Israël en guerre - Jour 590

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'Je n'ai jamais entendu une réunion avec plus d'émotion', a expliqué le co-président du JPPI Stuart Eizenstat, qui recommande vivement aux Juifs de la Diaspora de commencer un travail de lobbying sur le terrain

Les ministres ont débattu de ‘l’avenir du peuple juif’

Un récit vécu de l'intérieur de la fatidique réunion du cabinet au cours de laquelle le plan de prière pluraliste au mur Occidental a été rejeté

Amanda Borschel-Dan édite la rubrique « Le Monde Juif »

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu dirige  la réunion hebdomadaire du cabinet dans ses bureaux, à Jérusalem, le 25 juin 2017. (Crédit : Marc Israel Sellem/Pool/Flash90)
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu dirige la réunion hebdomadaire du cabinet dans ses bureaux, à Jérusalem, le 25 juin 2017. (Crédit : Marc Israel Sellem/Pool/Flash90)

Lors de la rencontre, dimanche, au cours de laquelle le Premier ministre Benjamin Netanyahu a annoncé le gel de la décision gouvernementale, prise le 31 janvier 2016, de construire une aire de prière pluraliste, l’Institut politique du peuple juif (JPPI) a livré son évaluation annuelle devant le cabinet, avertissant clairement que l’abandon du plan du mur Occidental pourrait avoir de dures conséquences sur la relation entretenue par la Diaspora avec Israël.

Malgré la mise en garde du JPPI – et les avertissements d’autres think-tanks israéliens qui ont tiré des conclusions similaires — Netanyahu a annoncé dans une déclaration sèche en trois volets que la décision gouvernementale était dorénavant mise en attente.

De plus, le ministre Tzachi Hanegbi du parti du Likud de Netanyahu et le secrétaire de cabinet Tzachi Braverman ont été nommés représentants du gouvernement en vue d’un nouvel accord et – ce qui est déconcertant – la préparation de l’angle sud du pavillon du mur Occidental, qui se limite actuellement à un site archéologique doté d’une plate-forme artisanale de prière, devrait « continuer ».

S’exprimant lundi auprès du Times of Israel, le co-président du JPPI, Stuart Eizenstat, a déclaré en évoquant la réunion de cabinet de dimanche : « C’était comme si le débat portait sur l’avenir du peuple juif – et d’une certaine manière, ça a été le cas ».

Organisée initialement comme un compte-rendu de 45 minutes, cette réunion a duré une heure supplémentaire marquée par un débat émouvant au cours duquel, suite à l’annonce du gel de Netanyahu, presque chaque membre du cabinet a pris la parole.

« Je n’ai jamais entendu une réunion remplie avec autant d’émotion », a expliqué Eizenstat, qui a tenu un certain nombre de rôles diplomatiques et gouvernementaux aux Etats-Unis et qui a été notamment ambassadeur américain au sein de l’Union européenne de 1993 à 1996 puis sous-secrétaire d’Etat au trésor de 1999 à 2001.

L'ancien ambassadeur et co-président de l'Institut politique du peuple juif Stuart Eizenstat (Autorisation : JPPI)
L’ancien ambassadeur et co-président de l’Institut politique du peuple juif Stuart Eizenstat (Autorisation : JPPI)

« Mon ultime propos, c’est qu’Israël est l’Etat juif mais, comme le Premier ministre le dit mieux que personne, c’est également l’état du peuple juif. Mais il ne peut pas être [l’Etat du peuple juif] s’il n’est que pour quelques Juifs. Il ne peut pas être que pour les orthodoxes du monde entier », a dit Eizenstat.

Lors de la rencontre, a signalé Eizenstat, qui connaît et travaille avec Netanyahu depuis des décennies, le Premier ministre a indiqué qu’il « comprenait les émotions de la Diaspora et qu’il compatissait véritablement avec cette dernière mais qu’il avait également compris ce que ressentait la communauté haredi [ultra-orthodoxe] et que la meilleure chose à faire était de trouver un compromis. »

Eizenstat a ajouté que Netanyahu avait souligné qu’il « n’annulait ni ne mettait en œuvre mais gelait l’initiative en espérant trouver ultérieurement un compromis ».

Netanyahu a déclaré qu' »il espérait pouvoir jouer un rôle en servant de médiateur et en aidant à déclencher un autre compromis », a poursuivi Eizenstat.

Lors de la réunion de dimanche, Eizenstat a mis en garde contre une « double polarisation » susceptible d’avoir lieu aux Etats-Unis et qui affecterait les relations américano-israéliennes.

La première est la division survenue dans la politique américaine dans laquelle le centre s’est effondré, a-t-il expliqué, ce qui crée le danger qu’Israël soit – ou devienne bientôt – une question partisane. Il s’est référé à un récent sondage dans lequel seulement 50 % de ceux qui s’associent au parti démocrate soutiennent dorénavant Israël face à l’Autorité palestinienne, alors qu’ils sont 80 % chez les Républicains.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu avec le président de la Conférence des présidents, Stephen M. Greenberg, au centre, et son vice-président exécutif Malcolm Hoenlein, à l'ouverture de la 42e conférence de la Mission du Leadership, à Jérusalem, le 14 février 2016. (Crédit : Avi Hayoun)
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu avec le président de la Conférence des présidents, Stephen M. Greenberg, au centre, et son vice-président exécutif Malcolm Hoenlein, à l’ouverture de la 42e conférence de la Mission du Leadership, à Jérusalem, le 14 février 2016. (Crédit : Avi Hayoun)

La seconde division se trouve dans la communauté juive américaine qui se situe majoritairement, aux niveaux politique et religieux, au centre-gauche. 65 % à 70 % des membres de la communauté se sentent de plus en plus séparés d’Israël, « un pays qui semble bouger de plus en plus vers la droite ».

