La série TV, ‘les Bnot Brak’, explore les multiples différences chez les haredim
La nouvelle série de télé-réalité a débuté dimanche et met en lumière la vie de 5 femmes ultra-orthodoxes qui n’hésitent pas à faire usage des réseaux sociaux
La plupart des membres de la famille de Simi Hershkop ignorent qu’elle joue dans une nouvelle série télévisée israélienne.
Ni son père, ni ses onze frères et sœurs n’utilisent les réseaux sociaux ou n’ont accès à Internet. Et en raison de leurs relations tendues, elle ne leur a pas parlé des caméras qui la suivent depuis des mois dans le cadre d’un nouveau docu-réalité de HOT sur les femmes harediyot, ou ultra-othodoxes.
« Ils n’ont pas vraiment d’accès à Internet. Peut-être que certains d’entre eux le savent, d’autres non, mais nous n’en avons pas parlé », a déclaré Hershkop, âgée de 27 ans, au Times of Israel la semaine dernière.
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« Je pense que la plupart d’entre eux ne le savent probablement pas ; ils ne font pas partie de ce monde. Et nous ne sommes pas tellement en contact… Ils ont eu du mal avec la voie que j’ai choisie et je respecte totalement cela. »
Son choix de vie la maintient fermement à l’intérieur du monde haredi. En effet, elle porte une perruque et des vêtements modestes, son fils va dans une école ultra-orthodoxe et, bien sûr, elle observe le Shabbat et mange strictement casher.
Mais Hershkop – l’une des cinq femmes qui apparaît dans « Bnot Brak », une nouvelle série HOT dont la première est diffusée dimanche soir – n’est pas seulement l’heureuse propriétaire d’un smartphone, elle gère également le compte Instagram DosCelebs, qui promeut le croisement de la religion et de la culture pop pour le plus grand bonheur de ses 70 000 abonnés.
Yael Silverman, perruquière, Esti Socolovski, maquilleuse, Ofra Shimoni, femme d’affaires et magnat des réseaux sociaux, et Nana Halperin, membre de la riche et célèbre famille Halperin, qui dirigeait sa propre ligne d’accessoires, figurent aux côtés d’Hershkop dans l’émission.
Les cinq femmes qui jouent dans « Bnot Brak » – un jeu de mots féminisé sur le nom de Bnei Brak, la plus grande ville haredit d’Israël – mettent en lumière un nouveau type de femme ultra-orthodoxe : une femme qui ne se cache pas de posséder un smartphone, qui a une présence active sur les réseaux sociaux, qui s’habille à la mode et qui n’a pas peur de dire ce qu’elle pense.
Malgré tout ce qu’elles ont en commun, ces cinq femmes restent sensiblement différentes dans leurs perspectives de vie, leurs origines et leurs points de vue. Shimoni considère le temps qu’elle passe sur les réseaux sociaux comme un mal nécessaire pour faire la promotion de son entreprise, Halperin estime qu’il s’agit d’un outil permettant de mettre en valeur la beauté de la religion et Socolovski l’utilise pour mettre en avant sa carrière et sa vie personnelle tout en développant sa marque.
« Nous sommes très, très différentes les unes des autres. Le casting est très diversifié, personne ne se ressemble en aucune façon », a déclaré Silverman, qui est âgée de 27 ans, au Times of Israel lors d’une interview téléphonique la semaine dernière.
« Je suis heureuse car le grand public ne connaît pas vraiment ces différentes facettes de la communauté haredit. »
Silverman, l’une des membres les plus franches de la distribution, a grandi et vit toujours à Bnei Brak, où elle fabrique et vend des perruques, traditionnellement portée par les femmes ultra-orthodoxes mariées.
« De l’extérieur, la communauté haredit semble très homogène – tout le monde est pareil, s’habille de la même façon, pense de la même façon », dit-elle.
« Je me réjouis donc de la création de cette série qui montre que ce n’est pas du tout le cas. »
Alors que la majorité des juifs ultra-orthodoxes évitent l’utilisation des smartphones au profit des « téléphones casher » strictement limités – qui ne peuvent être utilisés que pour les appels téléphoniques – un nombre croissant d’entre eux possèdent et utilisent des appareils connectés à Internet, au grand dam des grands rabbins ultra-orthodoxes.
Hershkop a déclaré qu’elle avait dû attendre de quitter la maison de ses parents pour acquérir « l’objet tant interdit ».
« Jusqu’à ce que je me marie, je n’avais pas de smartphone. Mais au moment des sheva brachot [la semaine de célébrations qui suit un mariage juif], j’avais déjà un smartphone », s’est-elle souvenue, précisant qu’elle conservait également un téléphone « casher » pour un usage public et qu’au départ, elle n’utilisait son smartphone qu’en privé.
Alors que les femmes de « Bnot Brak » se définissent toutes comme harediyot, la critique la plus courante qu’elles reçoivent est qu’elles ne devraient pas être autorisées à se considérer comme faisant partie du monde ultra-orthodoxe.
