Le maire de Chicago condamne la tentative d’assassinat d’un Juif, sans préciser sa religion
Des membres de la communauté juive dénoncent la déclaration de Brandon Johnson : "nous avons peur et nous avons besoin de savoir que notre maire nous soutient"
JTA – Le maire de Chicago, Brandon Johnson, a condamné la fusillade ayant visé un homme juif orthodoxe qui se rendait à la synagogue, mais s’est attiré des critiques pour ne pas avoir mentionné l’identité juive de la victime.
D’autres dirigeants politiques ont également condamné la fusillade, qui a eu lieu samedi dans le quartier de West Rogers Park, qui abrite une grande communauté juive. Le suspect, Sidi Mohamed Abdallahi, 22 ans, a ensuite échangé des coups de feu avec les forces de l’ordre et avec des urgentistes qui se trouvaient sur les lieux.
« Au nom de la ville de Chicago, nos pensées et nos prières les plus sincères vont à la victime et à ses proches suite à la fusillade de ce week-end qui a eu lieu à Rogers Park », a écrit Johnson dans une déclaration partagée sur le réseau social X mardi, ajoutant que cet « événement tragique n’aurait jamais dû se produire ».
Abdallahi a été inculpé de 14 chefs d’accusation, dont la tentative de meurtre au premier degré. Mais il n’a pas été inculpé de crimes de haine – suscitant la critique de certains Juifs locaux.
Debra Silverstein, qui représente la région au conseil municipal, a reproché à Johnson d’avoir omis l’identité juive de la victime.
« La victime était un homme juif, qui portait des vêtements juifs traditionnels, se rendant dans un lieu de culte juif le jour du repos juif », a réagi Silverstein sur X.
« N’effacez pas son identité et n’essayez pas de minimiser la peur et l’anxiété que ma communauté ressent après cette attaque. Nous avons peur et nous avons besoin de savoir que notre maire nous soutient. »
Le Conseil local des relations avec la communauté juive a également dénoncé la réaction, en demandant : « Que faudra-t-il pour que vous reconnaissiez la communauté juive ? »
Johnson a également été critiqué pour avoir attendu jusqu’à mardi pour condamner la fusillade.
La critique marque le dernier chapitre de sa relation rocailleuse avec les dirigeants juifs locaux. En janvier, Johnson a voté en faveur d’une résolution du conseil municipal appelant à un cessez-le-feu entre Israël et le groupe terroriste palestinien du Hamas à Gaza, faisant de Chicago la plus grande ville américaine à le faire. Cette résolution s’est attirée les foudres des groupes juifs locaux, notamment la Fédération de Chicago et la branche locale de l’Anti-Defamation League (ADL). À l’approche de la Convention nationale du parti démocrate (DNC), qui s’est tenue cet été à Chicago, Johnson a qualifié la guerre à Gaza de « génocidaire », une accusation qu’Israël dément fermement.
Les critiques de cette semaine ont dépassé les frontières de Chicago. Le représentant de New York, Ritchie Torres, un fervent défenseur pro-Israël, a également interpellé Johnson.
« Pourquoi ne pas mentionner POURQUOI la victime a été abattue – parce qu’elle était juive ? Pourquoi ne pas mentionner OÙ la victime a été prise pour cible – en route vers une synagogue ? », a écrit Torres sur X.
« Un maire qui ne peut pas se donner la peine de reconnaître l’antisémitisme d’un crime de haine contre un Juif qui se rendait à une synagogue est indigne de sa fonction. »
La violence armée est fréquente à Chicago – un suivi d’une chaîne ABC locale montre des fusillades quasi-quotidiennes – mais la nature de cette fusillade a attiré une attention particulière. Le gouverneur juif de l’Illinois, J.B. Pritzker, a publié mercredi une déclaration évoquant un potentiel motif antisémite.
« Je suis profondément troublé par la fusillade d’un homme juif orthodoxe alors qu’il se rendait à sa synagogue à West Rogers Park samedi », a écrit Pritzker.
« Je prie pour la victime, sa famille et toute notre communauté juive orthodoxe, et je soutiens tous les efforts des forces de l’ordre pour enquêter et poursuivre cet acte de violence insensé. »
« Les motivations du tireur méritent un examen complet et approfondi afin de déterminer si cet acte doit être considéré comme un crime de haine », a ajouté Pritzker .
Le sénateur de l’Illinois Dick Durbin, membre de la direction démocrate du Sénat, a également fait référence à la récente montée de l’antisémitisme dans sa propre déclaration.
« Cette attaque contre un Juif à Chicago pendant les fêtes juives est inacceptable », a écrit Durbin sur X.
« L’antisémitisme est en hausse en Amérique, et nous devons rester concentrés sur son éradication. Je me tiens aux côtés de la communauté juive de Chicago et de tout le pays. »
Abdallahi devait comparaître devant le tribunal mardi, mais, étant toujours hospitalisé, l’audience à été reportée. Il devrait comparaître le 7 novembre. La victime, âgée de 39 ans, est sortie de l’hôpital samedi.
Le surintendant du Département de la police de Chicago, Larry Snelling, ainsi que certains leaders juifs, ont appelé à la patience sur la désignation des crimes de haine alors que l’enquête se poursuit.
« Beaucoup d’informations ont circulé sur cette fusillade et nous demandons au public de ne pas porter de jugement hâtif sur cette situation », a déclaré Snelling lors d’une conférence de presse lundi.
« Nous continuons à enquêter sur la base des faits et des preuves disponibles. »
« Nous ne partons pas du principe qu’il s’agit d’un crime de haine, mais nous n’excluons pas la possibilité que ce soit le cas », a-t-il ajouté.
L’un des points d’achoppement pour beaucoup a été la séquence capturée par une caméra de sécurité voisine qui semblait montrer Abdallahi criant « Allah Akbar », ou « Dieu est le plus grand » en arabe. Selon la police, ce commentaire a été fait lors de l’engagement d’Abdallahi avec la police, et non lors de son attaque sur la victime juive.
« La déclaration qu’il a faite pendant qu’il s’adressait à nos officiers n’est pas une preuve que nous pourrions apporter à ce stade pour étayer un quelconque motif à l’encontre de ses actions envers nos officiers et envers notre victime », a déclaré Antoinette Ursitti, chef des enquêteurs, lors de la conférence de presse.
Indépendamment des accusations, les dirigeants juifs affirment que la fusillade a ébranlé une communauté juive qui était déjà en état d’alerte.
« Le crime de samedi ressemble à un crime de haine », a déclaré David Goldenberg, directeur régional de l’ADL pour le Midwest, lors d’une conférence de presse tenue mardi avec des dirigeants juifs locaux. « Quelle que soit l’issue de l’enquête, la communauté juive de Chicago a été ébranlée. Et la fusillade de samedi n’est que la dernière en date. »