Netanyahu: Pas d’état palestinien plein et entier, pas de « reddition » contre les otages
Le Premier ministre repousse la vision de la Maison Blanche, qui veut une solution à deux États, et la perspective d'un accord qui mettrait un terme à la guerre - sans pour autant exclure un état palestinien démilitarisé
Lazar Berman est le correspondant diplomatique du Times of Israël
Alors que l’administration du président américain Joe Biden réclame un ralentissement de la guerre à Gaza en plus de la perspective d’une initiative susceptible de mener à la solution à deux États à la fin des combats, le leadership israélien a présenté dimanche un point de vue aux antipodes de celui de la Maison Blanche concernant le lendemain du conflit à Gaza.
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a réaffirmé avec force, dans un message transmis par vidéo, sa détermination à ne pas laisser naître un état palestinien pleinement souverain et militarisé.
« Je ne ferai aucun compromis sur le plein contrôle qui devra être conservé par Israël, en ce qui concerne la sécurité, sur tout le territoire situé à l’ouest du fleuve Jourdain », a-t-il dit, répétant des propos encore tenus récemment.
« Tant que je serai Premier ministre, je continuerai à défendre fermement ce positionnement », a-t-il juré, se vantant d’avoir résisté aux pressions internationales et nationales exercées, au fil des années, en faveur d’une solution à deux États.
Netanyahu avait prononcé des paroles similaires, la semaine dernière, même s’il semble avoir toujours pris soin de ne jamais catégoriquement rejeter toutes les formes d’état palestinien.
S’exprimant après des informations qui avaient laissé entendre, mercredi, que l’administration Biden passerait outre le Premier ministre pour promouvoir une solution à deux États – et quelques heures après que le secrétaire d’État Antony Blinken a précisé qu’Israël ne pourrait pas jouir « d’une authentique sécurité » sans avancer en direction d’une solution à deux États dans le conflit israélo-palestinien – Netanyahu a déclaré qu’Israël devait conserver « le contrôle sécuritaire » sur tout le territoire situé à l’ouest du Jourdain dans le cadre d’un accord futur, quelle que soit sa forme.
Après s’être entretenu avec Netanyahu vendredi, Biden avait exprimé l’espoir de voir une solution à deux États mise en place avec un Netanyahu qui serait encore au pouvoir si l’état palestinien susceptible d’être établi était démilitarisé. Un reportage diffusé par CNN, le jour suivant, avait indiqué que Netanyahu avait dit à Biden qu’il n’excluait pas entièrement un état palestinien (un officiel américain a confirmé cette affirmation relayée par par CNN au Times of Israel).
Ce que le chef de gouvernement a rejeté également lorsqu’il a écrit sur X, anciennement Twitter, que « je ne ferai aucun compromis sur le contrôle intégral, par Israël, de la sécurité sur tout le territoire situé à l’ouest du Jourdain – ce qui est contraire à la perspective d’une souveraineté palestinienne ».
Toutefois, les propos tenus par Netanyahu, dimanche, semblent laisser la porte légèrement ouverte à un état palestinien démilitarisé.
Il a aussi rejeté l’idée que la conclusion d’un accord puisse finalement envisager de laisser le Hamas au pouvoir à Gaza, insistant sur le fait que l’État juif remportera « la victoire totale » et ajoutant que » « il n’y aura pas d’entité à Gaza qui financera le terrorisme, éduquera au terrorisme ou nous enverra des terroristes ».
Netanyahu a demandé que la bande de Gaza soit démilitarisée et placée sous le contrôle sécuritaire d’Israël.
Dimanche après-midi, le Wall Street Journal a rapporté que les États-Unis, l’Égypte et le Qatar poussaient Israël et le Hamas à accepter un plan global qui mettrait un terme à la guerre, qui permettrait aux otages maintenus en captivité à Gaza d’être libérés et qui mènerait, à terme, à une pleine normalisation des relations entre l’État juif et ses voisins et à des pourparlers portant sur l’établissement d’un état palestinien.
Dans sa déclaration filmée, Netanyahu a expliqué qu’Israël rejetait complètement les demandes de « reddition » du Hamas en échange de la libération des 136 otages qui se trouvent encore à Gaza.
