1 famille sur 5 en-deçà du seuil de pauvreté et qui s’appauvrit encore, dit l’Etat
Plus de la moitié des Arabes israéliens sont encore considérés comme pauvres. Mais la pauvreté baisse chez les enfants, les seniors et les ultra-orthodoxes, selon un rapport du National Insurance Institute
Sue Surkes est la journaliste spécialisée dans l'environnement du Times of Israel.
Israël est encore le pays le plus inégal au point de vue économique dans le monde développé, selon des chiffres qui ont été publiés jeudi.
Le nombre de familles pauvres est en hausse, les plus défavorisés ne cessent de s’appauvrir et, tandis qu’environ seulement 14 % des Juifs sont pauvres, plus de la moitié des Arabes vivent sous le seuil de pauvreté – et ce taux ne cesse de croître.
Plus positif, la pauvreté a tendance à baisser parmi les enfants et les seniors, les familles monoparentales et la population ultra-orthodoxe, annonce le rapport annuel du National Insurance Institute sur la pauvreté.
Le Gouvernement a pris plusieurs mesures pour réduire les écarts de pauvreté, affirme le rapport, et ces dernières ont eu une incidence plutôt positive dans certains secteurs de la société.
Selon les définitions, une personne pauvre en 2015 — l’année couverte par le rapport – touche ainsi un revenu mensuel inférieur à 3158 NIS (823 dollars). Une famille pauvre de quatre personnes dispose de moins de 8 086 NIS (2 107 dollars) pour vivre, et une famille de huit membres a un revenu de moins de 13 139 NIS (3 423 dollars).
En 2015, il y a eu 460 800 familles pauvres en Israël, ce qui représente un total de 1 712 900 citoyens dont 764 200 enfants.
Cela représente une très légère baisse (0.3 %) de l’indice de pauvreté en comparaison avec 2015 (il est passé de 22 % à 21,7 %).
Cette baisse s’explique par un accroissement de l’emploi en particulier parmi les femmes arabes et les hommes juifs ultra-orthodoxes, et par une hausse des salaires due en large partie à l’augmentation du salaire minimum.
Les améliorations enregistrées au sein de secteurs particuliers de la société reflètent les mesures prises par le gouvernement, indique le rapport.
La hausse du salaire minimum mensuel au mois de juillet, qui est passé à 4 825 NIS (1 257 dollars) — une nouvelle augmentation à 5 000 NIS étant prévue au mois de janvier – s’est combinée à une hausse des embauches de 2,8 % qui a profité aux revenus moyens.
L’augmentation des allocations familiales – après une coupe en 2013 — a entraîné une baisse de 1 % de la pauvreté chez les enfants et chez les jeunes de moins de 18 ans. Conjuguée à une hausse des revenus du travail et à une baisse du nombre moyen d’enfants, cette augmentation a entraîné une chute de 5,6 % dans le pourcentage des familles ultra-orthodoxes juives vivant en dessous du seuil de pauvreté.
Les changements des aides sociales ont également profité aux familles dont un seul parent travaille, dont la présence parmi les populations vivant au-dessous du seuil de pauvreté a baissé de 1,6%.
La proportion de seniors parmi la population pauvre a connu une très légère réduction de 1,4 % (passant de 23.1 % à 21.7 %) en 2015, grâce aux hausses des prestations pour ceux qui bénéficient des soutiens de revenu comme cela a été introduit en 2015. Les résultats de ces hausses, ainsi que ceux des prestations supplémentaires qui sont comprises dans le budget 2017, seront plus visibles dans les futurs rapports sur la pauvreté, indique le NII.
Ne gaspillez pas : les idéaux ensevelis sous un tas d’ordures en Israël
Una augmentation des aides en faveur des handicapés, adoptée l’année dernière, et un nouveau schéma d’épargne en faveur des enfants qui commencera au mois de janvier – le gouvernement investira 50 NIS par mois et par enfant jusqu’à ce que ce dernier atteigne l’âge de 18 ans, une mesure rétroactive jusqu’en mai 2015 – devraient également avoir un impact positif, même si les bénéfices de cette dernière mesure ne seront observables qu’à long terme, lors de l’encaissement de l’épargne.
