Des vétérans blessés trouvent un refuge dans des centres de rééducation high-tech
Dans le cadre de la guerre contre le Hamas, les centres Beit HaLochem de la ZDVO s'attendent à accueillir une grande partie des 20 000 soldats souffrant d'un handicap permanent
Le 11 octobre, Itay Sagy, un réserviste, est parti en mission avec d’autres soldats appartenant au commando Maglan pour combattre le groupe terroriste palestinien du Hamas dans le sillage de l’attaque qui avait été commise par quelque 3 000 terroristes armés dans le sud d’Israël, quatre jours auparavant.
Un véhicule de l’équipe avait eu un problème. Les militaires avaient décidé de se séparer en deux groupes : le premier était resté pour tenter de réparer la panne et le second s’était rendu dans un miklat – abri anti-atomique -, le long de la route, pour se couvrir dans un contexte de tirs de roquette.
« Quand nous sommes arrivés là-bas, huit terroristes de la Brigade Nukhba étaient là, en embuscade. Ils ont ouvert le feu depuis toutes les directions. Six d’entre nous avons été mis hors d’état et les autres se sont battus comme des fous. J’ai réussi à tuer deux hommes et à ce moment-là, ils ont commencé à lancer des grenades dans ma direction et l’une d’entre elles est tombée juste à côté de moi, je ne l’ai pas vue. Elle a explosé et elle m’a déchiré la nuque », a expliqué Sagy.
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Il a raconté au Times of Israel ce qui lui est arrivé au cours d’un entretien accordé début février à Beit HaLochem, à Tel Aviv, l’un des quelques centres du pays à répondre aux besoins de rééducation prolongée des soldats blessés.
« Je me souviens ne pas avoir respiré pendant une trente secondes quand j’ai été blessé. Pendant ce temps, j’observais mon environnement de l’extérieur de mon corps en me donnant l’ordre de revenir à la vie », s’est-il souvenu.
« Alors qu’on continuait à se battre – ils ont finalement été tous tués – un médecin de l’unité appliquait sa main sur ma nuque pour tenter de maîtriser l’hémorragie. Finalement, il a réussi à glisser des compresses dans la blessure pour stopper le saignement et j’ai été héliporté à l’hôpital Ichilov à Tel Aviv 40 minutes plus tard », a-t-il raconté.
Quatre mois après avoir été blessé, Sagy, un étudiant de 25 ans en droit et administration qui est originaire du kibboutz Gadot, dans le nord d’Israël, suit encore une intense rééducation à Ichilov. Mais il a commencé à passer beaucoup de temps à Beit HaLochem, un centre de rééducation, de sports et de loisirs qui est exclusivement réservé aux vétérans en situation de handicap de l’armée israélienne.
Il y a d’autres centres Beit HaLochem à Haïfa, à Jérusalem et à Beer Sheva, et un nouveau ouvrira ses portes à Ashod à la fin de l’année 2025. Placés sous l’autorité de l’Organisation des vétérans de l’armée en situation de handicap Zahal (ZDVO), avec le soutien partiel du ministère de la Défense, ces centres sont une nouvelle étape dans la rééducation des soldats blessés et ils deviennent souvent un deuxième foyer durable, un foyer qui leur apporte un soutien – ainsi qu’à leur famille.
Ces centres proposent des structures qui sont à la pointe de la technologie ainsi que toutes les activités thérapeutiques imaginables, avec notamment de nombreux sports adaptés ou non, des activités artistiques, musicales, des conférences et des voyages.
Beit HaLochem est un endroit où être un vétéran en situation de handicap est la norme et où l’objectif est d’amener l’individu à rester actif, à s’engager et à travailler sur ses difficultés personnelles. Le président de la ZDVO, Edan Kleiman, avocat, en est l’incarnation même. Il a perdu l’usage total de ses jambes après avoir été la cible de tirs de terroristes à Gaza pendant son service militaire, en 1992 – il se déplace en fauteuil roulant.
« Il n’existe aucun autre pays doté d’une telle structure pour ses vétérans en situation de handicap. Nous avons eu la visite de vétérans américains et ils ont pleuré d’envie quand ils ont constaté notre niveau d’engagement en faveur de la rééducation à long-terme de nos vétérans hommes et femmes », a commenté Ora Seidner, à la tête du service de développement des projets au sein du Fonds pour les vétérans en situation de handicap de la ZDVO.
Selon les chiffres du ministère de la Défense qui ont été publiés en date du 15 février, plus de 5 500 soldats blessés sont entrés en rééducation depuis le début de la guerre. Ils devraient être 20 000 d’ici la fin de l’année 2024.
95 % de ces soldats sont des hommes et la plupart sont des réservistes âgés de 30 ans ou moins. Jusqu’à présent, 42 % des blessures subies touchent des membres et 21 % des blessés souffrent de problèmes psychologiques, notamment de troubles de stress post-traumatique (TSPT).
« Avant, ça prenait plus de temps pour qu’un soldat soit reconnu comme étant en situation permanente de handicap mais dans cette guerre, la procédure a été rationnalisée et des milliers de personnes ont d’ores et déjà bénéficié de cette désignation », a expliqué Seidner .