Eizenstat a expliqué avoir averti le cabinet que bientôt Israël « n’aura plus les mêmes liens religieux et communautaires pour maintenir et soutenir le pays ». Il a de plus conseillé aux politiciens de « considérer la communauté juive américaine comme un acteur stratégique majeur pour Israël ». Toutefois, « lorsque ce genre d’actions surviennent [le gel du mur Occidental ainsi que l’annonce d’un nouveau projet de loi strict sur les conversions], elles peuvent potentiellement éroder ce soutien stratégique qui est tellement vital ».

Les conclusions du JPPI mentionnant une « lente érosion » de ces liens sont partagées par des études au sein des think-tanks israéliens.

MK Yohanan Plesner (photo credit: Miriam Alster/FLASH90)
Le parlementaire Yohanan Plesner (Crédit: Miriam Alster/FLASH90)

Yohanan Plesner, président de l’Institut israélien de la démocratie, a indiqué lundi que « plus longtemps nous échouerons à offrir l’égalité des droits et la reconnaissance des courants non-orthodoxes du Judaïsme, plus profonde sera la fissure entre Israël et les Juifs de la Diaspora. Si nous attendons des Juifs de l’étranger qu’ils soutiennent l’état d’Israël, nous devons leur garantir l’égalité religieuse. La sécurité d’Israël est en jeu ».

L’Institut israélien de la démocratie est un think-tank indépendant et non-partisan qui s’efforce d’utiliser la recherche pour influencer la politique gouvernementale et l’opinion publique. Il est très actif sur la question, entre autres, de la religion et de l’état.

« La décision de ne pas décider et de laisser la situation telle quelle ne fait qu’élargir le fossé qui s’est ouvert dans la relation stratégique de la plus haute importance entre l’Etat d’Israël et la communauté juive de la Diaspora », a ajouté Plesner, qui a réprimandé le gouvernement incapable, selon lui, « de prendre une décision mineure comme l’approbation de l’accord sur le mur Occidental qui avait déjà été accepté par les formations ultra-orthodoxes ».

Cela crée une « réalité absurde », a dit Plesner. « Le temps est venu de prendre une décision courageuse : celle de faire avancer la liberté religieuse de manière à permettre à tous d’exercer ses droits à la liberté de culte ».

Un autre think tank indépendant, l’Institut Reut, basé à Tel Aviv, s’était montré pour sa part presque visionnaire dans un document de recherche effectué au mois de mars 2017 et consacré au rôle de l’état d’Israël en tant que nation du peuple juif. Il y évaluait que « 2017 sera probablement une année de conflit renouvelé autour du statut du Judaïsme progressiste en Israël. En 2017, ce conflit prendra de nouvelles proportions en raison de l’échec gouvernemental à tenir sa promesse dans l’affaire du ‘compromis du Kotel’. »

Gidi Grinstein, fondateur et président de l'Institut Reut (Crédit : Autorisation de l'Institut Reut)
Gidi Grinstein, fondateur et président de l’Institut Reut (Crédit : Autorisation de l’Institut Reut)

De plus, mettait en garde l’étude, « des conflits comme ceux-là affectent négativement la capacité d’un nombre croissant d’individus, ainsi que d’organisations communautaires juives, à maintenir une connexion qui ait du sens avec Israël ». Ce manque de lien avec Israël, à son tour, cause un amoindrissement de l’identité juive dans la Diaspora, selon Reut.

« Le temps est venu pour Israël de se demander : Que cela signifie-t-il véritablement d’être l’état-nation du peuple juif entier ? Quelles obligations impliquent ce rôle ? Comment Israël peut-il renforcer et protéger la cohésion du peuple juif entier ? » a interrogé Reut dans un communiqué qui a suivi l’annonce du gel du plan du mur Occidental.

Toutefois, selon Eizenstat, le temps est également venu pour la Diaspora de se poser quelques questions d’introspection.

‘Les voix de la Diaspora sont entendues, mais on ne les écoute pas sur des questions qui entrent en conflit avec le processus politique’

« En fin de compte, les décisions ne sont pas prises sur la base de ce que pense la Diaspora mais sur ce qui est viable politiquement », a-t-il estimé. « Les voix de la Diaspora sont entendues, mais on ne les écoute pas sur des questions qui entrent en conflit avec le processus politique ».

La seule manière d’influencer vraiment le processus politique serait soit d’immigrer en Israël et d’en devenir un électeur, soit de mettre en place une présence continue de lobbying sur le terrain pour les questions qui touchent la Diaspora.

« Ne faites pas de déclarations à la presse en disant que vous êtes déçus – devenez un acteur du système », a-t-il continué. « Si la Diaspora ne souhaite pas le faire, c’est là le genre de résultats qu’elle verra ».

Au lieu de faire des déclarations « fadasses », a-t-il poursuivi, il est temps de mettre la « main à la pâte » et de edvenir un acteur efficace au sein de la politique nationale israélienne.

En même temps, les trois think tanks se sont accordés pour dire qu’il y a encore beaucoup de choses à faire pour empêcher un schisme total entre Israël et la Diaspora, la principale semblant être la mise en oeuvre du projet de pavillon de prière pluraliste.

« La personne qui peut faire le plus pour guérir cette blessure est le Premier ministre lui-même, il est très conscient de cela… J’aime penser que s’il y avait eu une coalition différente, le résultat aurait été différent. Je ne pense pas que cela ait été une décision heureuse pour lui », a conclu Eizenstat.

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