« Jusqu’à présent, nous avons fait revenir 110 otages et nous sommes déterminés à tous les ramener », a dit Netanyahu. « Je travaille là-dessus sept jours sur sept et vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Mais soyons clairs : je rejette catégoriquement les termes de reddition dictés par les monstres du Hamas ».
Le Premier ministre a indiqué qu’en échange de la remise en liberté des otages, « le Hamas réclame la fin de la guerre, le départ de nos forces de Gaza et il nous demande de relâcher tous les meurtriers et tous les voleurs des forces Nukhba, le tout en laissant le Hamas intact ».
Netanyahu a ajouté que « si nous acceptons cela, nos soldats seront tombés au combat en vain. Si nous acceptons cela, nous ne pourrons pas garantir la sécurité pour nos citoyens. Si nous acceptons cela, ne pourrons pas faire rentrer chez eux nos évacués et un prochain 7 octobre ne sera plus qu’une question de temps. Je ne suis pas capable d’accepter ce coup qui serait fatal pour la sécurité israélienne et en conséquence, c’est quelque chose que je ne pourrais pas accepter ».
Le Premier ministre a expliqué qu’il avait fait part clairement de son positionnement sur la question à Biden quand les deux hauts-responsables ont échangé au téléphone, ce week-end.
Soumise aux pressions des progressistes américains et inquiète d’une possible escalade qui ferait sombrer le pays dans la guerre, l’administration américaine réclame, depuis plus d’un mois, que le conflit prenne fin « aussi rapidement que possible ».
Tandis qu’Israël a annoncé, début janvier, que l’armée était entrée dans une phase des combats nouvelle, moins intense, cela ne semble être effectivement le cas que dans le nord de l’enclave.
Le ministre de la Défense, Yoav Gallant, a indiqué dimanche que l’armée allait encore élargir son offensive terrestre à Khan Younès, dans le sud de l’enclave côtière.
« Nous sommes en train de mener une opération intensive dans le secteur de Khan Younès, une opération qui continuera à s’élargir », a dit Gallant après un survol de la bande de Gaza aux côtés du 100e Escadron de l’armée de l’air.
« Les nuages de fumée résultant des tirs des chars, des tirs d’artillerie et des frappes de l’armée de l’air continueront à recouvrir le ciel de la bande de Gaza, jusqu’à ce que nous ayons atteint nos buts et les principaux d’entre eux : la défaite du Hamas et le rapatriement des otages », a-t-il ajouté.
La guerre à Gaza a éclaté lorsque le Hamas a envoyé 3 000 terroristes armés en Israël, le 7 octobre, pour mener une attaque brutale au cours de laquelle ils ont tué près de 1 200 personnes. Les terroristes ont également pris en otage de 253 personnes, pour la plupart des civils, et les ont emmenées à Gaza. Israël a réagi en lançant une campagne militaire dont l’objectif vise à détruire le Hamas, à l’écarter du pouvoir à Gaza et à libérer les otages.
132 otages enlevés par le Hamas le 7 octobre dernier se trouveraient encore à Gaza – mais certains ne seraient plus en vie – après la remise en liberté de 105 civils au cours d’une trêve d’une semaine à la fin du mois de novembre.
Quatre otages avaient été libérées avant cela, et une soldate avait été secourue par l’armée israélienne. Les corps sans vie de huit otages ont également été retrouvés et trois otages ont été tués par erreur par l’armée le 15 décembre.
L’armée a confirmé le décès de 28 otages qui se trouvaient encore à Gaza, citant de nouveaux renseignements et autres informations obtenues par les militaires en opération sur le terrain, au sein de l’enclave côtière. Une personne est encore considérée comme portée-disparue depuis le 7 octobre et son sort reste indéterminé.
Le Hamas conserve aussi les dépouilles d’Oron Shaul et de Hadar Goldin, morts dans la bande en 2014. Il garde aussi en captivité deux civils israéliens, Avera Mengistu et Hisham al-Sayed, qui seraient encore vivants après être entrés dans la bande de leur propre gré en 2014 et en 2015 respectivement.