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USA : la Chambre des représentants codifie la définition – controversée – de l’antisémitisme

Le projet de loi exige des agences des droits civils d'adopter la définition de l'IHRA, approuvée dans le monde entier ; selon ses critiques elle restreint les critiques d'Israël

Le président de la Chambre, le républicain Mike Johnson, parle aux médias sur les marches de la Low Library sur le campus de l'université de Columbia à New York, le 24 avril 2024. (Crédit : AP Photo/Stefan Jeremiah)
Le président de la Chambre, le républicain Mike Johnson, parle aux médias sur les marches de la Low Library sur le campus de l'université de Columbia à New York, le 24 avril 2024. (Crédit : AP Photo/Stefan Jeremiah)

WASHINGTON – la Chambre des représentants des États-Unis a adopté à une large majorité mercredi, un projet de loi inscrivant dans la loi une définition populaire et controversée de l’antisémitisme.

La loi sur la sensibilisation à l’antisémitisme exige que les agences gouvernementales chargées des droits civils adoptent la définition de l’antisémitisme de l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste (IHRA), approuvée par des centaines de collectivités locales, d’entreprises et d’universités.

Cette définition a toutefois suscité de nombreuses critiques, car la plupart des exemples d’antisémitisme qu’elle contient impliquent des critiques à l’égard de l’État d’Israël, notamment le fait de le qualifier « de projet raciste ».

Le projet de loi est avancé à une période où les critiques à l’égard d’Israël, et leur possible qualification d’antisémitisme, font l’objet d’une attention particulière. Les manifestants des campements anti-Israel sur les campus à travers le pays ont émis des critiques sévères à l’égard d’Israël, certains utilisant un langage qualifié d’antisémite. L’adoption du projet de loi impliquerait que la définition serait utilisée lorsque des responsables traiteraient les plaintes d’antisémitisme sur les campus dans le cadre du Titre VI [en référence à la section de la loi interdisant la discrimination dans les programmes bénéficiant de financements fédéraux].

Les partisans du projet de loi affirment qu’il couvre toute les formes d’antisémitisme actuelles. Les opposants à la définition disent qu’il restreint les critiques légitimes à l’égard d’Israël.

Malgré ces critiques, le projet de loi a été adopté mercredi avec une large majorité de 320 voix pour et 91 contre. Les Républicains ont voté à 187 pour et à 21 contre, tandis que les démocrates l’ont soutenu avec 133 voix pour et 70 voix contre. Dix-huit députés se sont abstenus, répartis de manière égale entre les deux partis.

Une personne préparant une pancarte portant l’inscription « Intifada Revolution » lors d’un campement anti-Israël, sur le campus de l’Université de Washington, à Seattle, le 29 avril 2024. (Crédit : Lindsey Wasson/AP)

Une version identique est à l’étude au Sénat et, bien qu’elle n’en soit qu’à ses débuts, elle a toutes les chances d’être adoptée.

Parmi les opposants à la définition de l’IHRA au Congrès, on trouve le représentant de New York Jerry Nadler, le plus ancien démocrate juif de la Chambre des représentants.

« Un discours critique à l’égard d’Israël ne constitue pas à lui seul une discrimination illégale », a affirmé Nadler lors d’une audience qui s’est tenue mardi, rapporte l’Associated Press. « En englobant le discours purement politique sur Israël dans le champ d’application du titre VI, le projet de loi est trop large. »

Kenneth Marcus, président du Centre Brandeis pour les droits de l’homme et responsable des droits civils au ministère de l’Éducation sous l’administration Trump, a déclaré que le projet de loi, s’il devenait une loi, serait un outil utile pour les universités dans le contexte actuel.

« D’un point de vue fédéral, cette législation ne changera pas les pratiques actuelles, mais elle les renforcera », a indiqué Marcus dans un communiqué, notant que les administrations Biden et Trump ont toutes deux œuvré pour lutter contre l’antisémitisme dans les universités. « Peu d’universités américaines appliquent la définition de l’IHRA de manière cohérente dans les cas appropriés. Cette législation devrait mettre un terme à cela. »

Americans for Peace Now, un groupe pro-Israël, s’est inquiété dans un communiqué du fait que le projet de loi, s’il devenait loi, serait utilisé « comme un gourdin contre les millions d’Américains, y compris de nombreux Américains juifs, qui s’opposent aux décisions et aux actions du gouvernement Netanyahu », en référence à la conduite de la guerre contre le Hamas par le Premier ministre Benjamin Netanyahu.

Le président de la Chambre des représentants, Mike Johnson, un Républicain de Louisiane, a déclaré que l’adoption de la législation était une priorité, mais les votes « contre » des Républicains montrent à quel point il est difficile pour lui de contrôler les membres de l’extrême droite du parti, ainsi que la tendance croissante de l’extrême droite républicaine à reconsidérer et même à embrasser des tropes antisémites méprisés depuis longtemps.

Marjorie Taylor Greene, une Républicaine de Géorgie qui s’oppose régulièrement aux Républicains modérés, a déclaré qu’elle voterait contre le projet de loi parce qu’elle craint qu’il ne criminalise ce qu’elle considère comme une croyance chrétienne selon laquelle les Juifs sont responsables de la mort de Jesus, une croyance répudiée par de nombreuses dénominations chrétiennes traditionnelles. Parmi les autres députés d’extrême droite qui ont voté contre le projet de loi figure le député de Floride Matt Gaetz, qui a également voté récemment contre l’aide à Israël.

D’autres projets de loi visant à lutter contre l’antisémitisme et bénéficiant d’un soutien bipartisan sont actuellement examinés par les deux chambres du Congrès, dont l’un prévoit la création d’un poste de coordinateur chargé de surveiller et de combattre l’antisémitisme au niveau national, à l’instar de l’actuel envoyé du département d’État pour la lutte contre l’antisémitisme à l’étranger, un poste actuellement occupé par l’éminente historienne de la Shoah, Deborah Lipstadt.

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