En Israël, le traumatisme du 7 octobre se grave aussi dans la peau
Des Israéliens ayant échappé au massacre de la rave Nova du 7 octobre se sont fait tatouer gratuitement par des artistes samedi, lors d’une retraite organisée pour les survivants du festival dans le sud du pays
Dans le désert ocre de l’Arava, dans le sud d’Israël, 480 rescapés du massacre de la rave Nova ont pris part à une retraite de trois jours, gracieusement organisée par des bénévoles de la communauté du Midburn, autre référence de la scène électro israélienne.
« Pendant 72 heures, nous leur proposons tout ce qui peut faire du bien », déclare Assaf Yirmi au Times of Israel, qui a mis sur pied l’événement avec son associée Chen Shlingbaum.
Au programme de la retraite : massages, ateliers, yoga, nourriture à volonté, mais aussi des spectacles et deux soirées techno, animées par les meilleurs DJ israéliens.
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C’est la troisième retraite que les deux piliers de la communauté Midburn, qui reproduit en Israël le célèbre festival Burning Man américain, organisent pour les survivants du Nova, un peu plus de 100 jours après l’attaque terroriste du Hamas palestinien.
« Lors de la première édition, 150 jeunes sont venus, puis 250 à la seconde, puis presque 500 aujourd’hui, ça montre à quel point ils sont contents », se réjouit Assaf.
« Une semaine après le Nova, le festival Midburn devait avoir lieu exactement au même endroit », explique Chen, avant de poursuivre : “c’est une communauté qui en a adopté une autre en quelque sorte”.
En plein milieu du désert, l’espace qui accueille les festivaliers abrite de nombreuses tentes où les jeunes se regroupent sur d’immenses tapis, une scène et plusieurs autres installations.
« Je n’avais pas eu l’occasion de sortir et d’aller à une fête (depuis le 7 octobre), c’était vraiment magique, je reviendrai », confie Gal, 21 ans, qui a échappé aux terroristes du Hamas lors de la tuerie.
Le 6 et 7 octobre, des milliers de jeunes s’étaient donné rendez-vous pour danser au festival electro Tribe of Nova près du kibboutz Reïm, à la lisière de la Bande de Gaza. Près d’une personne sur dix a été assassinée par les commandos du Hamas lors d’une attaque menée contre l’État hébreu et au cours de laquelle environ 3 000 hommes du groupe islamiste se sont introduits en Israël depuis la bande de Gaza par voie terrestre, aérienne et maritime.
Ils ont tué près de 1 200 personnes, dont une majorité de civils, au cours de raids sur une vingtaine de localités situées près de Gaza, massacrant des familles entières dans leurs maisons et au moins 260 festivaliers de la rave. Ils ont aussi kidnappé 253 personnes, dont des femmes, des enfants et des personnes âgées, qu’ils ont entraînées dans la bande de Gaza où une centaine sont toujours retenues captives. Le plus jeune otage, Kfir Bibas, n’avait pas encore 9 mois.
Cette attaque inédite du Hamas a déclenché une opération militaire israélienne de grande envergure dans l’enclave palestinienne soumise à des restrictions sécuritaires israéliennes depuis que le groupe islamiste y a férocement pris le pouvoir en 2007. 219 soldats sont morts dans le cadre de cette opération selon les autorités israéliennes et au moins 25 000 Palestiniens ont été tués selon le ministère de la Santé de Gaza, dirigé par le Hamas. Ces derniers chiffres, qui ne peuvent être vérifiés de manière indépendante, incluent vraisemblablement des combattants du Hamas ainsi que des civils tués par des bombardements de l’armée israélienne mais aussi par des roquettes tirées par le groupe islamiste lui-même et échouées dans l’enclave palestinienne et des civils complices du Hamas.
Ne pas oublier
« Nous les accompagnons sur le chemin de la guérison », dit Chen, « ces jeunes se reconstruisent, mais la route est longue, il ne faut pas croire qu’ils ont tourné la page, loin de là », poursuit-elle.
En dépit de l’ambiance chaleureuse qui règne sur le site et des rires qui jaillissent au milieu du campement, le souvenir du “samedi noir” reste très présent.
En témoignent les tatouages que Motty Gal et son équipe, venus spécialement de Tel-Aviv, réalisent gracieusement sur les festivaliers. « La plupart des tatouages que nous avons dessinés aujourd’hui sont liés au samedi noir », remarque Motty Gal, qui peaufine le symbole du Nova en forme de soleil sur le bras d’une survivante.
« Je tatoue sur mon pied les coordonnées géographiques (GPS) de l’endroit précis où j’ai pris la décision de courir vers ma voiture alors que des terroristes me tiraient dessus », raconte Ofek Livni, 27 ans.
« Je suis fier de la façon dont j’ai agi à cet instant, j’ai réussi à dépasser la peur et j’ai pu m’enfuir et sauver des vies », ajoute le jeune homme.
Les tatouages sont un véritable phénomène de société en Israël où jeunes et moins jeunes affichent fièrement leurs ornements corporels, notamment à Tel-Aviv, la métropole branchée du pays.
Dans son studio Jovino Dragon Tattoo, un des plus grands et des plus anciens de Tel-Aviv, Motty Gal observe une nette tendance pour des tatouages en lien avec les événements du 7 octobre et de la guerre qui en a découlé.
Beaucoup représentent l’étoile de David qui orne le drapeau israélien, ou la carte du pays, dit-il. D’autres fixent dans la chair le visage ou le nom d’un proche disparu. Une façon pour la population de faire corps avec ce qu’il s’est passé et d’honorer les victimes, selon lui.
Pour Shira Bitacho, rescapée du Nova qui arbore un tatouage avec un œil rempli de larmes au-dessus de la date fatidique du 7 octobre 2023, c’est aussi une façon de ne pas oublier.
« Je voulais que cela soit gravé sur mon corps comme c’est gravé dans ma mémoire », déclare la jeune femme de 21 ans.
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