L’UE déboute une ONG palestinienne refusant de signer la clause anti-terroriste
Badil perd une subvention pour un projet visant à exposer les crimes israéliens présumés à Jérusalem, déplore que l'UE "adopte les allégations du lobby sioniste"
Raphael Ahren est le correspondant diplomatique du Times of Israël
La semaine dernière, l’Union européenne a pour la première fois annulé une subvention à une organisation palestinienne à but non lucratif pour avoir refusé de signer une clause qui l’obligerait à s’assurer qu’aucune organisation terroriste ne bénéficie des programmes financés.
La décision de Bruxelles fait suite à une amère controverse le mois dernier sur son soutien aux ONG palestiniennes, qui a conduit Israël à réprimander l’ambassadeur de l’UE à Tel-Aviv sur le prétendu « financement des organisations terroristes » par le bloc des 27.
L’organisation à but non lucratif, appelée Badil Resource Center for Palestinian Residency and Refugee Rights, a obtenu 1,7 million d’euros (environ 6,5 millions de shekels) pour un projet de trois ans intitulé « Mobilisation pour la justice à Jérusalem », qui vise à exposer les violations présumées des droits humains et les « crimes internationaux » commis par Israël dans la capitale.
Mais l’UE a informé cette dernière dans une lettre vendredi qu’en raison de son refus de signer l’article 1.5 de l’annexe II des « Conditions générales applicables aux contrats de subvention pour les actions extérieures financées par l’Union européenne », elle était obligée de « considérer que votre demande n’est plus valable », a rapporté l’ONG dans un communiqué de presse publié mardi.
L’article 1.5, qui a été introduit dans les contrats conclus entre l’UE et des ONG en 2019, stipule que les bénéficiaires de subventions doivent s’assurer qu’aucun fonds n’ira à des groupes répertoriés comme organisations terroristes.
La liste noire du terrorisme de l’UE, officiellement appelée « liste des mesures restrictives de l’UE », comprend plusieurs groupes palestiniens, tels que le Hamas, le Jihad islamique palestinien et le Front populaire de libération de la Palestine (FPLP).
Badil a refusé de signer la clause parce qu’elle « criminalise la lutte palestinienne contre l’oppression et exige que l’organisation bénéficiaire effectue des procédures de ‘filtrage’, ce qui revient à contrôler son propre peuple », selon son communiqué de presse.
« L’inclusion de cet article dans les contrats avec les organisations palestiniennes contredit le rôle national des institutions de la société civile palestinienne dans la lutte pour la libération du colonialisme et de l’apartheid israéliens », peut-on lire dans le communiqué de Badil. « De plus, l’article viole à la fois le droit palestinien et le droit international, ainsi que les obligations déclarées de l’UE elle-même ».
Selon le ministère des Affaires stratégiques, qui lutte contre les organisations anti-Israël de la société civile, Badil fait partie des 130 groupes palestiniens qui refusent de signer l’article 1.5.
« Je félicite l’UE d’avoir adopté une position ferme contre la campagne fallacieuse qu’elle mène sur cette question », a réagi mercredi la ministre des Affaires stratégiques, Orit Farkash-Hacohen.
Jérusalem s’est efforcé de garantir que Bruxelles « ne cède pas aux demandes illégitimes des organisations palestiniennes concernées et continue d’insister pour que l’argent des contribuables européens ne serve pas à financer des ONG ayant des liens avec le terrorisme », a-t-elle ajouté. « Le récent refus de l’UE est un autre pas dans cette bonne direction ».
Un organisme israélien qui surveille le financement par l’UE des groupes palestiniens a également salué la décision du bloc d’annuler le financement du projet de Badil.
« Nous applaudissons l’UE pour s’être montrée ferme face aux pressions et pour avoir fait appliquer sa clause antiterroriste », a commenté Olga Deutsch, vice-présidente de l’ONG Monitor, basée à Jérusalem.
« Il ne fait aucun doute que des groupes radicaux comme Badil, qui non seulement ont un passé de promotion de l’antisémitisme et de rejet d’Israël, mais qui ne s’engageront pas à ne pas coopérer avec le terrorisme, n’ont pas à recevoir de financement de l’UE ou de tout autre gouvernement », a-t-elle poursuivi.
« Nous espérons que l’UE examinera plus avant les 25 millions d’euros qu’elle a versés à ces groupes depuis 2011 ».
Fondée en 1998, Badil est « une organisation indépendante à but non lucratif de défense des droits humains qui s’engage à protéger et à promouvoir les droits des réfugiés palestiniens et des personnes déplacées à l’intérieur du pays », selon son site web.
Conscient de l’exigence de l’UE de s’assurer qu’aucun fonds n’est destiné à des moyens illicites, Badil avait proposé une alternative à l’article 1.5, qui aurait vu le groupe s’engager à ne pas transférer de fonds aux groupes politiques et à ne les utiliser que pour « promouvoir les droits humains et les principes et valeurs démocratiques conformément aux normes du droit international et aux meilleures pratiques ».
Mais l’UE a rejeté cette suggestion, affirmant que l’obligation de signer la clause antiterroriste s’applique aux financements de l’UE dans le monde entier et n’est pas spécifique aux ONG palestiniennes. « Certaines dispositions ne peuvent être modifiées ou dérogées », a indiqué un porte-parole de l’UE au Times of Israel mercredi. « Par conséquent, le processus a été annulé. »
Cependant, l’ONG déplore que « le rejet par l’UE de la formulation alternative proposée par Badil à l’article 1.5 révèle que l’article est plus qu’un simple texte de passage pour garantir que les fonds ne soient pas transférés aux partis politiques, selon les revendications de l’UE, mais plutôt l’acceptation et l’adoption des allégations du lobby sioniste et des campagnes israéliennes ».
Le groupe a ensuite exigé que toutes les ONG palestiniennes signataires de l’article annulent immédiatement leurs accords avec l’UE.
Le soutien de l’Union aux groupes palestiniens, dont certains sont accusés d’avoir des liens avec des groupes terroristes, a longtemps été un point de friction dans ses relations avec Israël.
Le 7 mai, le ministère des Affaires étrangères avait convoqué l’ambassadeur de l’UE en Israël, Emanuele Giaufret, pour une mise au pas après la publication d’une lettre dans laquelle un haut fonctionnaire de l’UE en poste à Jérusalem-Est assure aux Palestiniens que l’appartenance ou l’affinité à une organisation terroriste n’empêche pas automatiquement une personne d’être éligible à des programmes financés par l’UE.
« Israël condamne totalement et s’oppose catégoriquement à la politique de l’Union en matière de financement des organisations terroristes. Cette politique accorde essentiellement la permission d’inciter, de soutenir et de participer au terrorisme », avait dénoncé le ministère dans une déclaration à l’époque.