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Durcissement légal contre les Palestiniens vendant leurs terres aux Juifs

Cette décision intervient suite aux acquisitions à Jérusalem Est ; le Fatah accuse les vendeurs d’être des « traîtres »

Elhanan Miller est notre journaliste spécialiste des affaires arabes

Beit Yehonatan, un immeuble acquis par Ateret Kohanim dans le quartier palestinien de Silwan (Crédit : Abir Sultan/Flash 90)
Beit Yehonatan, un immeuble acquis par Ateret Kohanim dans le quartier palestinien de Silwan (Crédit : Abir Sultan/Flash 90)

En réponse aux ventes de propriétés palestiniennes à des organisations juives à Jérusalem Est, le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, a durci la peine contre les citoyens vendant leurs biens immobiliers aux Israéliens.

Selon l’agence de presse palestinienne officielle Wafa, Abbas a renforcé lundi la peine encourue à une peine de travaux forcés à vie pour « tous ceux qui détournent, louent ou vendent des terres à un Etat ennemi ou à l’un de ses citoyens ».

L’article 114 du code pénal numéro 16 de Jordanie, applicable aux Territoires palestiniens, prévoit une peine « temporaire de travaux forcés » pour les personnes reconnues coupables de ce « crime ».

La société civile et le gouvernement palestinien ont réagi avec colère lorsque la nouvelle de l’acquisition de 26 appartements dans le quartier de Silwan à Jérusalem Est a été révélée. Ces appartements ont été achetés par Elad, une fondation israélienne qui se consacre à l’implantation des Juifs dans la Cité de David.

Durant la nuit de dimanche, des Juifs se sont installés dans 10 appartements situés dans deux immeubles acquis par une autre organisation, Ateret Kohanim, dans une autre partie du quartier.

L’agence de presse Maan indique que ces immeubles ont été vendus par leurs propriétaires à un homme, dénommé Shams al-Din al-Qawasmi, qui les a revendus aux groupes juifs.

Un porte-parole d’Ateret a indiqué qu’il n’a fait que faciliter la transaction qui s’est effectuée au nom d’une compagnie étrangère appelée Kudram. Haaretz précise que l’achat a été effectué grâce à un mandataire.

Lors du discours de conclusion d’une conférence organisée lundi soir, le Conseil révolutionnaire du Fatah a qualifié de « haute trahison » l’acte des Palestiniens qui ont vendu leurs propriétés de Jérusalem. Il a demandé au gouvernement et à l’appareil juridique de « prendre les mesures nécessaires pour les dissuader ».

Le mouvement a aussi demandé à la population de « les boycotter et de les humilier à tous les niveaux ». La décision d’Abbas a été prise rapidement après ces déclarations.

« Ceux dont les âmes malades leur ont permis de vendre leurs terres ou leurs maisons, ou qui ont rendu possible ces ventes aux ennemis du peuple palestinien, sont une bande de traîtres, des traîtres à leur nation et à leur religion », déclare le porte-parole du Fatah, Osama al-Qawasmi, dans un communiqué publié par Wafa. « Ils apportent la honte et le mépris sur eux dans ce monde et dans le monde à venir ».

« On devrait choisir de mourir plutôt que de vendre son honneur et de trahir la terre la plus sacrée au monde, remplie du sang des prophètes et des martyrs de l’Histoire », ajoute-t-il. « Ces traîtres sont destinés à mourir d’une mort humiliante ».

Rencontre entre l'ancienne députée Anastasia Michaeli et les femmes juives résidant à Beit Yehonatan dans le quartier arabe de Silwan à Jérusalem Est le 12 octobre 2010 (Crédit : Miriam Alster/Flash90)
Rencontre entre l’ancienne députée Anastasia Michaeli et les femmes juives résidant à Beit Yehonatan dans le quartier arabe de Silwan à Jérusalem Est le 12 octobre 2010 (Crédit : Miriam Alster/Flash90)

Le code pénal révolutionnaire de l’OLP applique la peine de mort aussi bien pour les traîtres qu’à ceux reconnus coupables d’avoir « cédé des positions à l’ennemi ».

Depuis la fin des années 1990, les cours palestiniennes ont condamné à mort plusieurs personnes reconnues coupables de ventes de terrains, même si Abbas n’a autorisé aucune exécution de ses peines depuis son élection en 2004.

Les détails sur le supposé vendeur des biens immobiliers de Silwan ont été diffusés dans les médias sociaux lundi.

Même si la loi palestinienne ne s’applique pas à Jérusalem Est, Bassem Eid, un militant d’un groupe de défense des droits civils basé à Jérusalem, indique qu’il a déjà suivi des dossiers où des résidents de Jérusalem ont été enlevés en pleine ville et torturés à mort à Ramallah par l’Agence de sécurité préventive de l’Autorité palestinienne.

En 1997, Farid Bashiti, un citoyen israélien, a été attiré à Ramallah et tué pour son implication dans des ventes de biens immobiliers. En 2000, une cour israélienne a reconnu que Bashiti était lui aussi une victime de terrorisme.

Une autre personne, ancienne résidente du camp de réfugiés de Shuafat à Jérusalem, se remémore Eid, a été enlevée à la Porte de Damas dans la Vieille Ville et est morte après avoir été torturée dans les prisons à Ramallah.

« Je n’ai pas vu Israël remuer ciel et terre lorsque ces hommes ont été arrêtés », souligne Eid. « Si un Juif avait été enlevé à Ramallah, je suppose que Netanyahu aurait clôturé la ville ».

Selon Eid, l’Autorité palestinienne profite de la complaisance israélienne envers les résidents de Jérusalem pour intimider et persécuter ceux qui sont suspectés de proposer à la vente des biens immobiliers. Mais cette nouvelle loi ne permettra pas de mettre fin à ce phénomène, affirme-t-il.

« Ceux qui veulent vendre leurs terres ne consultent pas Abbas », explique Eid. « L’AP n’est mise au courant qu’une fois qu’ils ont quitté le pays pour partir vivre à l’étranger ».

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