Irak : Après les exactions de l’EI, des milliers de Yazidis privés d’indemnisations
Interrogé par HRW, le parlementaire Majid Shingali a expliqué que ces retards sont dus aux longs délais qui accompagnent l'adoption du budget fédéral de Bagdad
Après avoir survécu aux exactions du groupe État islamique (EI), des milliers de Yazidis n’ont toujours pas perçu les indemnisations nécessaires pour reconstruire leurs maisons détruites et retrouver leurs villages dans le nord de l’Irak, a déploré mardi Human Rights Watch (HRW).
En août 2014, l’EI déferlait sur le mont Sinjar, foyer historique de la minorité yazidie. Des milliers d’hommes de cette communauté adepte d’une religion monothéiste ésotérique ont été massacrés. Les femmes ont été enlevées et vendues aux jihadistes qui les ont réduites à l’esclavage sexuel, et les enfants ont été embrigadés.
Des années après la mise en déroute de l’EI en 2017 en Irak, environ 200 000 personnes originaires du Sinjar, des Yazidis ou issus d’autres communautés, sont toujours déplacées et ne peuvent pas rentrer dans leur région où la reconstruction piétine.
« Les autorités irakiennes n’ont pas payé les indemnisations financières auxquelles des milliers de Yazidis et d’autres habitants du Sinjar peuvent prétendre pour les destructions et dommages causés à leurs propriétés par l’EI, mais aussi les batailles militaires » engagées par l’armée irakienne et une coalition internationale emmenée par Washington, déplore HRW dans un communiqué.
« Sans compensations, de nombreux Sinjaris n’ont pas les moyens financiers de reconstruire leurs maisons et leurs commerces. Retourner à la maison n’est tout simplement pas une option », a déploré l’ONG basée à New York.
HRW rappelle que de nombreux déplacés vivent dans des camps depuis 2014.
Quant à ceux qui ont fait le pari du retour au Sinjar, leur quotidien est marqué par « une situation sécuritaire instable, des services publics défaillants ou inexistants, notamment en matière d’éducation, de santé, d’eau et d’électricité ».
En février dernier, « un premier groupe de 420 femmes yazidies » a pu recevoir des compensations, grâce à une loi spécialement votée pour les familles ayant directement souffert des assassinats, enlèvements ou viols perpétrés par les jihadistes, a rappelé l’ONG.
Dans le cadre d’une autre loi sur les compensations au titre de dommages et violences causées par la guerre, environ 10 500 habitants du Sinjar ont déposé une demande. Si 5 000 procédures ont été validées, « pas une seule famille n’a reçu les fonds », a déploré HRW, citant un responsable de l’administration concernée.
Interrogé par l’ONG, le parlementaire Majid Shingali a expliqué que ces retards sont dus aux longs délais qui accompagnent l’adoption du budget fédéral de Bagdad. Mais HRW cite aussi une bureaucratie complexe et éreintante ainsi que des retards dans la délivrance de certaines autorisations administratives.