tardivement pour être débattue par l’assemblée cette année-là.
Mais cette année, les Palestiniens ont redoublé d’efforts diplomatiques pour garantir leur adhésion à l’instance mondiale. Le chef de la police de l’AP, Hazem Atallah, a rencontré le mois dernier le secrétaire général d’Interpol Jurgen Stock à Lyon, en France, pour faire campagne en faveur de Ramallah.
Interpol, la plus importante organisation internationale après les Nations unies, permet à ses états membres d’échanger des renseignements et de travailler de concert pour trouver des moyens de s’attaquer au crime international, du terrorisme au trafic d’êtres humains.
Alan Baker, un ex-haut diplomate israélien et expert juridique a estimé que la candidature palestinienne était « uniquement une opération de communication » de la part des Palestiniens.
« Cela ne les intéresse pas de négocier [avec Israël]. Ils veulent atteindre leur résultat final, qui est un état, par le biais des organisations internationales », avait-il déclaré à l’AFP avant le vote de mercredi.
Il estimait par ailleurs que « la tentative des Palestiniens de politiser cette organisation extrêmement professionnelle est très préjudiciable à Interpol. »
Selon lui, les Palestiniens ne pourront cependant pas, en rejoignant Interpol, émettre des mandats d’arrêt à discrétion contre des citoyens israéliens.
Raoul Wootliff, Tamar Pileggi et l’AFP ont contribué à cet article.