Des écolos juifs inversent un rituel et nettoient la mer des péchés de l’humanité
Certains pratiquent un rituel où les péchés de l'année sont symboliquement lavés dans l'eau, d'autres pratiquent le Reverse Tashlich en nettoyant les bords de mer pour se racheter
- Tim Spurrier, président de la Thanet and District Reform Synagogue dans le comté de Kent, au Royaume-Uni. (Autorisation)
- Noam Bedein, fondateur du Dead Sea Revival Project. (Autorisation)
- Des volontaires à Miami, en Floride, participent à un Tashlich inversé sur cette photo non datée. (Autorisation)
- Des volontaires à Tampa, en Floride, participent à un Tashlich inversé sur cette photo non datée. (Autorisation)
- Sur cette photo non datée, des bénévoles participent à un nettoyage de plage organisé par le centre communautaire juif de Key Largo, en Floride, à l'occasion du Reverse Tashlich. (Autorisation)
NEW YORK — En entrant dans la nouvelle année lunaire 5 782, les Juifs religieux du monde entier jettent symboliquement leurs péchés dans l’eau, cette semaine : une tradition connue sous le nom de tashlich. Au même moment, plus de cent groupes de bénévoles juifs du monde entier ont décidé d’inverser le rituel et de nettoyer les océans.
« Quand nous jetons nos péchés à la mer, nous péchons en définitive bien davantage parce que nous nuisons à la pureté de notre environnement », déclare Dominique Chor, une jeune femme de 25 ans, au Times of Israël par téléphone depuis son domicile de Rio de Janeiro, au Brésil.
Chor et un groupe d’étudiants juifs du groupe Hillel – pour lequel elle fait du bénévolat – de son université vont participer à leur toute première opération Reverse Tashlich (Tashlish inversé) en date du 12 septembre. Et – une autre première – des groupes de jeunes Israéliens prendront aussi part à l’édition de cette année.
L’ancien, très ancien rituel du tashlich se pratique habituellement entre Rosh Hashana et la semaine qui mène à Yom Kippour, le Jour du Grand pardon. Il consiste à jeter des cailloux ou des morceaux de pain – symbole des péchés – dans une réserve d’eau. Dans ce Tashlich inversé – dont c’est la quatrième édition – des groupes juifs se retrouvent pour collecter les ordures jetées le long des rivières, des lacs, des océans, des plus petits cours d’eau aux plus grands.
Cet événement – qui n’empêche pas la pratique du rituel classique – est organisé par Tikkun HaYam, ou Guérir la mer, un groupe dont les activités sont consacrées à la restauration de l’environnement marin d’un point de vue juif. Selon le site internet du « Reverse Tashlich« , ce sont approximativement six millions de tonnes de déchets qui sont jetés chaque années dans les eaux en raison de la négligence humaine.
Shayna Cohen a rejoint Tikkun HaYam en 2018. Née à Hawaï, Cohen, 26 ans, a toujours considéré l’océan comme « l’endroit où elle est heureuse ». Elle est dorénavant instructrice diplômée en plongée sous-marine et elle vit à Orlando, en Floride.

« J’ai appris toutes ces choses dont on ne parle pas forcément et j’ai eu le sentiment qu’il fallait absolument protéger l’océan », explique-t-elle.
Après avoir rejoint l’organisation, Cohen a été chargée de parler de l’opération « Reverse Tashlich » aux communautés juives du monde entier. Cette année, ce sont 134 équipes, dans 15 pays, qui nettoieront les plages dans le cadre du principe juif « baal tashchit » – l’interdiction des destructions gratuites. Des rencontres sont programmées depuis Bakou, en Azerbaïdjan, sur la mer Caspienne, jusqu’au minuscule archipel de Palau, au sud du Pacifique.
« C’est vraiment une tradition qui fait réfléchir et quand on jette ses péchés dans l’eau, on peut réfléchir à ce qu’on veut introduire dans la nouvelle année », commente Cohen en évoquant le rituel du tashlich. « L’opération de nettoyage est, me semble-t-il, une manière tangible de voir ce qu’on veut apporter dans la nouvelle année en ce qui concerne l’environnement ».

Pour Chor, qui a fait des études de psychologie dans une université américaine de Rio et qui a mis sur pied un projet pour venir en aide aux adolescents en difficulté, participer au programme « Reverse Tashlich » est « très important, en particulier avec le réchauffement climatique ».
« Ici, au Brésil, la pollution de l’océan est terrible », continue Chor. « J’ai voulu amener le programme à Rio également et je voudrais qu’il puisse devenir une tradition ici parce qu’il y a beaucoup à faire pour nettoyer nos eaux. Si les gens pouvaient trouver un sens profond à le faire, je me suis dit qu’il serait possible de convaincre un plus grand nombre d’y participer ».
« C’est important pour nous en tant que communauté et en tant que société dans le monde entier », poursuit-elle.
Chor estime qu’une vingtaine de personnes seront présentes lors du rassemblement du groupe à Arpoador, l’une des plages les plus en vogue de Rio, où elle va organiser une courte séance de méditation avant l’opération de nettoyage.
« Nous pensons que nous allons trouver beaucoup d’ordures là-bas dans la mesure où beaucoup de gens vont sur cette plage pendant le week-end », continue-t-elle. « Et nous prévoyons d’y aller en fin de journée – à cause du soleil qui est très chaud ici, à Rio, mais aussi parce que les gens auront laissé beaucoup plus de détritus que si nous y allons dans la matinée. »
De l’autre côté de l’océan Atlantique, dans le comté de Kent, au Royaume-Uni, Tim Spurrier, 53 ans, se prépare lui aussi au programme « Reverse Tashlich ». Président d’une synagogue réformée dans la ville côtière de Ramsgate, Spurrier déclare que participer à ce nouveau rituel « semble être une évidence ».

