Un rapport du médiateur de l’armée incrimine des commandants désobligeants
Le document du ministère de la Défense évoque notamment des cas où des soldats éthiopiens ont été victimes de racisme et d'autres ont été privés de soins médicaux
Judah Ari Gross est le correspondant du Times of Israël pour les sujets religieux et les affaires de la Diaspora.
![Des soldats israéliens se tiennent dans un abri anti-bombes pendant que la sirène avertit que des roquettes auraient été tirées de Gaza sur Israël à Kfar Aza le 12 novembre 2018. (Hadas Parush / Flash90) Des soldats israéliens se tiennent dans un abri anti-bombes pendant que la sirène avertit que des roquettes auraient été tirées de Gaza sur Israël à Kfar Aza le 12 novembre 2018. (Hadas Parush / Flash90)](https://static-cdn.toi-media.com/fr/uploads/2018/11/F181112HP54-640x400.jpg)
Le médiateur de l’armée israélienne a publié son rapport annuel pour l’année 2018 mardi, et y a documenté les milliers de plaintes de soldats pour traitement abusif par les commandants, dont certains sont accusés de racisme et de désobligeance.
Le rapport a été présenté au Premier ministre et ministre de la Défense Benjamin Netanyahu et à la puissante commission parlementaire des Affaires étrangères et de la Défense, ainsi qu’aux haut-responsables de l’armée israélienne.
Le document a été préparé par le médiateur par intérim le général de brigade Eitan Dahan et par son prédécesseur le général de division Yitzhak Brick, qui a terminé son mandat de 10 ans il y a quelques mois.
Durant l’année 2018, le bureau du médiateur a enregistré 6 749 plaintes déposées par des soldats israéliens ou leurs parents, un chiffre inférieur à l’année précédente, où un peu plus de 7 000 plaintes avaient été enregistrées. Sur toutes ces plaintes, 61 % ont été jugées justifiées et légitimes. Les autres se sont avérées fausses ou sans importance.
Le document, basé sur les plaintes écrites des soldats, les entretiens et les revues des compte-rendus des rapports militaires interne, est venu aux mêmes conclusions que les rapports du bureau du médiateur des années précédentes : les commandants ne parviennent pas, sciemment ou non, à prodiguer à leurs soldats les services requis par le protocole militaire ; les commandants s’expriment de manière non-professionnelle ou blessante à leurs subordonnés, parfois en public ; les équipes médicales ne parviennent pas à répondre aux besoins des soldats ; et une mauvaise gestion bureaucratique est présente.
« Le pire de [ces incidents dans lesquels des manquements ont été constatés] ont été les cas où des commandants ont empêché des soldats d’accéder à des soins, ce qui pourrait avoir des conséquences sur leur santé physique ou mentale », a écrit Dahan.
Dans l’un des cas, un commandant a empêché un soldat de rencontrer un spécialiste de la santé mentale avant qu’il ne remplisse un formulaire qui n’était pas obligatoire, et a libéré le soldat trop tard, de sorte qu’il a raté son rendez-vous.
L’armée a réagi au document en accueillant les critiques soulevées et en affirmant travailler sur les sujets mentionnés.
« Au cours des dix dernières années, l’armée a œuvré à l’examen et au contrôle interne des mécanismes afin d’améliorer de nombreux domaines. L’armée apprécie toutes les revues et les critiques destinées à améliorer son organisation et s’engage à apprendre de ces résultats afin d’en tirer les leçons et de corriger ce qui doit l’être », a déclaré l’armée dans un communiqué.
Le médiateur a également reçu des plaintes de la part de soldats issus de minorités, notamment des Ethiopiens, à qui des commandants se sont adressés « de façon raciste et blessante », bien qu’il a reconnu que le nombre de cas avait diminué ces dernières années.
Dans l’un des cas, le commandant a demandé à ses soldats éthiopiens devant tout l’escadron de « sourire pour qu’on puisse les voir dans le noir ».
Dans ce cas, les commandants en question ont été punis ou censurés par leurs supérieurs pour leurs propos déplacés.
Dahan a souligné que si le nombre de plaintes pour racisme avait diminué, il n’y a pas eu de baisse globale du nombre de remarques désobligeantes de la part des commandants.
Selon le médiateur par intérim, cette « violence verbale » et d’autres formes de comportement inappropriés prennent place sur les réseaux sociaux, et notamment via l’application de messagerie WhatsApp.
Dans l’un des cas, un soldat a envoyé par WhatsApp à son commandant un document de son médecin pour demander à s’absenter. Le commandant a transféré une copie du document médical à l’ensemble de l’unité du soldat. Ses camarades se sont moqués du soldat et l’ont accusé de prétendre d’être malade pour échapper à ses corvées en cuisine.
Lors d’une audience disciplinaire, le commandant a été jugé coupable d’avoir violé la vie privé du soldat en diffusé le document médical.
Dahan a également documenté certains cas de soldats qui se sont vus refuser des jours de congés auxquels ils avaient le droit en vertu du protocole militaire.
L’armée a reconnu le problème et indiqué qu’il était lié au fait que tous n’étaient pas au courant d’un changement de règlement datant de 2016, qui octroie aux soldats 18 jours de congés au lieu de 15.
« Le nombre de jours de congés pour les soldats en service militaire a augmenté. Les commandants et les ressources humaines sont chargées d’en informer les soldats et de s’assurer qu’ils utilisent ces jours de congé », a indiqué l’armée.
Le rapport de Dahan marque le retour de ce type de document rédigés par le bureau du médiateur, autrefois appelé agent militaire des plaintes, après que son prédécesseur Brick a utilisé sa plateforme pour mettre en garde contre les manquements au sein des forces terrestres de l’armée israélienne.
Durant sa dernière année en poste, Brick a mené une guerre contre l’armée, l’accusant de ne pas être suffisamment préparée à un scénario de guerre et de duper les dirigeants politique en leur faisant croire qu’elle l’était. Les responsables militaires avaient publiquement rejeté ses allégations, mais avaient néanmoins travaillé afin remédier à de nombreuses lacunes mises en évidences par le médiateur, lui même ancien commandant de char.