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Covid-19 : Pour les sans-abri, les asiles deviennent des refuges en Israël

Ceux qui vivent à la rue sont plus vulnérables au COVID-19, affirment les experts ; activistes et responsables gouvernementaux renforcent leurs aides

Un homme portant un masque pour se protéger du coronavirus, devant un sans-abri, près d'un centre commercial fermé à Jérusalem, le 23 mars 2020. (Crédit : Olivier Fitoussi / Flash90)
Un homme portant un masque pour se protéger du coronavirus, devant un sans-abri, près d'un centre commercial fermé à Jérusalem, le 23 mars 2020. (Crédit : Olivier Fitoussi / Flash90)

Il y a un mois, Ayel Levi était au plus bas. Ce natif de Tel Aviv âgé de 57 ans luttait alors contre des problèmes de santé mentale et vivait dans la rue lorsqu’un lit lui a été proposé dans un refuge local pour sans-abri, mis en place par l’organisation à but non-lucratif Lasova.

Le refuge devait initialement renvoyer ses résidents à l’extérieur durant la journée, les accueillant uniquement le soir. Mais, depuis le début des mesures de distanciation sociale décidées par le gouvernement et visant à endiguer la propagation de l’épidémie de COVID-19, les sans-abri sont désormais autorisés à rester au sein de l’établissement 24 heures sur 24.

« J’allais au parc ou dans toutes sortes d’endroits », confie Levi. « C’était avant le coronavirus. Maintenant, on reste à l’intérieur toute la journée. On ne sort plus. On a des jeux et une télé », raconte-t-il.

Les sans-abri comme Levy sont plus vulnérables à une contamination au coronavirus, selon les responsables de la santé – un fait qui a entraîné des efforts de protection particuliers à leur égard de la part des instances gouvernementales et des organisations caritatives, alors que les autres Israéliens, plus favorisés, se sont retranchés dans leurs habitations.

Image illustrative d’un sans-abri dormant dans le centre de Jérusalem, le 12 décembre 2014. (Crédit : Maxim Dinshtein / Flash90)

Les gens qui vivent dans la rue représentent « un groupe vulnérable parce qu’on ne s’occupe pas d’eux régulièrement et que, maintenant, ils passent également entre les mailles du filet », a noté le professeur Nadav Davidovitch, directeur de l’école de Santé publique au sein de l’université Ben-Gurion du Negev, lors d’un entretien réalisé jeudi avec le Times of Israël.

En plus des sans-abri, d’autres groupes qui passent du temps dans les rues, comme les prostituées, sont également « très menacées » et une intervention rapide du système des affaires sociales de l’Etat est nécessaire.

Heureusement, affirme Davidovitch, les responsables gouvernementaux se sont davantage penchés sur le problème au cours de ces derniers jours.

« Il y a un nouveau groupe de travail, au sein du ministère de la Santé, qui lance ce jeudi ses activités afin de réfléchir à la manière de travailler auprès de ces populations et, bien sûr, à la manière de travailler avec les réseaux qui interviennent régulièrement avec ces dernières, dans le but de tenter de collaborer pour mettre en place un plan », dit-il, ajoutant qu’il a compris que « les personnes sans citoyenneté vont dorénavant être testées et soignées, indépendamment de leur statut à la sécurité sociale ».

Interrogé sur les façons de protéger les sans-abri israéliens pendant la pandémie actuelle, le ministère de la Santé s’est refusé à tout commentaire, expliquant simplement que la prise en charge de cette population relevait de « la responsabilité du bureau des affaires sociales et des autorités locales » avec lesquels il coopère.

Selon Maha Matar, qui supervise les services pour les personnes qui vivent dans la rue au ministère des Affaires sociales, on compte environ actuellement en Israël 1 900 individus « qui habitent dans la rue » et qui reçoivent une aide d’une manière ou une autre du ministère.

Ils seraient par ailleurs environ 400 à être en-dehors de tout circuit de ce type et à tenter d’éviter les travailleurs sociaux gouvernementaux.

Des ambulanciers du service d’urgence du Magen David Adom portant des vêtements de protection à titre préventif contre le coronavirus conduisent une femme soupçonnée d’être porteuse du coronavirus au centre médical Shaare Zedek de Jérusalem, le 24 mars 2020. (Crédit : Yonatan Sindel / Flash90)

Le ministère fait la différence entre les « occupants des rues » et les sans-abri qui, dit-il, relèvent des compétences du ministère du Logement.

Les chiffres avancés contrastent fortement avec ceux de l’Association de défense des droits civils en Israël, qui a antérieurement déclaré que l’Etat juif comptait 25 000 sans-abri et que les services sociaux n’apportaient leur aide qu’à environ 10 % d’entre eux.

Pour être défini comme sans-abri par le ministère des Affaires sociales, il faut être âgé de 18 ans, vivre dans la rue et répondre à l’un de ces critères : avoir rompu tout lien avec la famille, se trouver dans un état physique ou psychologique instable, avoir été victime d’une maladie mentale ou physique, être toxicomane, être dans l’incapacité d’assumer la plus grande partie des exigences quotidiennes, avoir été victime de violences, ou se trouver dans l’incapacité de lutter pour améliorer sa situation.

Dans des conditions « normales », le ministère tente de localiser les personnes vivant dans les rues et de les convaincre de rejoindre leurs programmes. Il ne semble néanmoins pas que le ministère ait continué ce type d’activités depuis le début de la pandémie de coronavirus.

