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Début de la procédure d’extradition de Malka Leifer après 6 ans et 68 audiences

Après que les juges ont conclu que la pédophile présumée recherchée en Australie feignait la maladie mentale, les procédures pourraient connaître de nouveaux retards

Jacob Magid est le correspondant du Times of Israël aux États-Unis, basé à New York.

Malka Leifer, à droite, est amenée dans une salle d'audience à Jérusalem, le 27 février 2018. (Crédit : AP Photo/Mahmoud Illean, File)
Malka Leifer, à droite, est amenée dans une salle d'audience à Jérusalem, le 27 février 2018. (Crédit : AP Photo/Mahmoud Illean, File)

Presque six ans après sa première arrestation et 68 audiences judiciaires, la cour de district de Jérusalem va se réunir pour une audience d’extradition, lundi matin, dans l’affaire Malka Leifer, qui est réclamée par l’Australie pour y répondre de 74 chefs d’inculpation pour violences sur mineures.

L’audience devrait être largement administrative dans la mesure où le tribunal a d’ores et déjà estimé au mois de mai que l’ancienne directrice de l’école Adass Israel de Melbourne, une école pour filles, avait simulé la maladie mentale afin d’éviter l’extradition et qu’elle est apte à répondre de ses actes devant les juges.

Toutefois, les procédures – qui ont traîné pendant des années, Leifer parvenant à convaincre le système judiciaire, au sein de l’Etat juif, qu’elle était trop affaiblie pour paraître sur le banc des accusés dans son pays natal – pourraient encore connaître des retards, avec notamment des appels qui ont été déposés devant la Cour suprême.

Une seule session a été programmée jusqu’à présent pour l’audience d’extradition mais les procureurs estiment qu’une autre pourrait être nécessaire, a indiqué un responsable judiciaire au Times of Israel.

Les procureurs ouvriront l’audience de lundi par une déclaration d’environ 30 minutes qui comprendra des extraits des plaintes déposées en 2011 auprès de la police australienne par des victimes de la pédophile présumée, et notamment les soeurs Dassi Erlich, Nicole Meyer et Ellie Sapper, a indiqué une source proche du dossier.

De gauche à droite, Ellie Sapper, Nicole Meyer et Dassi Erlich posent pour une photo à Jérusalem, le 29 novembre 2018 (Crédit : Jacob Magid/Time of Israel)

La défense devrait alors soumettre une liste d’objections bien plus longue. L’avocat de Leifer, Nick Kaufman – qui a rejoint la liste croissante d’avocats embauchés pour représenter la pédophile en série présumée – a laissé entendre au cours d’une audience de la Cour suprême, dimanche, qu’il prévoyait de dire que sa cliente n’avait pas exploité ses élèves, certains incidents ayant eu lieu alors que les adolescentes frôlaient l’âge du consentement, qui est de 18 ans.

Kaufman a déclaré aux journalistes, après l’audience de la Cour suprême, que l’Australie et Israël auraient besoin de prouver que les victimes présumées n’avaient pas consenti aux actes sexuels qui avaient eu lieu avec la principale – une assertion étrange dans la mesure où les violences sexuelles présumées avaient commencé lorsque les anciennes élèves n’étaient âgées que de 15 ans et que Leifer était en position d’autorité en tant qu’adulte et directrice d’établissement.

De plus, le système judiciaire israélien ne juge pas les crimes qui ont pu avoir lieu en Australie et il tente exclusivement de déterminer si Leifer peut y être extradée pour rejoindre le banc des accusés.

Si la Cour approuve l’extradition de Leifer, le ministre de la Justice, Avi Nissenkorn, devra signer une ordonnance. Toutefois, la décision du tribunal et le sceau d’approbation de Nissenkorn pourront faire l’objet d’un appel devant la Cour suprême, qui a déjà été sollicitée sur d’autres aspects de la procédure.

L’audience de la Cour suprême qui a eu lieu dimanche s’est penchée sur le dernier appel soumis pas la défense, réclamant l’accès aux comptes-rendus d’une série de réunions organisées par les accusatrices de Leifer ainsi que par les politiciens australiens qui avaient rencontré leurs homologues israéliens concernant le dossier. L’ex-ministre de la Justice, Ayelet Shaked, avait notamment été impliquée dans ces discussions.

