La prolongation du service militaire entraîne des appels à la fin des exemptions des haredim
Les élus de la coalition se joignent à l'opposition et demandent à la communauté haredi de partager le fardeau du service militaire ; Gantz exhorte les Arabes à s'enrôler eux aussi
Alors que Tsahal se prépare à une longue guerre dans la bande de Gaza, un plan visant à prolonger la durée du service militaire pour les conscrits et les réservistes a suscité jeudi de vives réactions de la part des législateurs de tout l’éventail politique, nombre d’entre eux renouvelant leurs appels à mettre fin aux exemptions accordées de facto à la communauté ultra-orthodoxe afin de remédier au manque d’effectifs.
« La population ultra-orthodoxe est précieuse et appréciée et contribue beaucoup à l’État d’Israël et il est aujourd’hui essentiel qu’elle prenne également une part plus importante dans les tâches de défense et de sécurité », a tweeté le ministre des Finances, Bezalel Smotrich.
Smotrich, dont la base du parti HaTzionout HaDatit est constituée majoritairement de nationalistes pratiquants, a déclaré que cette communauté « est la preuve qu’il est possible de combiner étude et observance de la Torah… avec un service militaire au front ».
Saluant ses partenaires de coalition des partis Shas et Yahadout HaTorah, Smotrich a appelé à augmenter le taux d’enrôlement des ultra-orthodoxes par « le dialogue et la discussion » plutôt que par la coercition.
Les ultra-orthodoxes ont longtemps bénéficié d’exemptions du service militaire, car ils considèrent toute insertion dans le monde laïc comme une menace à leur identité religieuse et à la continuité de leur communauté.
Les députés ultra-orthodoxes réclament depuis longtemps une législation qui codifierait formellement l’exemption du service militaire de leurs électeurs, une question qui a été la source de nombreuses controverses au sein de la société au cours des vingt dernières années.
« L’idée que certains jeunes verront leur service prolongé a trois ans, alors que d’autres ne serviront pas un seul jour, ni dans l’armée ni dans le civil, est inadmissible », a écrit sur Facebook le ministre Chili Tropper (HaMahane HaMamlahti).
« La vérité doit être dite : ceux qui sont tombés ne viennent pas de tous les secteurs », a-t-il écrit. « Il est vrai que de nombreux membres du secteur ultra-orthodoxe se portent volontaires, étudient, prient à la mémoire des soldats tombés au combat, rendent visite aux blessés… mais ils ne partagent pas le fardeau du service. »
Depuis que la guerre a éclaté le 7 octobre, Tsahal a rappelé un total de 287 000 réservistes, ce qui constitue la mobilisation la plus important de l’histoire d’Israël. Nombre d’entre eux ont déjà été déchargés du service, mais certains d’entre eux pourraient être rappelés, car les combats se poursuivent à Gaza et que la menace d’une guerre menace à la frontière nord du pays plane.
Les responsables militaires se sont félicités de l’augmentation du nombre d’ultra-orthodoxes qui se sont portés volontaires pour le service militaire après le massacre du 7 octobre, même si leur nombre est resté relativement faible et que la plupart des dirigeants ou institutions ultra-orthodoxes n’ont pas modifié leur approche en matière de refus du service militaire.
Le parti HaMahane HaMamlahti a rejoint le gouvernement pour avoir un rôle dans la gestion de la guerre, mais s’est bien gardé de participer aux autres sujets de la coalition.
Le ministre de la Diaspora, Amichai Chikli (Likud), du parti du Premier ministre Benjamin Netanyahu, a déclaré que le statu quo ante « ne peut pas continuer. »
Le député Moshe Saada (Likud) a appelé les Israéliens à élaborer un nouveau contrat social dans lequel « davantage de secteurs de la population feront leur part » en matière de service militaire.
« Le nouveau plan de Tsahal nous révèle de manière claire par le contraste que le fardeau de la sécurité repose sur les épaules d’un petit pourcentage de la population », a-t-il tweeté.
