La préparation de l’opération de sauvetage des Juifs yéménites a duré 2 ans
Manny Dahari a aidé à orchestrer le transport aérien de sa famille vers Israël depuis les Etats-Unis; «Je suis tellement soulagé maintenant. Je sais qu'ils sont en sécurité », a-t-il dit

Manny Dahari a travaillé depuis deux ans en coopération avec le Département d’Etat américain et l’Agence Juive pour exfiltrer sa famille du Yémen – et cette semaine, il a enfin réussi.
La semaine dernière, 17 membres de la communauté juive yéménite ont été acheminés vers Israël depuis leur pays ravagé par la guerre civile. Quelques jours après, deux autres Juifs yéménites sont également arrivés en Israël.
Beaucoup de détails concernant leur évasion sont encore tenus secrets, a déclaré Dahari au Times of Israel par téléphone. Selon des sources saoudiennes, cependant, les rebelles Houthis qui contrôlaient la région où vivait sa famille ont été soudoyés pour permettre le passage sans danger des 19 Juifs.
Les 19 Juifs ont été transportés en avion à Amman, en Jordanie, puis en Israël, depuis la ville de Sanaa contrôlée par les Houthis et depuis le village voisin Dār ar Raydah dans l’ouest du Yémen, selon le journal Asharq Al-Awsat basé à Londres.
« J’étais au courant du projet depuis le début, mais je n’étais pas sûr du moment où il allait être mis en œuvre », a déclaré Dahari.

Dahari a travaillé en étroite collaboration avec l’Agence juive pour aider à orchestrer le projet. Aujourd’hui, a indiqué l’étudiant de 22 ans à la Yeshiva University de New York, en marketing et en sciences politiques.
« Durant le dernier mois, nous avons peut-être essayé quatre fois. Trois fois nous avons échoué, et cette fois c’est finalement arrivé », a-t-il dit. « Je suis tellement soulagé maintenant. Je sais qu’ils sont en sécurité », a déclaré Dahari.
Apres l’évasion, au moins deux Yéménites – un musulman et un juif – ont été arrêtés par les autorités locales pour leur implication présumée dans l’opération.

Les accusations portées contre les deux hommes ont apparemment moins à voir avec l’évasion des 19 Juifs qu’avec un rouleau de la Torah vieux de 600 ans qui a été emporté avec eux, et dont les dirigeants rebelles Houthis revendiquent le fait qu’il fasse partie de leur patrimoine.
Lorsqu’ont été publiées les informations relatives à ces arrestations au sujet du rouleau de Torah yéménite, Dahari s’est exprimé sur Facebook.
« [Les rebelles] affirment que le rouleau de Torah appartient au gouvernement yéménite et que ma famille n’avait pas le droit de l’apporter avec eux en Israël. Cette déclaration est absolument fausse et je les exhorte à libérer les détenus immédiatement », a-t-il dit.
« Ce rouleau de Torah est dans ma famille depuis des centaines d’années et nous ne pourrons jamais nous en séparer que ce soit pour quelque chose ou pour quelqu’un, » a écrit Dahari.
Sauver les enfants
Il y a presque dix ans, quand il avait 13 ans, Manny Dahari déménageait aux États-Unis depuis le Yémen afin d’échapper à l’incertitude et à la violence qui y règnent. Un de ses frères a également déménagé aux États-Unis, mais ils ne vivent pas ensemble, a précisé Dahari.
Quelques années plus tard, en 2009, deux membres de la communauté juive ont été tués lors d’attaques antisémites, ce qui a incité la famille à faire sortir leurs autres enfants du pays, a déclaré le frère de Dahari, Naftali, plus tôt cette année.

