Royaume Uni : Des étudiants quittent un syndicat indifférent à l’antisémitisme
Les étudiants de l’Université de Warwick ont annoncé avoir quitté le syndicat suite aux conclusions d’une enquête indépendante ayant prouvé "l’inaction constante" du syndicat
Les étudiants d’une université britannique ont voté, vendredi, pour quitter l’Union nationale des étudiants du Royaume-Uni suite aux conclusions d’une enquête indépendante ayant conclu que cette dernière n’avait pas fait le nécessaire pour protéger des attaques antisémites ses membres juifs, ces dix dernières années.
Publiée le mois dernier, l’enquête a révélé que des étudiants juifs avaient été intimidés et même ostracisés au sein du syndicat en raison de leur judéité et de leurs opinions sur Israël.
Selon une information publiée par le Jewish Chronicle vendredi, l’Union des étudiants de Warwick a voté pour quitter l’Union nationale des étudiants (NDLT : NUS, en anglais).
« La NUS n’a pas protégé les minorités, avec son discours clivant, sa tolérance envers les abus et les discours de haine », peut-on lire dans la motion soumise aux étudiants, selon la source d’information.
« Warwick SU, comme tout autre syndicat étudiant national, devrait avoir une politique de tolérance zéro envers les sectarismes, quelle qu’en soit le motif, et exiger la même chose de ses élus et affiliés », précise la motion, qualifiant l’Union nationale des étudiants de « bras politique défaillant ».
« L’inertie de la NUS face aux accusations répétées de sectarisme et son indifférence envers les préoccupations des étudiants, illustrée par le faible taux de participation, a privé le syndicat de toute crédibilité auprès d’étudiants et politiciens de tous horizons, aux détriments de possibles revendications de la NUS du Royaume Uni », précise la motion.
En mai 2022, le Syndicat national des étudiants avait confié à la juriste Rebecca Tuck le soin de mener l’enquête suite aux plaintes déposées par une vingtaine d’anciens présidents du syndicat relatives à des faits d’antisémitisme au sein de l’organisation.
L’Union nationale des étudiants fédère plus de 600 syndicats étudiants, qui représentent au total plus de sept millions d’étudiants.
Les conclusions de Tuck ont été établies sur la base d’entretiens conduits avec 46 groupes et individus.
Selon elles, la discrimination envers les étudiants juifs s’est traduite par
« la circulation de tropes antisémites, la diffamation ou des allusions à une conspiration de la famille Rothschild ». On a également reproché aux membres juifs du syndicat les politiques israéliennes.
Les conclusions [de l’enquête] soulignent que la prise en charge des plaintes par l’Union nationale des étudiants a été inappropriée voire inexistante.
« Tout au long de ces dix dernières d’années au moins, les étudiants juifs ne se sont pas sentis les bienvenus au sein de la NUS lorsqu’ils n’ont pas été exclus des fonctions électives de la NUS. Il y a eu de nombreux cas d’antisémitisme au sein de la NUS », affirme Tuck dans son rapport.
Une étudiante anonyme citée dans le rapport déclare
« ne pas être entrée en politique étudiante pour ne pas parler que des questions juives, même si son action au sein du mouvement a finalement tourné autour de la défense des droits des étudiants juifs ».
« Une grande partie des problèmes et mauvais traitements auxquels j’ai été confrontée étaient liés à l’obsession du mouvement pour le conflit israélo-palestinien et mon lien supposé avec lui », ajoute l’étudiante.
Les conclusions sont assorties de 11 recommandations, parmi lesquelles une action de sensibilisation à l’antisémitisme destinée aux membres du syndicat et la fourniture de matériel éducatif sur l’antisémitisme et le conflit israélo-palestinien.
Dans un communiqué, le syndicat a déclaré que le rapport établissait « un compte rendu détaillé et particulièrement choquant de l’antisémitisme au sein du mouvement étudiant ».
« La lecture de ce rapport a été très difficile, pour nous tous, mais nous nous félicitons de sa clarté, qui va nous permettre d’agir sereinement contre l’antisémitisme », a fait savoir le syndicat.
« L’antisémitisme s’oppose à nos valeurs d’égalité et solidarité. Nous avons, par le passé, lutté sans ambages aux côtés des étudiants juifs. Nous devons collectivement lutter contre l’antisémitisme, sous toutes ses formes. »
Le Board of Deputies of British Jews a déclaré que les conclusions de l’enquête mettaient en évidence l’existence d’une « longue série d’échecs » de la part du syndicat, qui, selon lui, traitait les membres juifs
« avec apathie, dans le meilleur des cas, lorsque ce n’étais pas avec
hostilité ».
Le Board of Deputies of British Jews a appelé le syndicat à travailler avec l’Union des étudiants juifs « pour s’assurer que les recommandations du rapport soient effectivement mises en oeuvre ».
L’Union des étudiants juifs a qualifié le rapport de
« réquisitoire cinglant » et accusé l’Union nationale des étudiants d’avoir
« abandonné des générations entières d’étudiants juifs ».
« Cela confirme que les étudiants juifs ont été victimes de harcèlement et de discrimination, et que les plaintes pour antisémitisme ont été ignorées ou rejetées », a déclaré le président de l’Union des étudiants juifs, Joel Rosen.
« Il est essentiel que ce rapport donne lieu à des actions significatives et immédiates. »
En 2022, le gouvernement britannique avait cessé de travailler avec l’Union nationale des étudiants en raison des accusations d’antisémitisme.
Les Juifs du Royaume-Uni et les autorités ont enregistré 2 255 incidents antisémites au Royaume-Uni en 2021, chiffre le plus élevé de ces dernières années en Europe.
Ash Obel a contribué à la rédaction de cet article.