S&P confirme la note de crédit d’Israël, met en garde contre des risques intérieurs et régionaux « persistants »
L'agence de notation indique que la croissance économique ralentira à 1,5 % en 2023 ; peu avant Netanyahu a promis que la réforme ne serait pas adoptée dans sa forme originale
L’agence de notation Standard & Poor’s (S&P) a confirmé la note favorable d’Israël à AA- avec une perspective « stable », mais a cité des « risques politiques et sécuritaires intérieurs et régionaux persistants » comme menaces potentielles pour l’économie dans son rapport trimestriel sur Israël, publié tard vendredi.
L’agence S&P Global Ratings, basée à New York, a déclaré que la perspective stable d’Israël « met en balance les risques politiques régionaux et nationaux élevés », dont les principaux sont les projets de réforme du système judiciaire, « avec l’économie résiliente du pays, sa solide balance des paiements et le niveau modéré de sa dette publique ».
L’agence a déclaré qu’elle s’attendait à « une certaine forme de consensus » sur le projet de réforme judiciaire actuellement suspendu, ce qui permettra « d’atténuer les tensions politiques ». Depuis des mois, Israël est le théâtre de manifestations hebdomadaires de plus en plus nombreuses contre les efforts visant à réformer radicalement le système judiciaire, qui comprennent des projets de loi visant à placer la plupart des nominations judiciaires sous contrôle politique et à affaiblir le contrôle exercé par la Cour suprême de justice sur le gouvernement. L’effort législatif a commencé en janvier et a été temporairement suspendu par le Premier ministre Benjamin Netanyahu à la fin du mois de mars, en raison de l’opposition croissante de l’opinion publique et du tollé provoqué par sa tentative de limogeage du ministre de la Défense Yoav Gallant, qui avait publiquement mis en garde contre ce projet.
S&P a déclaré que « l’incertitude politique actuelle » en Israël devrait durer des mois, car les protestations publiques contre les changements judiciaires proposés par la coalition persistent. Associée à un resserrement de la politique monétaire en raison de la persistance de l’inflation mondiale et de la baisse des performances économiques chez les principaux partenaires commerciaux en Europe et aux États-Unis, la croissance économique du pays devrait « ralentir à 1,5 % en 2023, contre 6,5 % en 2022 », a déclaré l’agence.
Si un consensus politique national plus large sur les changements judiciaires prévaut, la croissance économique d’Israël se redressera probablement pour atteindre une moyenne annuelle de 3,5 % à partir de 2024, soutenue par de solides performances dans le secteur diversifié de la high-tech d’Israël.
L’agence a cité les atouts d’Israël en matière de crédit, tels que son « économie riche et diversifiée », ses « paramètres monétaires flexibles et un réservoir d’épargne nationale relativement profond », mais a déclaré que les notations de crédit sont « limitées par la politique et la sécurité nationales et régionales persistantes », telles que l’actuelle flambée de violence avec les groupes terroristes basés à Gaza, et une flambée similaire en 2021 qui a conduit à un conflit de 11 jours.
Dans son rapport, S&P a esquissé différents scenarii pour la mise en œuvre des projets de réforme judiciaire, menés par le ministre de la Justice Yariv Levin. Si le paquet de reformes proposé va de l’avant dans sa forme actuelle, il « pourrait exacerber davantage la polarisation de la politique intérieure » et pourrait à l’avenir être annulé par les gouvernements suivants.
Si la proposition de reforme est rejetée dans son intégralité, les partenaires d’extrême-droite et ultra-orthodoxes de la coalition Netanyahu pourraient la juger inacceptable, ce qui pourrait entraîner « la démission du gouvernement et de nouvelles élections législatives ».
Le gouvernement de Netanyahu se concentre actuellement sur l’adoption du budget de l’État de deux ans avant la date limite du 29 mai. S’il n’y parvient pas, des élections anticipées seront organisées.
Notre scénario de base actuel suppose que les tensions intérieures élevées finiront par s’apaiser et qu’une certaine forme de consensus sera établie », a déclaré S&P, mais « l’incertitude actuelle est susceptible de peser sur la croissance à court-terme, selon nous ».
« Nous pourrions relever les notes si nous constations une réduction significative des risques politiques et sécuritaires au niveau régional et national », a déclaré l’agence.
Le mois dernier, Moody’s a abaissé la note de crédit d’Israël, évoquant une « détérioration de la gouvernance » et ébranlant le gouvernement Netanyahu.
Selon le quotidien économique Calcalist, le Premier ministre s’est fortement impliqué dans les discussions avec les représentants de S&P pour que l’agence de crédit confirme la note stable d’Israël. Selon l’article, Netanyahu a assuré aux économistes de S&P que la réforme judiciaire ne serait pas réalisée dans sa forme initiale.
Le président israélien Isaac Herzog, qui mène des négociations de compromis sur la réforme sans grand progrès, aurait également participé aux discussions.
Mercredi, le Fonds monétaire international (FMI) a averti que l’incertitude prolongée concernant la réforme du système judiciaire israélien présentait un « risque de détérioration notable » pour l’économie du pays.
« En l’absence d’une solution durable et politiquement viable, l’incertitude persistante pourrait augmenter considérablement le prix du risque dans l’économie, resserrer les conditions financières et entraver l’investissement et la consommation, avec des répercussions potentielles sur la croissance, également à plus long terme », a déclaré le FMI dans son rapport initial sur l’économie israélienne. « Réduire de manière permanente l’incertitude entourant la réforme judiciaire nécessite une solution politiquement durable qui est clairement communiquée et bien comprise tant au niveau national qu’à l’étranger. »
« Comme dans n’importe quel pays, le maintien de la force de l’État de droit est important pour le succès économique », a écrit le FMI.