Haïm Biton: Le public devrait « avoir peur » de la croissance de la communauté haredite
Le député haredi, vice-ministre de l'Éducation, a affirmé que le taux de natalité élevé des ultra-orthodoxes a permis de déjouer les efforts visant à écarter la communauté
Le député haredi, Haïm Biton, vice-ministre de l’Éducation, a déclaré mercredi à une réunion de responsables de l’éducation que l’État d’Israël a exercé une discrimination à l’encontre de la communauté ultra-orthodoxe et a tenté de l’anéantir, mais que les taux de natalité élevés de la communauté ont rendu ces prétendus efforts insignifiants.
Biton, du parti ultra-orthodoxe, le Shas, et le ministre de l’Éducation, Yoav Kisch (Likud), ont été invités à assister à la conférence annuelle des directeurs des départements d’éducation des municipalités et des conseils de tout Israël, qui s’est tenue cette année dans la ville portuaire d’Eilat, dans le sud du pays.
Un grand nombre des quelque 450 personnes présentes à l’événement ont quitté la salle en signe de protestation contre les remarques de Biton.
S’adressant à la foule, Biton a affirmé que 40 % des élèves israéliens de première année étaient issus de la communauté ultra-orthodoxe, ou haredi, dont les membres représentent environ 13,5 % de la population israélienne totale, selon la dernière analyse statistique gouvernementale publiée le mois dernier. Elle a été compilée par l’Institut israélien de la démocratie (IDI) à partir de données du Bureau central des statistiques (CBS).
« Si vous ne le saviez pas, et que vous n’aviez pas assez peur, alors ayez encore plus peur », a-t-il déclaré, en assurant que des tentatives avaient été faites pour réduire le taux de natalité des ultra-orthodoxes.
Biton a déclaré que la nouvelle coalition de droite radicale et religieuse dirigée par le Premier ministre Benjamin Netanyahu « est venue pour éduquer la prochaine génération de l’État d’Israël, et je le dis ici en tant que haredi très fier », a déclaré Biton.
Les établissements d’enseignement haredi ne sont pas réglementés par le ministère de l’Éducation et n’enseignent pas toutes les matières du tronc commun, actuellement requises par l’État – notamment les mathématiques, les sciences et l’anglais.
La majorité des élèves ultra-orthodoxes – 74 % – étudient dans des écoles non-officielles mais reconnues, qui sont censées suivre la majorité du tronc commun laïc (bien que la plupart ne le fassent pas) en échange d’un financement de 75 %, 22,5 % étudient dans des écoles « exemptées » qui enseignent une plus petite partie du tronc commun et reçoivent un montant proportionnel de financement de l’État, tandis que seulement 3,5 % étudient dans des écoles haredim entièrement gérées par l’État qui enseignent le tronc commun complet, selon le rapport IDI-CBS.
Selon la loi en vigueur, les écoles doivent proposer des matières du tronc commun pour recevoir un financement complet de l’État, une mesure incitative destinée à garantir que les enfants des systèmes scolaires haredi obtiennent leur diplôme avec les compétences nécessaires. Mais Netanyahu a promis d’œuvrer pour le financement des écoles ultra-orthodoxes, qu’elles respectent ou non les normes de l’État et qu’elles enseignent ou non le programme de base.
Les accords de coalition entre le Likud et les partis ultra-orthodoxes, le Shas et Yahadout HaTorah prévoient d’élargir les lois existantes sur l’éducation afin de permettre aux établissements d’enseignement qui ne sont pas réglementés par le ministère de l’Éducation de recevoir des fonds des conseils locaux lorsqu’ils couvrent 55 % du contenu du programme d’enseignement de base de l’État, au lieu du seuil actuel de 75 % requis pour recevoir des fonds. Les dirigeants des conseils locaux se sont vivement opposés à cette mesure, estimant que l’accord obligerait les conseils locaux à consacrer des « centaines de millions de shekels » aux établissements d’enseignement informels haredi, qui n’enseignent pas la totalité des matières requises par l’État.
