Silman annonce un projet de baignades séparées dans les réserves naturelles
Les autorités judiciaires doivent autoriser le projet, qui prévoit de prolonger les heures d'ouverture de deux sources naturelles au mois d'août pour les visiteurs religieux
La ministre de la Protection de l’environnement, Idit Silman, a annoncé mardi que deux réserves naturelles situées près de Jérusalem resteraient ouvertes ce mois-ci en dehors des heures d’ouverture habituelles pour les visiteurs qui souhaitent se baigner dans des sources naturelles sans la présence de personnes du sexe opposé.
Mais peu après l’annonce du plan, l’Autorité israélienne de la nature et des parcs (INPA), qui dépend du ministère et gère les parcs en question, a déclaré qu’elle ne se conformerait pas à cette mesure tant qu’elle n’aurait pas été approuvée par les autorités judiciaires.
Cette mesure et les complications qu’elle entraîne touchent à la fois au partage des ressources entre Juifs religieux et laïques et à la conformité des bureaucrates et des juristes avec les politiques des élus – deux des questions les plus controversées qui divisent les Israéliens en ce qui concerne la refonte judiciaire initiée par l’actuel gouvernement.
Le changement annoncé par le bureau de Silman concerne Einot Tzukim, une oasis dans le désert de Judée, qui, selon le nouvel arrangement, ouvrirait pour la baignade séparée à 6h30 au lieu de 8h les dimanches et mercredis. À Ein Hanya, une source située près de Jérusalem, les heures d’ouverture seraient prolongées de trois heures, jusqu’à 20 heures, pour la baignade séparée les mercredis et jeudis.
De nombreux Juifs orthodoxes pratiquants considèrent que la baignade mixte est impudique et s’en abstiennent. Certains visiteurs laïques et moins pieux s’opposent à l’introduction de la non mixité dans les espaces publics, qu’ils perçoivent comme une atteinte déraisonnable à leurs droits civiques et comme une coercition religieuse.
En prolongeant les heures d’ouverture, « l’une des parties en bénéficie et aucune n’est compromise », a déclaré Silman dans un communiqué. La décision d’ouvrir tôt Einot Tzukim plutôt que de fermer tard a été prise afin de ne pas gêner les animaux sauvages qui viennent aux sources d’eau de l’oasis après les heures d’ouverture, ajoute le communiqué.
Cette mesure, qualifiée de programme pilote par le bureau de Silman, est la dernière d’une série d’initiatives controversées destinées à ménager les intérêts des visiteurs religieux.
En 2020, l’INPA avait déjà annoncé, de sa propre initiative, deux dates en septembre où des plages horaires seraient réservées à la baignade non mixte à Einot Tzukim, au détriment de la baignade mixte dans certaines pataugeoires de l’oasis. Mais face aux contestations, l’INPA avait reporté le projet dans l’attente d’un examen juridique, avant de finalement complètement l’abandonner.
Interrogée par le Times of Israel pour savoir si l’Autorité israélienne de la nature et des parcs avait l’intention de suivre les instructions du ministre, la porte-parole de l’INPA, Shlomit Shavit, a déclaré : « Nous sommes en train de nous pencher sur la question et avons l’intention d’appliquer la mesure, mais elle est toujours en cours d’examen par des experts juridiques et nous attendons leur avis ».
L’INPA n’a pas mis à jour sur son site web les heures d’ouverture des deux réserves, et n’a pas communiqué de changement sur d’autres supports. « Nous communiquerons ces informations lorsqu’elles auront été approuvées par les experts juridiques », a déclaré Shavit.
Dans une déclaration écrite, un porte-parole de l’INPA a écrit qu’il « examinait la possibilité » d’instituer des bains séparés. « L’autorité sera en mesure de réaliser le plan de baignade une fois qu’il aura été approuvé par les parties concernées, y compris le ministère de la justice », peut-on lire dans la déclaration.
Israel Hofsheet, une organisation à but non lucratif dont l’énoncé de mission inclut la promotion des « libertés religieuses », a déclaré dans un communiqué qu’elle demanderait une injonction contre le programme pilote. « Nous ne pouvons pas permettre une réalité dans laquelle les Israéliens doivent vérifier s’il y a une ségrégation entre les sexes dans le site qu’ils souhaitent visiter. Nous ne devons pas intégrer cette réalité », a écrit Uri Keidar, directeur de l’association, dans un communiqué.
Shai Glick, directeur de Btsalmo, une organisation à but non lucratif qui se décrit comme vouée à la lutte contre ce qu’elle appelle le « mépris des droits de l’homme des juifs » en Israël, a déclaré que le programme pilote « s’attaque enfin à la discrimination à l’encontre des juifs et des musulmans pieux » dans les réserves naturelles.
L’annonce du projet pilote de baignade séparée survient au milieu d’une vague de protestations contre les efforts du gouvernement de droite dure – qui comprend de nombreux partis religieux – pour transférer certains pouvoirs du judiciaire à l’exécutif et au législatif. Elle a intensifié les tensions préexistantes entre ceux qui cherchent à diminuer le rôle de la religion dans le gouvernement et ceux qui souhaitent le préserver ou l’accroître.