Herzog : un conflit interne sur la réforme de la justice « peut nous détruire tous »
Le président très inquiet de voir les réformes adoptées à la hâte par la Knesset sans consultation, affirme voir des "signes de bonne volonté" dans la recherche d'un compromis
Le président Isaac Herzog a exprimé mardi sa crainte de voir Israël confronté à un conflit interne dévastateur sur le caractère du pays, alors que la population s’insurge et proteste contre la refonte du système judiciaire prévue par le gouvernement.
« Les fondements démocratiques d’Israël, dont son système judiciaire, sont sacrés et nous devons les protéger », a déclaré Herzog, s’adressant à la conférence éducative Ashmoret à Tel Aviv.
« Une réforme radicale, exécutée rapidement sans négociation, ne peut que déchaîner l’opposition et susciter de profondes inquiétudes au sein de la population », a-t-il déclaré.
« Je vois les deux camps, étalés sur toute la ligne du front, prêts à une confrontation généralisée sur le caractère de l’État d’Israël, et je suis inquiet de voir que nous sommes au bord d’une crise interne qui pourrait nous détruire tous « , a déclaré Herzog, selon les informations de la Treizième chaîne.
En plus des manifestations de masse à Tel Aviv – où la mention de Herzog a suscité des huées pour son inaction – des milliers de manifestants se sont rendus devant la résidence du président à Jérusalem, demandant qu’il prenne une position claire pour défendre le système judiciaire.
Herzog a fait connaître sa position. Il a appelé le gouvernement à écouter les voix des diverses communautés. Il a fait des efforts de méditation, rencontrant la présidente de la Cour suprême Esther Hayut, le leader de l’opposition Yair Lapid, et le ministre de la Justice Yariv Levin.
Mais Herzog a, néanmoins, clairement indiqué que ses efforts pourraient échouer.
« Nous sommes confrontés à une épreuve fatidique. Nous devons viser des accords très généraux. Je vois des signes de bonne volonté », a déclaré Herzog mardi.
« Durant les règnes de la Maison de David et des Hasmonéens, des États juifs ont été établis en terre d’Israël, et par deux fois ils se sont effondrés avant d’atteindre leur 80e anniversaire. Permettez-moi de souligner avec insistance : je ne suis pas un prophète de malheur, je ne l’ai jamais été et ne le serai jamais. Je crois fermement à la résilience de l’État d’Israël et à la force des gens merveilleux qui vivent ici », a déclaré Herzog.
Mais a-t-il ajouté, les Israéliens doivent « prendre leurs responsabilités et protéger ce que nous avons construit ici ».
Le ministre de l’Éducation, Yoav Kisch, et la présidente du syndicat des enseignants israéliens, Yaffa Ben David, qui étaient présents, ont souhaité bonne chance au président dans ses efforts pour combler les fossés sur cette question dans leurs remarques respectives lors de la conférence.
Telles qu’elles ont été présentées par le ministre de la Justice, Yariv Levin, les propositions de la coalition limiteraient considérablement la capacité de la Cour suprême à invalider des lois et des décisions gouvernementales, grâce à une « clause dérogatoire » qui autoriserait la Knesset à réadopter des lois invalidées à la seule majorité de 61 voix ; elles donneraient au gouvernement un contrôle total sur la sélection des juges ; elles empêcheraient la Cour d’utiliser le principe du « caractère raisonnable » pour juger les lois et les décisions gouvernementales ; et elles permettraient aux ministres de nommer leurs propres conseillers juridiques, au lieu de faire appel à des conseillers opérant sous l’égide du ministère de la Justice.
Malgré les critiques véhémentes de la population à l’égard de ces projets, la Douzième chaîne a rapporté lundi que Levin est déterminé à faire passer ses projets de réforme et qu’il n’avait pas l’intention de faire de compromis. Selon la chaîne, Levin aurait donné des signes qu’il était prêt à dialoguer uniquement dans, le but de calmer les esprits et de gagner du temps pour préparer les législations.
Dans son discours, Herzog a partagé sa vision du 80e anniversaire de l’État d’Israël en 2028, souhaitant y voir la Résidence du Président servant « d’espace protégé pour la résolution des différends et la réconciliation » en temps de crise.
Il a également dévoilé un projet visant à créer un centre éducatif destiné à favoriser la coexistence, ainsi qu’un espace pour des discussions confidentielles sur des questions essentielles. Il n’a pas donné de détails sur la manière dont le programme sera mis en œuvre, mais a déclaré que des mesures actives seront prises pour échanger des opinions et traiter les différends.
Tal Schneider a contribué à cet article