Sous les applaudissements aux César 2025, Jonathan Glazer persiste à dresser un parallèle entre la Shoah et la guerre à Gaza
Le réalisateur de « La zone d'intérêt » estime que le processus de déshumanisation qu'il montre dans son film est aujourd'hui à l'œuvre en Israël, qu'il accuse de « nettoyage ethnique » à Gaza

Après l’Oscar du meilleur film international reçu en mars 2024, le film « La zone d’intérêt », qui fait le portrait glaçant du commandant Rudolf Höss, sa femme Hedwig surnommée « la reine d’Auschwitz » et leurs enfants, goûtant aux plaisirs de la vie dans leur maison jouxtant le camp de la mort, a été récompensé lors de la 50ème cérémonie des César, vendredi 28 février, du César du meilleur film étranger.
Son réalisateur, le britannique juif Jonathan Glazer, absent de la cérémonie et représenté par un porte-parole, a accepté ce prix par un discours dans lequel il dresse encore un parallèle entre le génocide de plus de six millions de Juifs par les nazis pendant la Seconde Guerre mondiale, et la conduite israélienne de la guerre actuelle à Gaza, déclenchée par le pogrom meurtrier du Hamas le 7 octobre 2023.
Glazer avait provoqué un tollé l’année dernière lors de son discours de remerciement aux Oscars, dans lequel il avait comparé la « déshumanisation » de la Shoah et la guerre entre Israël et les terroristes du Hamas. « En ce moment, nous nous tenons ici en tant qu’hommes qui réfutent leur judéité et le détournement de la Shoah par une occupation qui a conduit à un conflit pour tant de personnes innocentes, que ce soit les victimes du 7 octobre en Israël ou l’attaque en cours sur Gaza », avait-il déclaré à l’époque.
Fidèle à sa prise de position aux Oscars, Glazer a déclaré à la cérémonie des César : « Le fait que tant de personnes soient venues voir notre film est extraordinaire, le fait qu’il soit autant d’actualité est alarmant ».
« Pour faire écho à ce que nous disions il y a un an, nous voulions que le film nous pose à tous, encore aujourd’hui, des questions sur la déshumanisation », a-t-il poursuivi en faisant une référence au discours qu’il avait prononcé aux Oscars.
« Aujourd’hui, la Shoah et la sécurité juive sont utilisées pour justifier les massacres et le nettoyage ethnique à Gaza… », a lu le porte-parole, interrompu par les applaudissements et les cris d’approbation du public, avant de reprendre : « …après les massacres du 7 octobre et la prise d’otage en Israël ».
Jonathan Glazer : « Aujourd’hui, la Shoah et la sécurité juive sont utilisées pour justifier le nettoyages ethnique à Gaza rendu possible par la déshumanisation. »#Cesar2025
César du Meilleur film étranger.— Café Littéraire ☕️ (@C_litteraire) March 1, 2025
Dressant un parallèle entre la Shoah et la guerre à Gaza, Glazer estime « qu’il s’agit dans un cas comme dans l’autre d’actes de terreur contre des innocents, rendus possible par la déshumanisation des personnes qui se trouvent de l’autre côté de nos murs ».
« C’est la zone d’intérêt », a-t-il conclu, faisant écho au titre de son film et à l’appellation utilisée pour décrire les 40 kilomètres carrés entourant Auschwitz-Birkenau, sur le territoire de l’actuelle Pologne.
Son discours s’est achevé sous les applaudissements de la salle.
En mars 2024, le discours de Glazer aux Oscars avait suscité un tollé. Une lettre signée par 1 200 Juifs d’Hollywood dénonçait ses propos. « Nous refusons que notre judéité soit détournée dans le but d’établir une équivalence morale entre un régime nazi qui a cherché à exterminer une race de personnes et une nation israélienne qui cherche à éviter sa propre extermination », pouvait-on lire dans la déclaration.
Dans la foulée, 150 artistes avaient signé une lettre de soutien au réalisateur dans laquelle ils affirmaient : « Nous sommes de fiers Juifs qui dénoncent l’instrumentalisation de l’identité juive et de la mémoire de la Shoah pour justifier ce que de nombreux experts en droit international, y compris d’éminents spécialistes de la Shoah, ont identifié comme un ‘génocide en devenir’. Nous rejetons le faux choix entre la sécurité des Juifs et la liberté des Palestiniens ».