Mandelblit va examiner d’éventuels actes répréhensibles de la police
L'association du barreau a appelé à une enquête immédiate sur les soupçons de pression exercées sur le témoin de l'accusation Nir Hefetz dans l'Affaire 4000 qui sème le doute

Le procureur-général Avichai Mandelblit a promis mardi d’examiner l’existence d’éventuels actes répréhensibles de la part des enquêteurs dans les dossiers impliquant le Premier ministre Benjamin Netanyahu, après un reportage qui a soulevé des questions sur la conduite adoptée par la police durant l’interrogatoire de Nir Hefetz, témoin de l’accusation déterminant, ainsi que des doutes sur la véracité de son témoignage.
Le chef de l’Association du barreau israélien a réclamé une enquête immédiate et transparente sur ces accusations, clamant que placer « un embargo sur des soupçons sans apporter une explication au public » était « impensable », faisant apparemment référence à certains détails de l’affaire qui restent secrets.
La Douzième chaîne a partagé, lundi, des retranscriptions de déclarations faites par Nir Hefetz, dans lesquelles il évoque des difficultés à se souvenir de manière précise des détails de l’affaire et d’avoir modifié son témoignage à plusieurs occasions. Il se souvient également avoir mentionné des rencontres qui n’ont apparemment jamais eu lieu.
Hefetz est un ancien porte-parole et proche de Netanyahu et il est témoin dans l’Affaire 4000 – la plus grave – dans laquelle le Premier ministre Netanyahu est accusé d’avoir tenté de s’assurer une couverture favorable sur le site d’informations Walla. En contrepartie, il aurait octroyé des faveurs régulatoires qui pourraient avoir rapporté des millions de dollars à Shaul Elovitch, alors patron du principal groupe de télécommunications israélien Bezeq et du site Walla.

Hefetz était devenu témoin de l’accusation après avoir été arrêté et interrogé pendant une période de deux semaines. Il aurait transmis aux procureurs des informations déterminantes en tant qu’interlocuteur faisant le relais entre Netanyahu et Shaul Elovitch, de Bezeq.
La Douzième chaîne a révélé que Hefetz pouvait avoir subi des pressions à l’aide de moyens illégitimes pour l’amener à se retourner contre Netanyahu. Elle a affirmé qu’une autre personne, sans liens avec l’Affaire 4000, avait été amenée par la police et questionnée afin de faire en sorte que Hefetz accepte de signer un accord avec les autorités et que ce dernier s’était exécuté suite à cette initiative prise par la police.
Il n’y a pas eu d’autres détails sur la personne concernée.
Lorsque Hefetz avait apporté son témoignage, à plusieurs occasions, il avait mis en doute sa mémoire, déclarant notamment que « les souvenirs que j’ai de mon interrogatoire et ce dont je me souviens exactement dans les faits se mélangent ».
Il aurait aussi indiqué à un autre moment que « la mémoire, ce n’est pas mon fort. Je ne suis pas à l’aise avec le long terme ».
Et quand Hefetz avait déclaré qu’une importante rencontre entre lui-même, Elovitch et Netanyahu avait eu lieu quelques jours avant les élections nationales de 2015, l’étude des téléphones portables des trois personnalités avait exclu la possibilité d’une telle réunion. Hefetz avait alors fait volte-face et dit que l’entretien entre les trois hommes pouvait avoir eu lieu plusieurs mois auparavant.

Selon le reportage, Hefetz était revenu à plusieurs reprises sur ses déclarations passées concernant certains détails, les modifiant au gré des informations contradictoires qui lui étaient présentées.
Mardi, Mandelblit a déclaré dans un communiqué que « s’il s’avère que des actions illégitimes ont eu lieu durant le traitement du dossier, le problème sera réexaminé et repris en compte en conséquence ».
Il a ajouté que les enquêteurs de police avaient établi clairement auprès des témoins qu’ils « sont dans l’obligation de ne dire que la vérité », et il a ajouté avoir la conviction que « les déclarations faites par les témoins de l’accusation ont été livrées librement et volontairement ».
Avi Himi, président de l’Association du bureau israélien, a appelé mardi à ce qu’une enquête soit ouverte suite aux accusations d’actes répréhensibles et que les résultats des investigations soient révélés au public.
« Il est impensable qu’une autorité chargée de l’application de la loi place un embargo sur des soupçons, sans même donner des explications au public… De tels comportements sont susceptibles d’endommager mortellement la confiance placée par le public dans le système judiciaire », a-t-il expliqué.
Vendredi, la Douzième et la Treizième chaîne ont fait savoir que Mandelblit organiserait des discussions, cette semaine, qui ont pour objectif de décider d’une éventuelle inculpation du Premier ministre Netanyahu dans trois dossiers pour corruption. Cette décision pourrait être prise avant la fin du mois de novembre.

Dans un acte d’inculpation émis au mois de février, Mandelblit avait souligné des accusations de pots-de-vin, de fraude et d’abus de confiance contre le Premier ministre dans l’Affaire 4000, et de fraude et d’abus de confiance dans l’Affaire 1000 et dans l’Affaire 2000.
Ces accusations criminelles n’entraveraient pas au niveau légal une éventuelle candidature de Netanyahu à sa réélection si l’Etat juif devait se diriger vers un nouveau scrutin dans un contexte d’impasse politique dans le pays, mais une bataille judiciaire suivrait probablement s’il devait être reconduit à ses fonctions.
Selon un reportage diffusé sur la Treizième chaîne, la semaine dernière, les procureurs ont commencé à rédiger un avis juridique recommandant l’inculpation de Netanyahu dans les trois dossiers suite à la fin de l’audience de pré-inculpation qui a eu lieu le mois dernier.
Les procureurs pensent que Mandelblit devrait conserver intactes les accusations originales proposées dans les trois cas, peu convaincus par les efforts de la défense durant l’audience, a annoncé le reportage.
Netanyahu, qui nie toute malversation, clame de manière répétée qu’il est la victime d’une chasse aux sorcières de la part des médias, de la police et des procureurs de l’Etat, dont l’objectif est de le déchoir de ses fonctions.
Vendredi, la Douzième chaîne a déclaré que Hefetz avait dit aux enquêteurs qu’Elovitch, en 2015, l’avait pressé de manière répétée de limoger le directeur-général du ministère des Communications de l’époque, Avi Berger, pour faire avancer les intérêts de son entreprise.

Berger était opposé à l’achat par Bezeq du fournisseur de télévision par satellite Yes auprès de l’Eurocom Group, propriété d’Elovitch. L’accord avait finalement été conclu et il aurait rapporté des centaines de millions de dollars à Elovitch.
Hefetz avait dit à la police qu’Elovitch avait « exercé de grandes pressions sur cette question. Il avait eu aussi des conversations avec moi sur le sujet – que Bibi devait limoger Berger… parce que c’était lui qui empêchait ça… C’était lui qui bloquait l’accord de Yes ».
Il était clair qu’Elovitch désirait que le message soit transmis à Netanyahu, avait ajouté Hefetz, qui avait indiqué avoir souvent servi d’intermédiaire entre la famille Netanyahu et Elovitch concernant la couverture des informations sur le site Walla, qui appartenait aussi à Elovtich.
Des témoignages, dans le dossier, ont indiqué que la couverture des actions de Netanyahu avait été changée et adoucie de manière répétée suite aux demandes émanant de la famille du Premier ministre.