Des patrons de PME en colère contre la gestion de la crise par Netanyahu
Des centaines de personnes ont manifesté près de la Knesset et au domicile du président dénonçant les dommages financiers causés par les restrictions ; M. Rivlin en a rencontrés
Stuart Winer est journaliste au Times of Israël

Des centaines de patrons de petites entreprises indépendantes ont manifesté dimanche près de la Knesset, bloquant les routes et mettant le feu à des pneus. Ils demandaient au gouvernement de les aider à faire face aux ordres de fermeture, en raison de la crise du coronavirus, qui les ont empêchés de percevoir des revenus pendant plusieurs semaines.
Les manifestants ont également accroché des mannequins par le cou à des échafaudages pour représenter leur situation désastreuse.
Certains manifestants ont concentré leur indignation sur le Premier ministre Benjamin Netanyahu, et un interviewé désemparé a déclaré à la Douzième chaîne d’information : « Nous avons voté pour vous. Vous avez été choisi comme celui qui sait comment gérer les guerres. Dans la guerre contre le coronavirus, vous avez échoué ! … Vous devez donc partir ! »
Les travailleurs indépendants se plaignent depuis longtemps des mauvais traitements infligés par l’État et les autorités fiscales, qui prélèvent une grande partie de leurs revenus, mais n’offrent aucun des filets de sécurité dont bénéficient les salariés.
L’un d’eux a dit aux caméras : « Nous exigeons que vous nous rendiez tout l’argent que vous nous avez pris [maintenant qu’il est nécessaire]. Nous le méritons de plein droit, et non par charité ! »

Netanyahu a mené des consultations dimanche soir sur la façon de soutenir davantage les travailleurs indépendants israéliens, a rapporté la Douzième chaîne, tandis que les fonctionnaires du gouvernement ont reconnu auprès de la chaîne que la bureaucratie causait des difficultés pour que les fonds destinés à soutenir les petites entreprises leur parviennent réellement.
En plus de la capitale, des dirigeants indépendants ont également organisé des manifestations à Tel Aviv, Haïfa et en Basse-Galilée. Parmi les manifestants figuraient des propriétaires d’entreprises des secteurs de la beauté et de la culture, ainsi que des exploitants de jardins d’enfants privés qui ont été durement touchés par les décrets de confinement qui ont paralysé la majeure partie de l’économie israélienne.
Lorsque les manifestants de Jérusalem ont quitté le quartier du Parlement pour poursuivre leur rassemblement devant la résidence officielle du président Reuven Rivlin, également à Jérusalem, des représentants ont été invités à l’intérieur pour des entretiens impromptus avec Rivlin. Le président s’est engagé à défendre leur cause auprès des responsables gouvernementaux lorsqu’il les rencontrera pour faire le point sur la campagne de lutte contre la propagation du virus.
« Nous sommes dans une situation d’urgence qui ressemble à une guerre, et nous devons voir les choses dans leur ensemble sans abandonner personne », a déclaré M. Rivlin aux représentants.

Rivlin a rencontré deux manifestants : Lucy (identifiée uniquement par son prénom), une institutrice de maternelle de Ramat Gan, et Abir Kara, fondateur du groupe Facebook « Ani Shulman« , qui est devenu un point de ralliement pour les travailleurs indépendants en Israël.
Kara a déclaré à Rivlin que 60 % des employés du pays travaillent dans des petites entreprises.
« Nous avons besoin de soutien, non seulement dans cette crise, mais maintenant plus que jamais », a déclaré Kara. « Nous sommes une partie oubliée de la société et en ces temps difficiles, il est très important que le ministère des Finances et le bureau du Premier ministre travaillent plus rapidement car ce qui se passe pourrait mener à l’anarchie. Nous attendons de nos représentants élus qu’ils donnent l’exemple et qu’ils nous montrent comment ils portent eux aussi le fardeau ».
Lucy a déclaré à Rivlin : « Nous ne recevons rien, pas même les subventions qui ont été annoncées. Nos demandes ont été refusées et nous n’avons rien obtenu. En attendant, nous ne faisons que payer et nos dettes s’accumulent. »
« Tout ce que nous demandons, c’est un plan, pour savoir où nous allons », a-t-elle déclaré.
Rivlin a répondu en leur disant que « votre protestation est justifiée », notant également les difficultés rencontrées par les travailleurs indépendants qui tentent de gagner leur vie, tout en s’occupant de leurs enfants à la maison.
Le président a déclaré à ces deux interlocuteurs qu’il aborderait le sujet lors de ses rencontres avec les hauts fonctionnaires de l’État, notamment les ministres de la Santé et de la Défense, ainsi qu’avec le chef du commandement du Front intérieur de l’armée.
« Je vous promets que tout ce que vous avez dit sera transmis aux décideurs politiques », a déclaré M. Rivlin.
« Je sais que le ministère des Finances a l’intention d’améliorer ses subventions et je comprends que vous êtes dans une situation difficile avec les banques et je vous promets que je ferai tout mon possible pour relayer votre protestation », a poursuivi M. Rivlin.
« C’est une situation d’urgence qui ressemble à une guerre, et nous devons voir les choses dans leur ensemble sans abandonner personne. Ce que vous avez dit ici sera relayé comme vous l’avez dit. Vous êtes venu me dire ce que vous aviez à dire et je vais m’en occuper ».

Eliran Bardugo, un organisateur connu dans l’événementiel qui a participé à la manifestation à Jérusalem, a prédit que les protestations ne feront que s’intensifier avec le temps.
« Aujourd’hui, les gens ont commencé à brûler des pneus et à faire du grabuge, mais ça va s’aggraver », a-t-il déclaré au site Internet Ynet.
« Ils ne comprennent tout simplement pas la situation de détresse ; les gens vont commencer à devenir fous et à se jeter du haut d’Azrieli », a-t-il déclaré en faisant référence à un complexe de gratte-ciel emblématique de Tel Aviv.
Tôt dimanche, le cabinet a approuvé un léger assouplissement des restrictions qui ont conduit l’économie à un arrêt presque total. Toutefois, les petites entreprises non essentielles, comme celles des secteurs de la culture, de la mode et de la beauté ainsi que les centres commerciaux, pourraient encore devoir attendre longtemps avant de pouvoir retrouver un emploi à temps plein. Les experts ont estimé qu’ils seront parmi les derniers à être libérés des restrictions dans le cadre d’un plan visant à mettre fin au confinement.
Depuis que le gouvernement a commencé à introduire des restrictions de confinement exigeant que la plupart des Israéliens restent chez eux, sauf pour les besoins essentiels, le taux de chômage est passé d’environ 4 % début mars à 26,25 % à la mi-avril, avec 1 093 465 personnes sans emploi.
Au début de ce mois, le gouvernement a approuvé des subventions d’urgence pour les Israéliens indépendants dont les entreprises ont été touchées par la pandémie de coronavirus. Les fonds iront aux entreprises qui ont connu une baisse d’au moins 25 % depuis le début de la crise en Israël en mars, par rapport à la même période l’année dernière.