Faut-il prendre en considération les « célébrations de victoire » du Hamas ?
Si le Hamas n'est pas marginalisé et se réarme en maintenant ses objectifs de destruction, la stratégie israélienne aura été un échec
David est le fondateur et le rédacteur en chef du Times of Israel. Il était auparavant rédacteur en chef du Jerusalem Post et du Jerusalem Report. Il est l’auteur de « Un peu trop près de Dieu : les frissons et la panique d’une vie en Israël » (2000) et « Nature morte avec les poseurs de bombes : Israël à l’ère du terrorisme » (2004).
La fin des hostilités entre Israël et le Hamas a pris effet mardi 26 août à 19h, au 50ème jour de l’opération Bordure protectrice, au milieu d’une salve de roquettes. Disons plutôt l’aspect ostensible de la fin des hostilités.
Deux Israéliens ont été tuée et un autre a été gravement blessé peu de temps avant le début de la trêve, et les alertes ont continué à retentir dans le sud encore après 19h, alors même que les partisans du Hamas célébraient leur «victoire» dans les rues de Gaza. Ce n’est donc pas déjà un bon départ.
Le Hamas a violé chaque accord de trêve au cours des cinquante derniers jours, et il n’y a aucune raison de penser que cela sera différent cette fois-ci.
Des sources anonymes de la délégation de négociation palestinienne – un forum curieux comprenant factions rivales du Fatah, du Hamas et du Jihad islamique – ont affirmé mardi soir que les dirigeants du Hamas à Gaza avaient insisté sur l’acceptation des mêmes termes égyptiens inconditionnels qu’ils avaient repoussé il y a plus d’un mois, et mis à l’écart Khaled Meshaal, qui avait déjà rejeté ces termes depuis le Qatar.
Certains disent que la vue de l’armée de l’air israélienne bombardant les immeubles d’habitation dans lesquels figureraient certains des centres de commandement du Hamas a poussé ce dernier à faire une pause… Le temps nous dira si l’assurance solennelle d’un gouvernement terroriste qui fait taire momentanément ses roquettes et ses mortiers est porteuse d’une vraie crédibilité.
De manière entièrement prévisible, le Hamas s’est immédiatement occupé à proclamer sa victoire au milieu des décombres. Il a tiré plus de 4 500 roquettes sur Israël. Il a tué 64 soldats et cinq civils. Il a incité plusieurs dizaines de compagnies aériennes à éviter Israël pendant deux jours le mois dernier.
Il a terrorisé le sud d’Israël tout au long des dernières semaines. Il a réussi à tuer un enfant de quatre ans, Daniel Tragerman, à l’intérieur de sa propre maison, dans le kibboutz Nahal Oz. Pour un organisme voué à la destruction d’Israël, ce sont des réalisations à célébrer.
En plaçant sa machine de guerre en plein coeur de la bande de Gaza, le Hamas a également condamné des centaines de milliers de personnes – les Gazaouis pour les intérêts desquels il prétend faussement avoir combattu – à l’itinérance, à la pauvreté extrême et à un avenir bien sombre. Mais pour le Hamas, ce sont aussi des réalisations. L’extrémisme fleurit au milieu de l’amertume. Les islamistes radicaux trouvent des recrues enthousiastes précisément là où il y a pénurie d’espoir.
Le Hamas veut aussi tirer son profit de toutes les destructions causées par Israël, que ce soient les maisons, les mosquées ou les tunnels. Et donc célébrer le fait que la réputation d’Israël ait été entachée dans de nombreux cercles internationaux, dans lesquels la nature cynique de la stratégie de guerre du Hamas n’est encore pas interprétée à sa juste mesure.
Le dernier mot sur ce conflit, cependant, est encore loin d’être écrit. Si ce round est terminé, alors la ligne de mire se déplace maintenant sur les détails des arrangements à long terme du cessez-le-feu. En clair, l’action militaire cède la place à la diplomatie.
Et si, en vertu d’une entente à long terme, le Hamas était en mesure de reproduire la stratégie du Hezbollah au Liban – pour garder le contrôle complet ou significatif de la bande de Gaza, se réarmer, et construire un mécanisme de mise à mort encore plus puissant – alors ses prétentions de victoire seraient justifiées, avec tout ce qu’elles ont d’effroyables.
C’est seulement si un mécanisme de long terme peut être mis en place, qui mettrait à mal la capacité du Hamas à se battre et à tuer que les dirigeants israéliens pourront alors affirmer que leur objectif – assurer le calme et une sécurité durable pour le peuple israélien – aura été atteint.
Israël n’a pris aucun engagement à respecter les revendications centrales du Hamas – levée du blocus sécuritaire, ouverture d’un port et d’un aéroport. Ce sont des concessions qui, en cas d’accord et en absence d’un mécanisme de surveillance efficace, donneraient les moyens au Hamas de se renforcer militairement.
Mais il est extrêmement difficile d’imaginer comment un tel mécanisme de contrôle efficace pourrait être réalisé. Et on peut simplement se demander si le Hamas, si on lui refuse ces concessions sur ces questions dans les prochaines semaines de négociations, s’abstiendra de reprendre ses attaques.
La popularité du Premier ministre Benjamin Netanyahu a piqué du nez au cours des dernières semaines alors que la guerre a continué et que les roquettes ont frappé encore le sud du pays.
Le soutien à Netanyahu se relèvera à nouveau si le temps et les conditions d’un cessez-le-feu à long terme font en sorte que le Hamas soit marginalisé et désarmé.
Beaucoup d’Israéliens, en effet, auraient réclamé une offensive terrestre beaucoup plus vaste à l’intérieur de Gaza, où le Hamas les attendait, avec la perte probable de dizaines, voire de centaines de soldats que cela aurait sans doute occasionné.
Mais si le Hamas n’est pas marginalisé et se montre capable de reconstruire ses tunnels, de remettre à jour ses arsenaux de roquettes, et de mettre en pratique de nouvelles stratégies vers son objectif de destruction d’Israël, la stratégie israélienne pour la gestion de ce conflit aura été un échec. Et la popularité du Premier ministre ne sera plus vraiment une préoccupation des Israéliens.