« Le Tikkun olam est une tradition très ancrée dans notre communauté, depuis aussi longtemps que j’y suis impliqué », a expliqué Spurrier, en référence au concept juif de réparer le monde. « Je pensais que cela nous correspondait parfaitement et cela correspondait à la vision que nous devons être une communauté d’action tournée vers l’extérieur, que ce ne sont pas seulement des mots en l’air. »
La pollution et les débris, a déclaré Spurrier, sont « un très gros problème » à Ramsgate, qu’il décrit comme « une ville balnéaire britannique à l’ancienne ».
« La plupart des gens sont formidables, mais il y a beaucoup de gens qui jettent leurs ordures et partent – et donc à la fin de la journée, il y a des ordures partout, ce qui constitue un danger pour la faune, etc. », a-t-il déclaré. « Ça a un impact direct sur nous en tant que communauté. »
Après que la congrégation de Spurrier se soit engagée à faire un « Tashlich inversé », le maire de Ramsgate Raushan Ara s’est joint à l’effort en faisant don de fournitures telles que des outils de ramassage des ordures et en encourageant les personnes extérieures à la communauté juive à participer.
« Dans l’esprit que les fêtes favorisent introspection et réflexion, nous voulons être conscients et ouverts sur le monde quant à notre impact en tant que communauté plutôt que d’être complètement fermés sur nous-mêmes et de ne penser qu’à nos propres actions », a déclaré Spurrier.

En présentant l’idée du « Tashlich inversé » à différentes communautés juives, Cohen a déclaré que « beaucoup de gens sont ravis d’adopter une tradition vraiment concrète ».
« Ça a l’air d’être vraiment stimulant. Les gens se sentent inspirés », a-t-elle déclaré. « C’est en extérieur, et basé sur la communauté, c’est donc quelque chose que les gens peuvent faire dans le nouveau monde dans lequel nous vivons. »
La mission de Tikkun HaYam, a ajouté Cohen, est de veiller à ce « que la communauté juive soit activement impliquée et engagée dans la réparation de la mer ».
« Nous aimerions y voir un point de départ pour impliquer les gens dans cette initiative afin que nous puissions provoquer un changement réel », a-t-elle déclaré.
Cette année, parmi les groupes participants, on trouve plusieurs équipes israéliennes organisées par Noam Bedein, le fondateur et directeur de The Dead Sea Revival Project âgé de 39 ans. L’ONG de Bedein cherche à éduquer les gens sur la mer Morte, en mettant en valeur sa beauté tout en enseignant les chocs environnementaux dramatiques qu’elle a subis ces dernières années, qui ont fait baisser le niveau de la mer année après année.
« En étant très impliqué dans la cause de la mer Morte, plus vous approfondissez l’histoire, plus vous valorisez le concept de l’eau et de la durabilité de l’eau », a déclaré Bedein. « J’ai été fasciné par l’approche de Tikkun HaYam. »

Bedein a aidé à cartographier et à organiser des équipes autour de la mer Morte, du lac de Tibériade Galilée et le long du littoral méditerranéen d’Israël pour participer au nettoyage du 12 septembre.
« Nos équipes sont constituées de personnes très diverses de tous horizons, des ultra-orthodoxes aux libéraux », a-t-il déclaré. « C’est un thème que tout le monde peut soutenir. »
Bedein pense que la préservation de l’eau de notre planète est le dénominateur commun qui peut rassembler différentes communautés, et a déclaré que le « Tashlich inversé » peut devenir un excellent lien entre les Juifs de la diaspora et les Israéliens.
« En fin de compte, ce sont des valeurs juives, et nous pouvons nous rassembler autour d’elles, quel que soit notre milieu », a-t-il déclaré. « Il y a beaucoup de travail à faire en Israël dans tous les secteurs pour préserver l’environnement. C’est un énorme défi. Ce sont des choses que nos différentes communautés peuvent apprendre les unes des autres. »
... alors c’est le moment d'agir. Le Times of Israel est attaché à l’existence d’un Israël juif et démocratique, et le journalisme indépendant est l’une des meilleures garanties de ces valeurs démocratiques. Si, pour vous aussi, ces valeurs ont de l’importance, alors aidez-nous en rejoignant la communauté du Times of Israël.

Nous sommes ravis que vous ayez lu X articles du Times of Israël le mois dernier.
C'est pour cette raison que nous avons créé le Times of Israel, il y a de cela onze ans (neuf ans pour la version française) : offrir à des lecteurs avertis comme vous une information unique sur Israël et le monde juif.
Nous avons aujourd’hui une faveur à vous demander. Contrairement à d'autres organes de presse, notre site Internet est accessible à tous. Mais le travail de journalisme que nous faisons a un prix, aussi nous demandons aux lecteurs attachés à notre travail de nous soutenir en rejoignant la communauté du ToI.
Avec le montant de votre choix, vous pouvez nous aider à fournir un journalisme de qualité tout en bénéficiant d’une lecture du Times of Israël sans publicités.
Merci à vous,
David Horovitz, rédacteur en chef et fondateur du Times of Israel