Macron, Biden mais pas Poutine le 6 juin en Normandie pour les 80 ans du Débarquement
Ce 80e anniversaire fera écho au 70e où un conflit larvé montait déjà en Ukraine avec l'annexion de la Crimée par la Russie et le début d'une rébellion séparatiste pro-russe dans l'est du pays

Les Européens, les Etats-Unis et le Canada vont célébrer le 6 juin, à l’occasion du 80e anniversaire du débarquement en Normandie, leur alliance historique alors que la guerre frappe de nouveau le continent et que la possible réélection de Donald Trump menace cet ordre établi.
Le président français Emmanuel Macron accueillera le gotha transatlantique à Omaha Beach (« Omaha la sanglante »), une des cinq plages du Débarquement, sur laquelle les Américains, pris au piège des défenses allemandes, subirent de lourdes pertes.
L’Américain Joe Biden, qui devrait entamer dans la foulée une visite d’Etat en France, est attendu, de même que, potentiellement, le roi d’Angleterre Charles III, qui a repris ses activités publiques en dépit d’un cancer.
Etape clé de la libération de l’Europe du joug nazi, ce débarquement est le plus important de l’histoire par le nombre de bâtiments engagés : 6 939 navires ont débarqué 132 700 hommes – essentiellement Britanniques, Américains et Canadiens – en Normandie.
Cette cérémonie internationale, initiée par le président François Mitterrand en 1984, c’est « l’acte par référence de la fraternité transatlantique », relève Michel Duclos, conseiller spécial à l’Institut Montaigne.
« C’est assez opportun de rappeler l’un des fondamentaux des relations internationales actuelles, d’autant plus qu’il y a des doutes » sur le devenir de ce lien si Donald Trump, isolationniste proclamé, est réélu en novembre à la Maison Blanche, ajoute l’ex-diplomate.

Moment français
Emmanuel Macron, qui a fait de ce 80e anniversaire un grand rendez-vous mémoriel national, se rendra aussi le 5 juin à Saint-Lô (Manche) pour un hommage aux victimes civiles de la bataille de Normandie et le 7 juin à Bayeux (Calvados), première ville libérée, ainsi que Cherbourg dont le port joua un rôle central dans les opérations.
« C’est une commémoration générale d’une année, 1944, qui fut celle de la renaissance du pays », souligne un conseiller de l’Elysée.
Le chef de l’Etat a entamé depuis plusieurs mois une « itinérance » mémorielle, rendant hommage à la résistance non gaulliste et à l’apport des étrangers à cette dernière par la panthéonisation du poète arménien Missak Manouchian, ou en rappelant, dans le Vercors, cette époque où des Français se faisaient la guerre entre eux.
Sur le plan international, il endossera une nouvelle fois ses habits de leader européen alors que la guerre fait rage à 2 500 km des côtes normandes avec l’offensive russe en Ukraine.

« C’est la France ‘puissance de paix’. Il faut faire en sorte que l’Europe puisse se défendre face aux agressions », résume un proche du président.
Ce dernier a de nouveau assumé jeudi dans The Economist sa position controversée sur la possibilité d’envoyer des troupes au sol en Ukraine, si Moscou venait à « percer les lignes de front ».
Ce 80e anniversaire fera écho au 70e où un conflit larvé montait déjà en Ukraine avec l’annexion de la Crimée par la Russie et le début d’une rébellion séparatiste pro-russe dans l’est du pays.
Ce 6 juin 2014, le président russe Vladimir Poutine était présent à Ouistreham au côté de Barack Obama, François Hollande et Angela Merkel, au nom de la contribution de l’URSS à la victoire finale sur le nazisme.
Zelensky invité ?
Cette présence avait permis une rencontre en coulisse avec le nouveau président ukrainien d’alors, Petro Poronchenko, et le lancement d’un processus de négociations dit au « format Normandie », incluant la France et l’Allemagne, qui aboutit aux accords de Minsk.

En 2024, Vladimir Poutine est devenu persona non grata mais la Russie sera invitée, à un rang non encore précisé, afin de rappeler les sacrifices de l’URSS face à l’Allemagne nazie.
« Il faut trouver le bon équilibre, ne pas sous-estimer leur contribution à la victoire finale mais rappeler que la guerre avait commencé sans eux et que s’ils ont pu avoir cette contribution, c’est en grande partie grâce aux équipements américains », pointe Michel Duclos.
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky sera-t-il pour sa part invité ? Il est trop tôt pour le dire, répond-on à Paris, qui prévoit un sommet international après la cérémonie réunissant tous les dirigeants présents.
« Dans ce genre d’événement, il y a toujours des sous-événements dans les coulisses. Ce peut être l’occasion de prendre des initiatives diplomatiques », anticipe Michel Duclos.