Une fois que les soldats sont reconnus comme handicapés par le ministère de la Défense, ils peuvent adhérer à la ZDVO. Moyennant une petite déduction sur leurs indemnités mensuelles d’invalidité versées par le ministère, ils peuvent bénéficier d’une assistance bureaucratique, de réductions et d’autres avantages, par l’intermédiaire des bureaux de district de la ZDVO.
« Nous comptons 54 000 membres depuis 1949, mais tous ne s’inscrivent pas dans l’un des centres de Beit HaLochem. Ce sont surtout les personnes les plus gravement blessées qui s’inscrivent. Nous avons actuellement plus de 15 000 membres dans nos quatre centres existants », a déclaré Seidner.
« Nous accueillons généralement 300 à 500 nouveaux membres par an. Aujourd’hui, nous nous préparons à un afflux de milliers de personnes. Des centaines de nouveaux membres viennent déjà dans nos centres de Beit HaLochem et pratiquent des sports comme le basket-ball et la natation, et utilisent nos centres de remise en forme », a-t-elle ajouté.
Comme dans le reste du pays, les événements du 7 octobre et la guerre ont pris la ZDVO au dépourvu. En réaction, elle aménage des espaces sous-utilisés dans ses centres Beit HaLochem et augmente ses effectifs, notamment en quadruplant son personnel qui travaille avec les personnes souffrant de TSPT. Le nouveau Beit HaLochem d’Ashdod fournira des services indispensables aux vétérans handicapés et à leurs familles dans le sud du pays, une région durement touchée.
« Nous avons immédiatement lancé un fonds d’urgence et nous procédons maintenant à une collecte de fonds plus stratégique. Nous devons collecter 40 % de plus cette année qu’en 2023. Notre budget organisationnel a été augmenté de 23 %, passant d’un montant prévu de 201 millions de shekels à 253 millions de shekels », a précisé Seidner.
Un don de 24 millions de dollars des Amis de Tsahal au centre hospitalier de Sheba pour les soins de santé mentale des anciens combattants de Tsahal permettra aux centres de Beit HaLochem de renforcer leur capacité à soutenir les anciens combattants souffrant de TSPT. Une part importante de ce don sera affectée aux soins dispensés par les psychologues de Sheba dans les centres.
Le Times of Israel a rencontré Sagy avec le soldat de la brigade Golani du Corps blindé Yuval Patiev, 20 ans, dont la jambe a été brisée le 7 octobre lorsqu’une attaque du Hamas a mis son véhicule blindé hors d’état de nuire près de la frontière de Gaza. Une bombe placée sous le véhicule par l’un des terroristes a explosé, blessant Patiev.
Originaire de Kiryat Shmona, Patiev a rencontré Sagy lorsqu’ils étaient colocataires à Ichilov. Les deux sont devenus des amis très proches. Le Times of Israel s’est entretenu avec eux alors qu’ils s’apprêtaient à s’envoler pour l’Australie au nom de la ZDVO afin de raconter leur histoire aux sympathisants de l’organisation.
Comme Sagy, Patiev poursuit sa rééducation à Ichilov et est suivi par un psychologue qu’il a commencé à voir peu après avoir été blessé. Cependant, il a déclaré que venir régulièrement à Beit HaLochem était déjà devenu important pour lui. Son objectif est de reprendre la course à pied et pourquoi pas de terminer un marathon.
« Vous venez ici et vous pouvez utiliser la piscine, la salle de sport et le court de tennis. Mentalement, c’est très bien parce qu’on n’est pas seul. Vous partagez les mêmes choses que les autres anciens soldats qui sont ici. Ils ont peut-être 60, 50 ou 40 ans, alors que je n’en ai que 20, mais j’ai compris [en discutant avec eux et en les observant] que la vie ne s’arrête pas avec votre blessure et que vous pouvez aller de l’avant », a expliqué Patiev.
Avant le 7 octobre, 60 % des personnes présentes à Beit Halochem étaient âgées de 60 ans et plus. Avec l’afflux de jeunes vétérans de cette guerre, les centres développeront leur programme spécial pour les membres âgés de 18 à 35 ans.
« La jeune génération aime relever des défis physiques dans le cadre de ses activités », a fait remarquer Seidner.
Elay Chayot, 26 ans, s’entraîne tous les jours au Beit HaLochem de Tel Aviv. Il s’est brisé le cou lors d’un accident au cours d’un entraînement en 2018, alors qu’il était soldat de l’unité Maglan et est désormais une star du tennis en fauteuil roulant qui se prépare pour les Jeux paralympiques de 2024 à Paris.
« Beit HaLochem m’a fourni tout ce dont j’avais besoin, de l’entraînement au soutien en passant par le financement. Plus important encore, il m’a permis de me remettre au sport, une activité que j’aimais et dans laquelle j’excellais avant ma blessure », a déclaré Chayot.
Depuis le début de la guerre, il se rend fréquemment dans les hôpitaux pour parler aux soldats en convalescence, leur parler de Beit HaLochem et les inviter à s’y intéresser.
« Je pense que la ZDVO est la seule organisation au monde qui ne souhaite pas voir ses membres augmenter. Personne ne voulait que ce qui s’est passé se produise », a souligné Chayot.
« Mais la réalité est que cette guerre va considérablement réduire l’âge moyen des personnes qui viennent à Beit HaLochem. Je me réjouis de l’esprit de jeunesse que cela va insuffler à cet endroit », a-t-il ajouté.
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