Les internautes libanais rejettent l’aide et les gestes de solidarité d’Israël
"Ils hissent notre drapeau, mais bientôt ils détruiront notre pays", a écrit un utilisateur de Twitter, alors que la mairie de Tel Aviv s'est illuminé du drapeau libanais
Alors que certains Israéliens ont regretté et condamné la projection par la municipalité de Tel Aviv du drapeau libanais sur sa façade, les Libanais ont également vivement critiqué la décision.
De nombreux Libanais se sont ainsi exprimés mercredi sur les réseaux sociaux pour exprimer leur colère face au geste de solidarité de la municipalité de Tel Aviv envers les victimes de l’explosion du port de Beyrouth. L’explosion, qui a apparemment été causée par 2 750 tonnes de nitrate d’ammonium, a fait au moins 135 morts, plus de 5 000 blessés et 300 000 sans-abri.
« Bien sûr, ils hissent notre drapeau aujourd’hui, mais bientôt ils vont détruire notre pays et violer sa souveraineté », a écrit un utilisateur de Twitter.
Israël a annoncé mardi soir avoir tendu la main pour offrir une aide humanitaire au Liban après la gigantesque explosion qui a secoué Beyrouth. La catastrophe a poussé au bord du gouffre le Liban, déjà en proie à une crise économique sans précédent, et les hôpitaux ont du mal à faire face à l’afflux de blessés.
« Ce soir, nous illuminerons l’hôtel de ville avec le drapeau du Liban. L’humanité passe avant tout conflit, et notre cœur est avec le peuple libanais après la terrible catastrophe qui l’a frappé », a écrit le maire de Tel Aviv, Ron Huldai, sur Twitter.
De nombreux autres pays, dont la Jordanie, l’Iran et les Émirats arabes unis, ont également illuminé de grands bâtiments publics pour exprimer leur solidarité avec les victimes des explosions.
https://twitter.com/joeyayoub/status/1291077104940048388
En utilisant le hashtag « Nous n’en voulons pas », de nombreux Libanais ont exprimé leur rejet à la fois de la solidarité israélienne et des offres d’aide médicale. Certains ont également partagé les remarques de l’homme politique Moshe Feiglin, chef du parti Zehut, qui a déclaré que l’explosion du port de Beyrouth était une « merveilleuse célébration ».
« En tant que citoyen libanais, cela me déshonore que Tel Aviv fasse preuve de solidarité avec le Liban. Quiconque fait circuler ces photos sera considéré comme un collaborateur », a écrit un autre utilisateur à propos du bâtiment municipal éclairé.
Certains utilisateurs – en particulier ceux qui soutiennent le Hezbollah – ont déclaré qu’ils aspiraient à la violence.
« C’est nous qui allons illuminer Tel Aviv – avec nos missiles. Tel Aviv est déjà illuminée par le fantôme d’Imad et de Jihad [Mughniyeh] », a écrit Mohammad Ali Sakr, en référence à deux dirigeants du groupe terroriste – un père et son fils – prétendument tués par Israël.
« Nous ne voulons rien de vous, vous êtes nos ennemis… vous qui avez tué les enfants de Cana », a écrit Saad Dairi. Environ 106 civils libanais sont morts lors de l’incident survenu en 1996 dans le village de Cana, lorsqu’Israël a bombardé une position des Nations unies pour tenter de riposter aux tirs du Hezbollah. Le Premier ministre de l’époque, Shimon Peres, avait exprimé sa « surprise amère », constatant que des civils se trouvaient dans la région.
D’autres ont publié des photos de Ramallah, où la principale station de radiodiffusion de l’Autorité palestinienne avait également été éclairée par une projection du drapeau libanais.
Israël a mené deux grandes guerres contre les forces libanaises, dont beaucoup dans le pays se souviennent douloureusement. En 1982, Israël a procédé à une invasion après des attaques transfrontalières répétées de l’Organisation de libération de la Palestine, et a fini par occuper une bande du Sud-Liban jusqu’en 2000. En 2006, les forces israéliennes sont à nouveau entrées au Liban suite à l’enlèvement de deux soldats israéliens par le Hezbollah.
« Israël est la plus grande source de martyrs et de blessés dans tout le Liban… c’est le mal absolu. Il est interdit de travailler avec lui », a écrit Jamal Chaiito, en publiant des photos de destruction de la première guerre du Liban et de l’incident de Cana.
Certains semblent ne pas être d’accord, disant qu’ils accueillent favorablement l’aide israélienne.
« Mais nous la voulons, c’est-à-dire la paix. Au diable les idées iraniennes », a écrit Hussein Nasr, qui se décrit lui-même comme un résident du Sud-Liban.
Par le passé, Tel Aviv a illuminé son hôtel de ville aux couleurs d’autres pays en proie à des catastrophes. L’hommage de la municipalité au drapeau égyptien après une attaque contre les coptes chrétiens en mai 2017 était la première fois que ce geste était fait à l’égard d’un pays arabe, bien que contrairement au Liban, l’Égypte a un accord de paix et des liens avec Israël.