Le chef de l’ADL évoque l’antisémitisme dans l’émission ‘The Breakfast Club’
Jonathan Greenblatt s'est entretenu avec Charlamagne Tha God et DJ Envy lors de cette émission de radio populaire sur la relation entre les communautés juive et afro-américaine
New York Jewish Week — Le directeur-général de l’Anti-Defamation League (ADL) Jonathan Greenblatt a été l’un des invités de l’émission de radio très populaire « The Breakfast Club », qui est diffusée depuis New York. Il a évoqué sur les ondes la recrudescence récente de l’antisémitisme et la nécessité de réparer les relations entre les communautés afro-américaine et juive.
« Je pense qu’on peut échanger à la place de s’exclure », a dit Greenblatt, expliquant aux animateurs de l’émission, Charlamagne Tha God et DJ Envy, comment lui-même choisissait de répondre aux antisémites. « Je ne crois pas en la cancel culture, je crois en la counsel culture [culture du conseil] ».
L’heure passée au micro par Greenblatt a eu pour objectif « d’ouvrir le dialogue avec différentes communautés et d’apprendre les uns des autres, ce qui est le meilleur moyen d’empêcher la haine de se propager », selon un porte-parole de l’ADL.
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The Breakfast Club, émission diffusée par la station WWPR-FM (Power 105.1) à New York, attire plus de huit millions d’auditeurs par mois, dont plus de la moitié sont issus de la communauté afro-américaine, selon des données. La chaîne YouTube de l’émission compte plus de cinq millions d’abonnés.
Cette participation de Greenblatt à The Breakfast Club survient alors que le rappeur Kanye West fait les gros titres pour ses propos antisémites et que Kyrie Irving, star des Brooklyn Nets, a fait la promotion d’un film anti-juif et complotiste.
« Alors que l’antisémitisme s’élève à un niveau sans précédent aux États-Unis et que les théories du complot anti-juives sont aujourd’hui normalisées de manière importante, il est urgent d’avoir un dialogue réfléchi et profond qui soit par ailleurs accessible à de larges audiences très diversifiées », a ajouté le porte-parole de l’ADL.
La conversation qui a suivi sur les ondes a été tendue par moment mais le dialogue a mis en lumière la relation entre les communautés juive et afro-américaine.
Au début du programme, Charlamagne Tha God — qui, en 2020, avait été critiqué par Greenblatt pour avoir affirmé que « les Juifs ont le pouvoir » – a interpellé l’ADL, disant que l’organisation « ne nourrit pas la même passion à l’égard de la lutte contre le racisme afro-américain qu’à l’égard de la lutte contre l’antisémitisme ».
Greenblatt a répondu que l’organisation avait été créée de prime abord « pour protéger les Juifs ». « C’est notre raison d’être », a noté Greenblatt. « Et c’est ainsi qu’à une époque où l’antisémitisme atteint un niveau sans précédent, nous investissons beaucoup de ressources dans cette lutte. » Il a ajouté que ces ressources étaient allouées au combat contre des extrémistes « qui veulent tuer à la fois les Afro-américains et les Juifs ».
« Ces extrémistes de droite, ce sont les mêmes qui se réjouissent de la lutte entre les Afro-américains et les Juifs et qui en tirent tous les bénéfices », a fait remarquer Greenblatt. « Ce sont ceux qui veulent voir s’affronter Kanye West et l’ADL, ou Charlamagne ou je ne sais qui – parce qu’ils haïssent ce que nous sommes passionnément, profondément ».
Charlamagne a aussi interrogé Greenblatt sur les Hébreux noirs, une secte religieuse dont les membres ont récemment manifesté aux abords du Barclays Centrer en soutien à Irving (suite au tweet écrit par Irving, l’ADL avait essayé de travailler avec ce dernier, qui avait initialement fait un don de 500 000 dollars à l’organisation – un don que le groupe n’a finalement pas accepté, l’homme n’ayant pas présenté ses excuses pour sa promotion d’un film antisémite et autres propos lors d’une conférence de presse).
« [Les Hébreux noirs] disent que vous n’êtes pas Juifs ? », a interrogé Charlamagne. « Ils disent que les Blancs ne sont pas les Juifs d’origine ? »
Greenblatt a répondu en évoquant une attaque menée par deux Hébreux noirs contre une épicerie casher du New Jersey, qui avait fait six morts au mois de décembre 2019. « Vous avez le droit de penser absolument ce que vous voulez », a dit Greenblatt, « mais je pense que nous devons reconnaître qu’une rhétorique peut avoir des conséquences dans le monde réel. »
Une telle « conséquence » a été l’explosion des commentaires antisémites et de haine sur le post de l’émission, sur YouTube. Tandis que quelques intervenants ont salué l’apparition de Greenblatt (« la conversation a été une conversation d’amour »), la majorité des commentaires a été moins charitable.
« Ce que cette année m’a appris, c’est qu’avec la Tribu, il faut vraiment se comporter comme si on était en présence de Dark Vador », a estimé un commentateur.
« Je suis 100% favorable à l’unité – à l’unité dans la nécessité de faire quitter ce pays à Greenblatt et aux autres rats de l’ADL », a noté un autre.
« Ce type nous a prouvé que Ye avait raison sur tout », a écrit un troisième, en référence à West qui avait récemment dit à Alex Jones, théoricien du complot, dans son émission Infowars : « J’apprécie Hitler ».
Le porte-parole de l’ADL a recommandé, de son côté, de « ne pas trop porter attention à ce que disent les gens dans la section des commentaires sur les réseaux sociaux. »
« Nous avons eu des retours très positifs sur la participation de Jonathan à l’émission », a-t-il affirmé. « Les antisémites, les fanatiques et les haters se manifesteront toujours, indépendamment de la plateforme sur laquelle nous nous présentons. Et nous refusons de laisser notre crainte des réactions des antisémites et des autres nous empêcher de faire notre travail important dans le combat contre la haine. Si nous les écoutions, les antisémites l’emporteraient ».
L’ADL est en relation avec de multiples groupes des droits civils afro-américains, notamment avec la NAACP (National Association for the Advancement of Colored People) et avec l’Urban League. « Dans tous mes bureaux, nous travaillons avec des organisations dirigées par des Afro-américains pour lutter contre le racisme à l’égard de ces derniers, pour faire partie, nous aussi, des législations et pour faire partie, nous aussi, des initiatives prises », a déclaré Greenblatt au micro de The Breakfast Club.
L’ADL a des antécédents controversés dans le milieu progressiste. Des dizaines d’importantes organisations, et notamment de nombreux groupes juifs, avaient signé une lettre ouverte intitulée « Abandonnez l’ADL » et qui estimait que l’Anti Defamation League avait « attaqué des mouvements de justice sociale dans le passé et les attaque encore ». En même temps, les groupes de droite ont pu s’en prendre à l’ADL pour sa promotion « d’idées d’extrême-gauche » et pour sa priorité accordée aux « communautés marginalisées » au détriment des problématiques communautaires juives.
Le Breakfast Club n’a pas répondu à une demande de commentaire.
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