Le revenu mensuel brut pour une famille moyenne – comprenant les allocations et les paiements obligatoires – s’élève dorénavant à 18 674 NIS — 4,65 dollars (le salaire net de 15 431 NIS ou 4 020 dollars ayant fait un bond de 2,5 % par rapport à 2014).
Mais tandis que les salaires et les aides sélectionnées ont augmenté, les prestations générales globales n’ont pas été réévaluées depuis quatre ans. Ce facteur explique pourquoi les familles pauvres avec enfants se sont appauvries encore de 4 % (mesure de la distance entre le revenu moyen d’une famille pauvre et le seuil de pauvreté).
La raison d’une pauvreté accrue parmi les Arabes – la moyenne s’est élevée de 52,6 % de pauvres en 2014 à 53,3 % l’année dernière – n’est pas claire, indique le rapport au vu de la hausse des allocations familiales.
Une étude portant sur le revenu disponible des ménages, menée parmi 9 000 familles par le Bureau Central des Statistiques, a montré une baisse des revenus du travail dans ce secteur tandis que les chiffres transmis par les autorités fiscales montrent que l’emploi comme les salaires ont augmenté de façon concrète. Le NII suppose que cet écart peut être dû à un nombre insuffisant de personnes sollicitées dans le panel de sondés par le CBS.
Les prestations sociales et les avantages fiscaux ont permis de ramener le nombre d’individus vivant en-deçà du seuil de pauvreté de 26,8% à 19,6 %, explique le rapport, mais ce n’est pas suffisant pour qu’Israël abandonne sa position à la première place du classement des inégalités des pays de l’Organisation de Coopération et de Développement économique, où la moyenne de la pauvreté reste à 11.5 % de la population.
Le ministre des Affaires Sociales Haim Katz a déclaré à la radio militaire qu’il programmait de modifier le mode de détermination de l’octroi des prestations.
Le salaire moyen détermine actuellement le seuil de pauvreté mais pas le niveau des aides, a-t-il expliqué. Ces dernières se trouvaient indexées sur les prix à la consommation.
“Si nous parvenions à lier les soutiens aux revenus aux salaires moyens, nous sortirions immédiatement 187 000 personnes de la pauvreté”, a-t-il dit.
Gidi Kroch, président de Leket Israel, une ONG d’aide alimentaire qui a récemment mis en garde sur le vaste gaspillage de nourriture en Israël, dit que “c’est très triste de voir, année après année, la diffusion par le NII de son rapport sur la pauvreté avec plus ou moins les mêmes statistiques ».
Gilles Darmon ou le parcours d’une vie dédiée à la lutte contre la pauvreté
“Selon ce document, Israël est le plus pauvre de tous les pays occidentaux, avec les plus grands écarts entre les riches et les pauvres – une situation où les populations les plus vulnérables, les seniors et les enfants, souffrent le plus. Et cela ne correspond tout simplement pas à notre culture et à notre identité juives. Ce n’est pas notre manière de faire”, a-t-il dit.
“Toutefois, et même avec cela, il y a un vent qui se lève, celui du changement au sein du ministère des Affaires sociales. Le ministre demande des changements et l’aide alimentaire en fait partie pour la toute première fois. »
Le directeur de NII Shlomo Mor Yosef est, pour sa part, optimiste. Il déclare que les résultats des mesures prises au cours des deux dernières années pour réduire la pauvreté apparaîtront à l’avenir.
Un “rapport alternative sur la pauvreté” sur les populations les plus défavorisées et et l’insécurité alimentaire rédigé au début de la semaine par l’ONG Latet indique que la pauvreté coûte 48 milliards par an au Produit National But israélien.
Un investissement de 7.6 milliards de NIS pendant dix ans et la mise en oeuvre des recommandations émises dans le cadre de la Commission gouvernementale de lutte contre la pauvreté, dirigée actuellement par le numéro 3 de Koulanou Elie Alalouf, permettrait à Israël de revenir à la moyenne des pays de l’ECDE et ajouterait un apport de 132 milliards de NIS dans l’économie, explique l’organisation.
« Israël : pile, c’est la start-up nation, face, c’est la misère », déplore Alalouf