La famille a commencé à faire sortir les enfants hors du Yémen vers Israël à tour de rôle, a dit Naftali.
Avant que ses parents ne déménagent en Israël, quand il était l’un des rares soldats de Tsahal nés dans un pays arabe, Naftali a parlé de son expérience au Times of Israel.
Naftali sert aujourd’hui dans la 188e brigade blindée de l’armée israélienne et devrait terminer son service obligatoire dans un peu plus d’un an.
En octobre, quatre de ses frères et sœurs l’ont rejoint en Israël et tous vivent dans un appartement situé dans un centre d’intégration à Beer Sheva, a raconté Naftali.
« Ils vivent avec moi maintenant. C’est amusant. Je ne les avais pas vus depuis longtemps. Maintenant, c’est très excitant », a déclaré Naftali.
Le jeune homme de 19 ans, qui a seulement appris l’hébreu et terminé ses études secondaires depuis deux ans, est soudain devenu un guide pour ses frères et sœurs – lui, le soldat de Tsahal – et il les aide à s’intégrer dans la société.
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Quand je suis arrivé ici, je n’avais personne pour m’aider. Il n’y a rien de mieux qu’un membre de votre famille pour vous aider », a-t-il dit à propos d’aider ses frères et sœurs, avant que leurs parents ne les rejoignent.
Maintenant, il semble qu’il devra faire de même pour sa mère et son père.

Cette semaine, quatre ans après avoir dit au revoir à ses parents, Naftali a découvert que sa famille était venue le rejoindre en Israël, alors qu’il était en visite aux Etats-Unis.
Dahari s’était rendu aux États-Unis pour rendre visite à ses deux frères quand il a appris l’opération secrète organisée par son frère.
« Ma mère m’a appelé de l’aéroport en Israël et a dit : ‘Nous sommes arrivés en Israël, sois heureux. Tout va bien, vous ne devez pas vous inquiéter, vous n’êtes plus seuls’, a déclaré mardi Dahari au site de nouvelles Walla.
Se sauver
Naftali, qui est relativement petit mais costaud, parle doucement, avec juste un léger accent révélant son origine arabe.
Naftali et Manny ont tous deux insisté sur la nécessité de quitter le Yémen, ou règne à présent une brutale guerre civile, rendant le pays, qui n’avait de toute manière jamais été entièrement sûr pour les Juifs, encore plus dangereux.
« Après le début de la guerre civile, ils ont tué deux Juifs au Yémen. Ils ont fermé les écoles. Ils savaient qui nous étions. Ils nous criaient dessus, nous jetaient des pierres », a dit Naftali.
« Ici, vous êtes libre. Vous n’avez pas peur. Si vous êtes juif, ici vous vous sentez comme si c’était vraiment votre pays », a-t-il continué.
La devise de l’insurrection chiite, qui a émergé à Saada en 2004, est « Mort à l’Amérique, mort à Israël, maudits soient les Juifs, victoire à l’islam. »
‘Ici, vous êtes libre. Vous n’avez pas peur’
Cependant, les Houthis en tant que groupe ont plus ou moins laissé tranquille la population juive à Sanaa et Ryad, selon les dires d’un résident local en 2015.
« Les Houthis ne parlent pas aux Juifs, mais il y existe encore une certaine crainte, » a admis ce résident. « Nous ne savons pas qui est Houthi et qui ne l’est pas, qui est bon et qui est mauvais … Nous ne savons pas ce que les Arabes envisagent. »
Dans une interview de 2012 pour un site internet local, un résident juif de Sanaa, Haboob Salem Mousa, a également décrit les difficultés de la vie au Yémen.
« Les intimidations, l’inquiétude et le chaos étaient monnaie courante. Nous ne nous sentions pas en sécurité à la maison ou dans la rue. Pour éviter les attaques, nous cachions nos « peyote » sous une casquette de telle sorte que nous ne soyons pas reconnus comme juifs », a déclaré Mousa, se référant aux longues papillotes portées par certains juifs religieux.
Malgré les menaces et la violence, près de 50 Juifs ont choisi de rester au Yémen, selon l’Agence juive, situation que Manny Dahari n’arrive pas à comprendre.
« Les gens sont vraiment attachés à leur demeure, » a-t-il dit. « Mais ils sont des citoyens de seconde classe, ils sont traités horriblement. Je pense qu’ils vont le regretter s’il ne quittent pas le pays ».
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