L’Otan dépêche une flotte en mer Egée pour lutter contre les passeurs de migrants
L'Otan avait refusé de s'impliquer directement dans la pire crise migratoire de l'Europe depuis la Deuxième Guerre mondiale
L’Otan a promptement répondu à l’appel à l’aide de l’Allemagne, de la Turquie et de la Grèce en dépêchant jeudi en mer Egée une flotte pour lutter contre les passeurs qui alimentent l’afflux sans précédent de migrants vers l’Europe.
Le commandant des forces alliées en Europe, le général américain Philip Breedlove, « est en train d’ordonner au groupement naval permanent (de l’Otan) de se rendre en mer Egée sans tarder et d’y débuter des activités de surveillance », a déclaré le chef de l’Alliance, Jens Stoltenberg, à l’issue d’une réunion des ministres de la Défense de l’Otan à Bruxelles.
Une telle opération de surveillance frontalière en mer est une première pour cette organisation militaire défensive, qui avait jusqu’à présent refusé de s’impliquer directement dans la pire crise migratoire en Europe depuis 1945.
La mission doit toutefois être encore formellement mise sur pied, a souligné M. Stoltenberg. Reste aussi à établir les procédures pour le partage d’informations avec les garde-côtes grecs et turcs, ainsi qu’avec l’agence européenne Frontex.
Mais « il ne s’agit pas d’arrêter ou de repousser des bateaux de réfugiés », a assuré le secrétaire général de l’Otan.
La mission fournira « des informations et une surveillance essentielles pour aider à lutter contre le trafic d’humains et les réseaux criminels, en coopération avec les garde-côtes nationaux et l’Union européenne », a-t-il expliqué.
Le secrétaire américain à la Défense, Ashton Carter, a souligné « la nécessité pour l’Otan d’agir rapidement car des vies humaines sont en jeu ».
Plus de 400 migrants ont péri depuis le 1er janvier en mer Egée. En 2015, plus d’un million sont arrivés en Europe, un record absolu depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.
En vertu du droit de la mer, les navires alliés seront amenés à secourir des embarcations en perdition.
Renvoyés en Turquie
La ministre allemande de la Défense, Ursula von der Leyen, a fait état d’ « un accord solide avec la Turquie selon lequel les réfugiés vont être renvoyés en Turquie, quelles que soient les circonstances ».
Irrité par les appels à ouvrir la frontière turque aux nouveaux réfugiés syriens fuyant l’offensive sur Alep, le président islamo-conservateur turc Recep Tayyip Erdogan a menacé jeudi d’expédier vers l’Europe les centaines de milliers déjà en Turquie.
Quant au ministre grec de la Défense grec, Panos Kammenos, il a estimé que le déploiement des navires de l’Otan allait « régler de manière déterminée la question migratoire ».
« La Turquie n’opérera que dans les eaux turques et dans l’espace aérien turc, et la Grèce dans les eaux et espace aérien grecs », a expliqué M. Kammenos.
Trois navires participent actuellement au groupement maritime permanent sous commandement allemand. Ils croisent au large de Chypre et pourraient arriver en mer Egée « dans les prochains jours », selon une source militaire allemande.
« Plusieurs Alliés ont annoncé qu’ils étaient prêts à renforcer ce groupement. Je m’attends à ce qu’il soit élargi dans un avenir proche », a souhaité le chef de l’Otan.
La mission devrait compter 5 à 7 navires pour pouvoir être pleinement opérationnelle, selon la source allemande.
Après plusieurs naufrages dramatiques d’embarcations surchargées de migrants au large de la Libye, l’Union européenne a mis sur pied en juin 2015 une opération navale contre les passeurs, baptisée « Sophia ». Depuis, la route migratoire s’est déplacée vers la Turquie et la Grèce.
Enfin, l’Otan va « intensifier sa surveillance et son partage de renseignements » à la frontière turco-syrienne, où s’amassent des milliers de réfugiés chassés par l’offensive du régime de Damas et de son allié russe contre la ville d’Alep.