La question de l’éducation a été une pomme de discorde entre les communautés ultra-orthodoxes et le grand public israélien.
Les hommes de ces communautés ne sont pas non plus nombreux à servir dans l’armée israélienne et ne participent pas à la vie active en général, bien que cette situation ait changé au cours des dix dernières années. Selon le rapport IDI-CBS, le taux de chômage des hommes haredi était de 49 % et le taux de pauvreté des ultra-orthodoxes est deux fois plus élevé – 44 % – que celui de la population générale, près de la moitié d’entre eux tombant sous le seuil de pauvreté.
Le nouveau gouvernement Netanyahu a proposé un large éventail de mesures en faveur de la population haredi, notamment l’augmentation des allocations pour les étudiants des séminaires, ce qui pourrait dissuader les hommes haredim d’entrer dans la vie active.
Les filles ultra-orthodoxes, quant à elles, sont de plus en plus nombreuses à suivre le tronc commun de l’État – car elles sont davantage orientées vers le monde du travail. Près de 60 % d’entre elles ont passé leurs baccalauréats en 2019-2020, soit près du double de ce qu’elles étaient en 2008-2009, selon l’IDI.
Les données montrent qu’avec le taux de croissance actuel de 4 % de la population ultra-orthodoxe – le plus élevé de tous les groupes en Israël – et constituera 16 % de la population totale, à la fin de la décennie.
Les enfants haredim représentent près de 20 % de tous les élèves et plus d’un quart de tous les élèves parlant hébreu, selon le même rapport.
Biton a accusé « la conduite de l’État d’Israël à l’égard de la communauté ultra-orthodoxe et la façon dont elle a été considérée au cours des dernières décennies, en particulier au cours des dix dernières années, indiquant qu’il y avait une sorte de tendance ici qui soutenait que le monstre à plusieurs têtes appelé ‘secteur orthodoxe’ peut être supprimé, et que les taux de natalité peuvent être abaissés », a-t-il déclaré selon les médias israéliens.
« Les gens ont réalisé que la population ultra-orthodoxe est en pleine croissance et qu’au lieu de la tuer, on peut l’embrasser », a-t-il ajouté.
Une courte vidéo de la conférence partagée sur les réseaux sociaux montre de nombreuses personnes se lever et quitter la salle.
מהומה בכנס מנהלי אגפי חינוך ברשויות: השר במשרד החינוך חיים ביטון: "40 אחוז מתלמידי כיתות א הם חרדים. אם לא פחדתם מספיק תפחדו יותר, קיוויתם שתהיה פחות ילודה". ביטון ספג צעקות מהקהל שיצא מהאולם: "אנחנו לא מפחדים אנחנו רוצים שתלך לעבוד! בושה, פופוליסט."@GLZRadio pic.twitter.com/PQ5KYZ5ZZ0
— Yuval Miller || יובל מילר (@milleryuval_) February 8, 2023
Le Dr. Shaï Fruchtman, président de l’association des directeurs des départements d’éducation des autorités locales, a déclaré que l’organisation était composée de tous les secteurs de la population israélienne et « fournit des solutions pour chaque enfant du pays, quelle que soit sa religion ou son origine », a rapporté la Douzième chaîne. « Nous ne nous impliquons pas dans la politique », a-t-il affirmé.
L’association nationale des parents d’élèves a déclaré dans un communiqué qu’elle « attend du vice-ministre de l’Éducation, Haïm Biton, qu’il travaille à unir les gens et non à créer des divisions au sein de la population israélienne ».
« Le changement démographique dans l’État d’Israël nous oblige tous à agir constamment pour que tous les enfants israéliens bénéficient d’une éducation, de structures et de budgets excellents, sans distinction de religion, de race ou de sexe. Le souci d’une communauté ne doit pas se faire au détriment d’une autre communauté et des déclarations de ce genre ne contribuent pas à apaiser les clivages de la société ni à instaurer la confiance », a précisé l’association nationale des parents d’élèves.
Judah Ari Gross a contribué à cet article.