« Les gens ont une idée très précise de ce qu’est une personne haredit, et puis je parle d’une manière qui ne correspond pas à ce modèle ; ils se permettent donc de me dire que je ne suis pas haredit », a déclaré Silverman.
« Je suis régulièrement confrontée à cette réaction, mais cela ne me dérange pas. Aujourd’hui, ce qui est important pour moi, c’est ce que je pense de moi-même. »
Silverman admet qu’elle est plus moderne que de nombreux Juifs ultra-orthodoxes, mais qu’elle fait tout de même partie de la communauté haredit.
« Je me démarque un peu il est vrai, mais il y a d’autres personnes comme moi, et pas que quelques-unes. »
Hershkop dit qu’elle reçoit régulièrement des critiques similaires.
« Personne d’autre ne peut décider de qui je suis ; je suis la seule à pouvoir en décider », a-t-elle déclaré.
« Je vis dans un foyer haredi. Je fais peut-être partie des Juifs ultra-orthodoxes plus modernes, mais je ne rentre dans aucune case. Je pense que je suis une bonne Juive et que j’essaie de montrer de bonnes choses, et personne d’autre n’a le droit de me définir. »
Faire découvrir au grand public les histoires de femmes qui ne font pas partie du courant dominant de la culture israélienne est une évolution. Mais « Bnot Brak » reste une émission de télé-réalité très classique, avec des conversations et des interactions manifestement mises en scène et un montage qui va de pair.
Et si Halperin est un personnage intéressant, sa vie conviendrait peut-être mieux à une émission sur la façon dont vivent les 1 % les plus riches d’Israël. Avec une maison à Bnei Brak – l’une des villes les plus pauvres d’Israël – qui comprend à la fois une piscine privée et son propre mikveh, ou bain rituel (ainsi qu’une résidence secondaire de luxe à Jérusalem), elle n’est guère représentative de la femme haredit moyenne.
Parmi les cinq femmes, Halperin est peut-être celle qui a les opinions ultra-orthodoxes les plus strictes, même si elle accepte certains éléments du monde extérieur.
« Toute ma vision du monde est très haredit. Je suis intérieurement très extrême ; peut-être qu’extérieurement je le suis moins », a-t-elle déclaré dans l’émission.
Dans une interview accordée à la Douzième chaîne, Halperin a abordé l’une des questions les plus controversées culturellement et politiquement au sein de la communauté haredit, à savoir l’enseignement des « matières fondamentales » telles que les mathématiques, l’anglais, les sciences et la littérature dans les écoles.
« Je suis contre l’enseignement des matières dites ‘fondamentales' », a déclaré Halperin, dont les cinq fils fréquentent ou ont fréquenté des institutions où ils étudient uniquement le Talmud et d’autres matières pieuses. Si les écoles de filles ultra-orthodoxes offrent une éducation un peu plus étendue, les institutions pour garçons n’enseignent généralement aucune matière profane.
Silverman, qui a mis sa fille aînée dans une école publique haredit (un concept relativement nouveau), est diamétralement opposée à une telle position.
« Cela me semble illogique. Je pense que les garçons méritent de recevoir une éducation complète », a déclaré Silverman au Times of Israel, notant que son mari a grandi sans étudier aucune matière laïque, et qu’une fois entré dans le monde du travail, « il a dû commencer à apprendre à utiliser un ordinateur entre autres choses que d’autres personnes apprennent en CM1 ».
L’opposition à l’enseignement de ces matières, a déclaré Silverman, provient de ceux qui veulent que les hommes haredim n’étudient que la Torah à plein temps, même à l’âge adulte.
« Mais on se doit de donner à un enfant la possibilité de choisir s’il veut apprendre la Torah ou étudier des matières académiques. »
En fin de compte, ces femmes disent vouloir montrer au monde que tous les haredim ne sont pas les mêmes – et qu’à bien des égards, ils ont beaucoup en commun avec les Israéliens laïcs.
« La communauté haredit n’est pas si différente du public laïc », a déclaré Hershkop.
« Nous avons peut-être l’air différent à l’extérieur, mais à l’intérieur, nous sommes tous des humains, et nous devrions arrêter de nous juger les uns les autres. »
Hershkop a déclaré que, bien qu’il existe des haredim extrémistes, « nous ne sommes pas tous extrêmes et ne mettons pas le feu aux poubelles [lors des manifestations anti-gouvernementales] ».
« Il y a aussi le côté que les gens ne connaissent pas. Il est temps de voir le beau côté de la religion, et nous sommes là pour le montrer. »
Silverman a déclaré qu’elle espère que « Bnot Brak » va « réfuter beaucoup de stigmates sur les haredim, parce qu’il n’y a pas vraiment eu de série télévisée visant à montrer la vie quotidienne des haredim jusqu’à aujourd’hui », a-t-elle dit.
« Jusqu’à présent, seules les actualités et les manifestations sont relatées dans les médias ; en conséquence, les gens n’ont qu’une vision très limitée des haredim. »
Avec cette nouvelle émission, dit-elle, « je suis très heureuse que nous ayons l’occasion de montrer que nous sommes 1,5 million de personnes, pleines de diversité et de différences ».
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