La période de service obligatoire pour les réservistes de Tsahal a déjà été temporairement prolongée par la Knesset, et l’armée a envoyé un appel anticipé à quelque 1 300 Israéliens actuellement inscrits dans des formations militaires, des programmes de service communautaire volontaire et des yeshivot affiliées au mouvement nationaliste-religieux, ce qui a suscité de nombreuses protestations et des plaintes selon lesquelles le fardeau du service militaire était appliqué de manière inégale.
La députée Tally Gotliv (Likud) a demandé la suppression de la proposition d’extension du service de réserve, soulignant qu’il fallait « comprendre que tout le monde est égal face au fardeau ».
Les dirigeants ultra-orthodoxes ne se sont pas joints au brouhaha, même si Moshe Gafni (Yahadout HaTorah) a rejeté jeudi les remarques faites la veille par le chef du parti, Yitzhak Goldknopf, qui cherchait à éloigner avec désinvolture les politiciens haredim de tout ce qui avait trait à la guerre.
« Nous avons tous une part de responsabilité, même aujourd’hui », a affirmé Gafni lors d’une cérémonie de pose de la première pierre d’une école dans la ville de Karmiel, dans le nord du pays. « Quiconque dit que la situation est bonne – la situation n’est pas bonne ! À l’instar de mes collègues au sein du gouvernement, je porte moi aussi une part de responsabilité ».
Répondant à la proposition de Tsahal jeudi, le chef de l’opposition Yair Lapid a regretté que l’extension du service soit proposée par le gouvernement « en pleine guerre, alors que des combattants meurent tous les jours [et] que les réservistes sont en train de s’effondrer financièrement. »
« Aucun haredi ne s’enrôlera, aucun haredi ne risquera sa vie, aucun haredi ne souffrira financièrement », a-t-il accusé. Un avis partagé par le député de l’opposition et chef du parti Yisrael Beytenu, Avigdor Liberman, qui a déclaré que la proposition était « discriminatoire et nuisait à l’unité du peuple. »
« Les soldats réguliers et de réserve serviront plus que d’autres qui ne servent pas aujourd’hui et continueront à ne pas servir », a-t-il affirmé, appelant les anciens chefs d’état-major de Tsahal et ministres du parti HaMahane HaMamlahti Gantz et Gadi Eisenkot à démissionner si le projet de loi venait à être approuvé.
« Comment des députés du gouvernement qui n’ont aucune idée de ce que c’est que de servir peuvent-ils voter sur la prolongation du service dans Tsahal ? » a demandé le député de Elazar Stern (Yesh Atid), l’ancien chef de la direction des effectifs de Tsahal.
Il parlait probablement des ministres appartenant au parti ultra-orthodoxe Yahadout HaTorah et du ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben Gvir, qui a été recalé du service obligatoire à Tsahal en raison de son militantisme en faveur de l’extrême-droite dans sa jeunesse.
Malgré les critiques généralisées formulées à l’encontre des ultra-orthodoxes, le ministre du Patrimoine, Amichai Eliyahu (Otzma Yehudit), s’est réjoui de l’augmentation du nombre d’enrôlements de haredim depuis le 7 octobre, qu’il a qualifiée de « mobilisation sans précédent ».
« La tentative de refaire leur éducation par la force ne conduira qu’à la haine et à l’aliénation », a-t-il tweeté.
La guerre a éclaté entre Israël et le Hamas lors du massacre perpétré par le groupe terroriste le 7 octobre, au cours duquel 3 000 terroristes ont déferlé sur la frontière par voie terrestre, aérienne et maritime, tuant près de 1 200 personnes et prenant 253 otages de tous âges – pour la plupart des civils – en se livrant à des exactions sauvages, et notamment à des actes de violence sexuelle de grande ampleur.
Déterminé à détruire le groupe terroriste et rapatrier les otages, Israël a lancé une campagne militaire à grande échelle dans la bande de Gaza.
L’équipe du Times of Israël a contribué à cet article.