Strouk fustigée pour avoir mis en doute la conduite des pilotes de Tsahal à Gaza
La ministre des Implantations a suscité l’indignation en demandant au conseil des ministres si certains soldats de l'armée de l'air ne manquaient pas à leur devoir par idéologie
La ministre d’extrême-droite des Implantations et des Missions nationales, Orit Strouk (HaTzionout HaDatit), se serait disputée avec un haut responsable militaire lors d’une réunion du cabinet dimanche, après qu’elle a mis en doute la conduite des pilotes de l’armée de l’air israélienne concernant l’appui aérien aux troupes au sol à Gaza.
« Est-il vrai que certains pilotes refusent de bombarder pour des raisons de conscience et ne soutiennent pas les forces terrestres ? », a demandé Strouk, dont les propos ont été relayés par de nombreux médias.
On ignore sur quoi porte précisément la question de Strouk, qui ne semble pas s’appuyer sur des preuves, l’armée de l’air ayant offert un soutien intensif et permanent aux forces terrestres au cours des mois de combat à Gaza.
Strouk a déclaré que de telles affirmations lui étaient parvenues « par le biais de témoignages sur le terrain ».
En réponse à Strouk, le ministre de l’Éducation Yoav Kisch a déclaré qu’il s’agissait d’une question délirante.
Le général de division Eliezer Toledano, chef du Directorat de la Stratégie de l’état-major général, a répondu en lui disant que c’était « une question horrible ».
« La réponse courte est qu’une telle chose n’existe pas », a affirmé Toledano, selon des fuites de la réunion.
« La réponse plus longue est que le niveau d’assistance aérienne aux forces terrestres dans la guerre est sans précédent. Je suis sûr que si vous posez la question aux commandants sur le terrain, vous obtiendrez la même réponse. »
Strouk s’est empressée de réagir. « Je peux poser toutes les questions que je veux. Ne portez pas de jugement sur mes questions. »
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a alors dit à Toledano que sa réponse à la question de la ministre était « la bonne réponse », mais, « en ce qui concerne la nature de la question, il n’est pas approprié que vous donniez à la ministre votre opinion sur sa question ».
Les propos de Strouk ont fait l’objet de vives critiques de la part de ses adversaires politiques, dont le chef de l’opposition Yaïr Lapid, qui l’a accusée « d’incitation honteuse » et a déclaré que sa question et la réaction de Netanyahu prouvent que « Tsahal et les citoyens d’Israël méritent un gouvernement différent ».
La députée Meirav Cohen (Yesh Atid), a également réagi sur X, pour dénigrer la question de Strouk, la qualifiant « d’incitatrice, de conspiratrice et de folle ».
« La réponse (qui est bien évidemment ‘non’) n’a plus d’importance car ce ballon d’essai d’incitation a déjà été lancé dans le monde et circule en ligne », a-t-elle ajouté. « Quelle déchéance morale et politique ! »
L’idée que les pilotes de l’armée de l’air israélienne sont des éléments distants et moins attachés à la sécurité nationale a fait son chemin dans les milieux de la droite radicale lors des manifestations contre le projet largement controversé de refonte du système judiciaire du gouvernement en début d’année, qui a divisé le pays dans les mois qui ont précédé l’assaut meurtrier du groupe terroriste palestinien du Hamas le 7 octobre.
Dans le cadre du mouvement de protestation contre la refonte judiciaire, des centaines de pilotes et d’autres réservistes des unités d’élite de l’armée israélienne avaient déclaré qu’ils refuseraient de servir dans des situations non urgentes, tandis que des milliers d’autres, issus de tous les secteurs de l’armée, ont suspendu leur service de réserve volontaire.
Cependant, lorsque le Hamas a attaqué le pays et que la guerre à Gaza a commencé, aucun média n’a fait état de pilotes ou d’autres unités d’élite de Tsahal refusant de s’enrôler, et l’armée a signalé des taux de participation bien plus élevés que prévu dans toutes les brigades.
Strouk n’est pas la première ministre à susciter la controverse en posant ce genre de questions. La semaine dernière, le ministre de l’Économie Nir Barkat (Likud) avait affirmé que les troupes au sol à Gaza étaient mises en danger parce qu’elles ne recevaient pas un soutien aérien suffisant.
« Le nombre de bombardements de l’armée de l’air a chuté de façon spectaculaire. Les soldats sont envoyés dans des bâtiments piégés comme des cibles faciles », a déclaré Barkat, qui est considéré comme un futur adversaire potentiel de Netanyahu à la tête du Likud.
Selon Barkat, il en résulte des tactiques qui « mettent inutilement en danger les soldats ».
Barkat n’a pas semblé suggérer que le problème venait des pilotes, mais plutôt que la pression internationale poussait les dirigeants israéliens à freiner les frappes aériennes.
Son affirmation a été immédiatement rejetée par de hauts responsables militaires et politiques.
Netanyahu s’était empressé de réprimander Barkat. « Le fait que vous continuiez à dire cela n’en fait pas une vérité. Il y a des considérations opérationnelles. »
Le porte-parole de l’armée israélienne, Daniel Hagari, a déclaré au sujet des remarques de Barkat que « tous les soldats de Tsahal sur le terrain qui ont besoin d’un soutien aérien, peu importe la mission, bénéficient de la protection adéquate ».
Dimanche, Barkat a publiquement critiqué la politique du gouvernement consistant à autoriser l’entrée de carburant et d’autres marchandises dans les territoires contrôlés par le Hamas. « Ce matin, 133 otages sont toujours détenus à Gaza par le Hamas. Pendant qu’ils sont là, l’État d’Israël continue de transférer des marchandises et du carburant dans les mains du Hamas », a-t-il déclaré aux journalistes avant la réunion du cabinet.
« Israël combat le Hamas d’une main et, de l’autre, envoie chaque jour des centaines de camions qui prolongent la vie du Hamas et lui permettent de continuer à combattre nos soldats. C’est absurde. Cela doit cesser aujourd’hui », a poursuivi Barkat.
« Il n’y a pas de précédent dans l’histoire d’un État qui combat un ennemi et lui fournit des biens et du carburant pour rester en vie », a-t-il ajouté.
Pendant la réunion, le ministre de l’Économie a également critiqué la politique concernant la frontière nord, affirmant qu’Israël risquait de « perdre le nord » et que les résidents de la frontière nord évacués ne pourraient pas rentrer chez eux si une « défaite définitive » n’était pas infligée au groupe terroriste chiite libanais du Hezbollah soutenu par l’Iran dans cette région.
« Les Iraniens jouent aux échecs et le cabinet de guerre [israélien] joue au backgammon », a déclaré Barkat en s’adressant à Netanyahu.
« Vous êtes bloqué dans des conceptions du 6 octobre », a-t-il accusé, en référence au mode de fonctionnement antérieur à l’attaque du Hamas.