Israël accuse Elon Musk d’alimenter la rhétorique antisémite sur Twitter
"The Jews" est en TopTweet après que le milliardaire a déclaré que George Soros "hait l'humanité" ; le ministère des Affaires étrangères reproche à l'entreprise de ne pas réagir
Le ministère israélien des Affaires étrangères a accusé mardi le propriétaire de Twitter, Elon Musk, d’alimenter la rhétorique antisémite sur sa plateforme de réseaux sociaux à la suite d’une remarque qu’il a faite à l’encontre du philanthrope juif George Soros.
Musk a tweeté lundi que Soros « hait l’humanité » et a écrit que le milliardaire et méga-donateur progressiste « me rappelle Magneto », un méchant de bande dessinée qui figure dans la série X-Men de Marvel.
« L’expression ‘The Jews’ a fait un bond aujourd’hui dans la liste des sujets en vogue sur Twitter à la suite d’un tweet à connotation antisémite de nul autre que le propriétaire et PDG du réseau social, Elon Musk », a écrit le ministère des Affaires étrangères sur son compte officiel Twitter.
Il a ajouté que le tweet de Musk « a immédiatement donné lieu à des théories du complot antisémites sur Twitter ».
En outre, le directeur de la Diplomatie numérique du ministère, David Saranga, a tweeté une capture d’écran des chiffres de tendance de Twitter montrant que, mardi matin, il y avait 27 900 tweets récents utilisant l’expression « The Jews ».
« Les tweets étaient remplis de théories du complot antisémites et de discours de haine visant les Juifs du monde entier », a écrit Saranga. « Malheureusement, Twitter ne fait rien pour résoudre ce problème. »
Soros reminds me of Magneto
— Elon Musk (@elonmusk) May 16, 2023
Saranga a ensuite cité Martin Niemöller, théologien allemand qui s’est opposé au régime nazi et a été emprisonné dans des camps de concentration.
« Ils sont d’abord venus chercher les socialistes, et je n’ai rien dit – parce que je n’étais pas socialiste. Ensuite, ils sont venus pour les syndicalistes, et je n’ai rien dit – parce que je n’étais pas syndicaliste. Puis ils sont venus pour les Juifs, et je n’ai rien dit – parce que je n’étais pas juif. Puis ils sont venus pour moi – et il n’y avait plus personne pour parler en mon nom », a déclaré Saranga.
« Les mots de Niemöller servent de réquisitoire contre la passivité et l’indifférence pendant la Shoah », a écrit Saranga, notant que la citation est inscrite sur le mur du Musée de la Shoah à Washington.
“The Jews” is trending right now on #Twitter and it’s filled with AntiSemitic conspiracies and hate speech targeting Jews around the world.
Unfortunately Twitter does nothing to address this problem.
It reminds me of Niemöller's words which are prominently featured on a wall of… pic.twitter.com/igT3RsrViq
— David Saranga (@DavidSaranga) May 16, 2023
Les attaques contre Soros interviennent alors que Twitter a été critiqué pour sa politique laxiste en matière de discours haineux dans les mois qui ont suivi le rachat de la plateforme par Musk, l’une des personnes les plus riches du monde, l’année dernière. Soros, milliardaire et méga-donateur progressiste, est au centre de nombreuses théories du complot antisémites.
Comme Soros, le personnage de Magneto est un survivant de la Shoah. Brian Krassenstein, un journaliste juif libéral, a noté ce parallèle dans une réponse au tweet de Musk, écrivant que « les expériences de Magneto pendant la Shoah en tant que survivant ont façonné sa perspective ainsi que sa profondeur et son empathie », et que Soros « est attaqué sans arrêt pour ses bonnes intentions que certains Américains pensent être mauvaises simplement parce qu’ils ne sont pas d’accord avec [ses] affiliations politiques ».
« Vous supposez qu’il s’agit de bonnes intentions. Ce n’est pas le cas. Il veut éroder le tissu même de la civilisation. Soros déteste l’humanité », a répondu Musk.
Jonathan Greenblatt, directeur-général de l’Anti-Defamation League (ADL), a qualifié la remarque de Musk de « dangereuse » et d’encourageante pour les extrémistes antisémites.
« Soros est souvent présenté par l’extrême-droite, en utilisant des tropes antisémites, comme la source des problèmes du monde », a écrit Greenblatt sut Twitter. « Voir Elon Musk, quelle que soit son intention, alimenter ce segment – en le comparant à un super-vilain juif, en affirmant que Soros ‘hait l’humanité’ – n’est pas seulement affligeant, c’est dangereux : cela va enhardir les extrémistes qui élaborent déjà des conspirations anti-juives et ont essayé d’attaquer Soros et les communautés juives en conséquence. »
Alors que Musk s’est insurgé contre les politiques progressistes, ce qui a motivé son attaque contre Soros n’est pas clair. Cependant, le jour où les tweets ont été publiés, le bureau d’investissement de la famille Soros a encaissé son investissement dans Tesla, la société de voitures électriques de Musk.
Soros, âgé de 92 ans, est depuis longtemps la cible des conservateurs qui soutiennent des causes et des hommes politiques progressistes aux États-Unis et dans le monde entier. Depuis une dizaine d’années, certaines des attaques ont fait écho à des théories du complot antisémites, dépeignant Soros comme un sataniste, l’accusant de chercher à contrôler le monde et l’accusant à tort d’avoir aidé à perpétrer la Shoah plutôt que d’y avoir survécu lorsqu’il était enfant.
Ces théories du complot se sont accélérées après l’élection de Donald Trump en 2016, qui a fait de Soros le point central de sa dernière publicité de campagne cette année-là et qui n’a cessé de dépeindre Soros comme un méchant alors qu’il se présente à l’élection de 2024.
Musk, qui se définit comme un absolutiste de la liberté d’expression, a rétabli les comptes Twitter d’extrémistes de droite qui avaient été précédemment interdits, une décision qui a alarmé les groupes juifs de lutte contre la bigoterie. Il a suspendu à nouveau certains de ces extrémistes après qu’ils eurent recommencé à publier des tweets à caractère haineux. Les extrémistes l’ont encensé et il leur a rendu la pareille, encourageant certaines de leurs théories.
En décembre, Musk a dissous un groupe consultatif chargé de la « confiance et de la sécurité » sur Twitter. En mars, une étude réalisée par le groupe de réflexion Institute for Strategic Dialogue a révélé que l’antisémitisme avait plus que doublé sur la plateforme au cours des mois qui ont suivi la prise en main de celle-ci par Musk.
La Jewish Telegraphic Agency a contribué à cet article.