Refuges en quarantaine

Ces dernières semaines, tous les refuges du ministère ont été équipés de manière à pouvoir placer facilement en quarantaine les résidents en cas de nécessité médicale – avec une sorte de « pièce d’urgence dans laquelle les patients peuvent aller pour rester à l’isolement tout le temps nécessaire ».

Les nouveaux arrivants des refuges sont immédiatement placés à l’isolement afin de protéger les autres étant donné qu’ils « entrent dans la catégorie des populations vulnérables, la majorité d’entre eux ayant des antécédents médicaux ou ayant connu d’autres complications en matière de santé », explique le ministère.

À Tel Aviv, où se trouve la plus grande concentration de sans-abri en Israël, l’équipe chargée de prendre en charge ceux qui habitent dans la rue – une équipe composée de neuf travailleurs sociaux et de deux agents de terrain – fonctionne « à pleine capacité », indique la mairie dans un communiqué.

Cette unité effectue des « tournées pro-actives » dans des lieux tels que la gare routière centrale, délivrant des informations sur la pandémie et proposant aux populations vulnérables un endroit où dormir, dans l’un des refuges de la ville. Il y a actuellement trois établissements de ce type et l’ouverture d’un quatrième est actuellement envisagée, a précisé la municipalité.

Des sans-abri dorment dans le parc Levinsky à Tel Aviv, en 2012. (Crédit : Tamir Kalifa)

Au mois de décembre dernier, le contrôleur de la ville avait fait savoir que Tel Aviv manquait de personnels formés et de logements pour sa population de sans-abri, avait rapporté le journal Haaretz. L’année précédente, Yoav Ben-Artzi, employé municipal dont le département est en charge de la question des sans-abri, avait déclaré au journal israélien qu’il pensait que le ministère des Affaires sociales minimisait le problème à Tel Aviv et dans tout le pays.

Toutefois, tout le monde n’est pas convaincu que le problème soit aussi important que certains l’affirment.

Gil-Ad Harish est le président de l’organisation Lasova, qui a ouvert le refuge dans lequel réside actuellement Ayal Levi. C’est l’un des trois établissements gérés par cette organisation humanitaire. À eux trois, ils accueillent actuellement environ 125 personnes.

« À Tel Aviv, je parie qu’il n’y a pas plus de 200 personnes qui se trouvent aujourd’hui dans la rue plutôt que dans un refuge », dit-il, notant que son organisation tente de négocier avec la municipalité l’ouverture d’un autre asile réservé aux toxicomanes.

« Il y a de nombreux sans-abri qui se sont enregistrés en tant que tels mais qui ont d’ores et déjà été pris en charge et qui vivent quelque part après avoir trouvé une solution modeste – des amis, de la famille ou une colocation avec d’autres personnes. Ils sont néanmoins encore enregistrés comme étant sans-abri », explique-t-il.

Mais pour ceux qui sont encore à la rue, la pandémie représente une réelle menace, ajoute-t-il. La consommation de stupéfiants et d’alcool est susceptible d’affaiblir le système immunitaire, ajoute-t-il, et étant donné qu’un grand nombre de sans-abri ne respectent pas les mesures de base en termes d’hygiène, « ce sont des populations qui présentent définitivement le plus de risques ».

« Nous tentons de les pousser à rejoindre nos refuges ou nos hôtels », dit-il, ajoutant qu’il s’attend à voir le gouvernement renforcer ses efforts.

À Jérusalem, les autorités locales font preuve d’optimisme.

Fleur Hassan-Nahoum, membre du conseil municipal de Jérusalem, lors d’un rassemblement de solidarité avec les victimes présumées de Malka Leifer devant le tribunal de district de Jérusalem, le 13 mars 2019. (Crédit : Johanna Chisholm / Times of Israël)

« Nous ne rencontrons pas un problème terrible. Nous pensons qu’il y a une trentaine de personnes sans-abri dans la ville », explique Fleur Hassan-Nahoum, adjointe au maire, au Times of Israël.

Tandis que le refuge de la ville accueille actuellement 15 personnes et qu’il est dorénavant ouvert 24 heures sur 24, comme à Tel Aviv, la ville « ne recherche pas activement » pour le moment les sans-abri. Si une personne entre en contact avec les autorités et demande de l’aide, il – ou elle – sera pris en charge, mais « nous ne pouvons réellement pas nous mettre à la recherche » des sans-abri, parce qu’ils « se déplacent d’un endroit à un autre ».

« Il s’avère que notre définition des sans-abri est un peu plus étroite qu’à Tel Aviv », commente-t-elle, ajoutant que la ville considère qu’un individu est réellement sans-abri que s’il – ou elle – « est incapable d’agir de manière à pouvoir s’assurer un logement ».

Citant l’histoire d’une étudiante en médecine expulsée de son appartement par son propriétaire après s’être portée volontaire auprès de patients touchés par le coronavirus – elle a obtenu une aide de la municipalité – Hassan-Nahoum indique que de telles personnes ne sont pas considérées comme sans-abri du point de vue de la ville.

Actuellement, les activités de prévention visant à éviter que d’autres personnes ne deviennent elles-mêmes sans-abri semblent représenter une inquiétude significative dans la capitale.

« Nous pensons qu’à cause du coronavirus et de la perte d’emploi et de revenus de nombreux Israéliens, nous verrons une forte augmentation du nombre de gens que nous devrons aider parce que, le cas échant, ils se retrouveront à la rue », dit Hassan-Nahoum.

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Sue Surkes a contribué à cet article.

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