Suite à l’entretien qui avait eu lieu entre les victimes présumées et Shaked, l’ex-ministre de la Justice avait fait savoir qu’elle signerait l’ordonnance d’extradition de Leifer si elle devait être ordonnée par la Cour. Kaufman, avocat éminent d’origine britannique et spécialiste du droit pénal international, avait estimé, à ce moment-là, que les propos tenus par Shaked étaient un exemple d’interférence de la part des politiques dans le système judiciaire.

De gauche à droite, les avocats de Malka Leifer, Yehuda Fried et Nick Kaufman, attendent à la Cour suprême le début de l’audience, des parents de Leifer assis derrière eux, le 19 juillet 2020 (Crédit : Ittay Flescher/Plus61J)

La juge de la Cour suprême Daphna Barak-Erez n’a pas semblé accepter un grand nombre d’arguments soumis par Kaufman, les qualifiant de « hors-propos » de manière répétée.

Leifer a fait son apparition lors de l’audience de dimanche pour la première fois depuis des années – via Zoom.

La juge a finalement rejeté l’appel dans la soirée de dimanche.

La défense a également fait appel d’un jugement émis au mois de mai qui avait considéré Leifer comme apte à comparaître lors de l’audience d’extradition. La Cour suprême doit se réunir à nouveau pour débattre du dossier le 29 juillet.

Dans un communiqué publié avant l’audience d’extradition de lundi, Erlich a dit que « nous avons attendu ce moment depuis 2011, lorsque nous avons signé nos plaintes ».

« Aujourd’hui, notre histoire et les détails portant sur les violences sexuelles que nous avons subies seront racontés dans un tribunal israélien pour la toute première fois. C’est une manière de valider notre histoire mais c’est aussi terrifiant », a-t-elle ajouté.

L’avocat des victimes Manny Waks, à droite, tient un téléphone par le biais duquel les victimes présumées Leifer, Dassi Erlich, Nicole Meyer et Elie Sapper s’expriment devant les journalistes à la Cour de district de Jérusalem, le 26 mai 2020 (Crédit : Jacob Magid/Times of Israel)

« C’est une validation pour nous de finalement pouvoir nous faire entendre dans un processus judiciaire qui a duré six ans et qui s’est concentré sur la santé mentale de Leifer, sans qu’aucune considération ne soit prêtée à la nôtre. C’est terrifiant de savoir que les détails de nos vies seront exposés d’une manière qu’il nous est impossible de contrôler », a continué Erlich.

En l’an 2000, Leifer avait quitté Israël pour prendre la tête de l’école Adass. Lorsque les accusations d’agressions sexuelles à son encontre avaient émergé, les membres du conseil d’administration avaient acheté à cette mère de huit enfants un billet d’avion vers Israël, lui permettant d’échapper à une mise en examen.

Elle avait été assignée à résidence en 2014 après le dépôt, par l’Australie, d’une demande d’extradition – une procédure qui avait été néanmoins suspendue en 2016, les magistrats ayant estimé qu’elle n’était pas apte à être traduite en justice. Elle avait été à nouveau arrêtée en 2018 après des vidéos qui l’avaient montrée vivant une vie totalement normale et sans difficultés.

Leifer aurait été aidée par l’ex-ministre de la Santé Yaakov Litzman, dont la police a recommandé l’inculpation l’année dernière en raison de pressions qu’il aurait exercées sur les psychiatres, avec pour objectif de changer les expertises des médecins soumises aux magistrats, faisant en sorte que l’accusée soit considérée inapte à être envoyée vers l’Australie.

Après plus d’un an d’audiences supplémentaires, la juge Chana Lomp du tribunal de Jérusalem avait conclu que les preuves concernant la santé de Leifer étaient non-concluantes et elle avait ordonné une nouvelle expertise réalisée par un panel de spécialistes pour déterminer si l’ex-principale feignait la maladie psychiatrique.

Au mois de février, le panel avait déposé ses conclusions, estimant que Leifer avait simulé.

La nature des retards accumulés dans ce dossier a été à l’origine de tensions entre Israël, le gouvernement australien et la communauté juive australienne.

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