L’armée américaine ouvre ses portes aux personnes transgenres
Le Pentagone se donne un an avant de commencer à recruter des personnes ayant changé de sexe
L’administration américaine a mis fin jeudi à l’interdiction des personnes transgenres dans l’armée, une décision historique prise par le Pentagone pour favoriser le recrutement.
Les personnes transgenres pourront désormais servir ouvertement dans l’armée américaine et recevoir les soins médicaux appropriés de la part du système de santé militaire, a annoncé le secrétaire américain à la Défense Ashton Carter.
« C’est la bonne chose à faire pour notre peuple et pour notre armée », a indiqué Carter, invoquant la nécessité de ne pas « laisser des barrières non liées aux qualifications » empêcher l’accès de bonnes recrues à l’armée.
« Aujourd’hui, plus d’un tiers » des 500 plus grosses entreprises américaines dont Boeing ou Ford offrent une assurance-santé couvrant les personnes transgenres, a-t-il cité en exemple.
Le Pentagone se donne un an avant de commencer à recruter des personnes ayant changé de sexe.
Mais dès le 1er octobre 2016, les militaires déjà engagés nécessitant un traitement pour changer de sexe pourront l’obtenir des services de santé militaires, y compris une éventuelle intervention chirurgicale, selon le chef du Pentagone.
Les coûts seront minimes pour l’armée et représenteront une partie « minuscule » du volume total des dépenses médicales, a précisé Carter.
La décision du Pentagone concerne relativement peu de personnes, selon des chiffres cités par le secrétaire américain à la Défense.
Sur 1,3 million de soldats, il y aurait entre 2 500 et 7 000 personnes transgenres, selon une étude de Rand Corporation citée par Carter.
Human Rights Campaign, la plus importante des associations défendant les personnes transgenres, estime de son côté qu’elles sont environ 15 500 dans les rangs de l’armée.
Mais la décision s’inscrit dans un climat politique chargé, alors que certains républicains ont fait de la question des personnes transgenres l’un de leurs chevaux de bataille.
« Politique politicienne »
Fin mars, la Caroline du Nord a ainsi adopté un texte imposant l’utilisation des toilettes publiques correspondant au sexe biologique de naissance.
Onze Etats ont également attaqué une circulaire du président Obama enjoignant tous les établissements scolaires à laisser les élèves utiliser les toilettes de leur choix.
Le Pentagone et le président « donnent la priorité à la politique politicienne », a dénoncé le président de la commission des forces armées de la chambre des représentants, le républicain Mac Thornberry.
La sécurité nationale des Etats-Unis dépend de troupes « médicalement prêtes et déployables », et l’administration jusqu’à maintenant n’a pas prouvé au Congrès que les personnes transgenres « rempliront individuellement ces obligations », a-t-il regretté.
Les chefs militaires « soutiennent le calendrier fixé » pour l’application de l’ouverture aux personnes transgenres, a déclaré Carter, alors que des journalistes lui faisaient remarquer que le chef d’état-major inter-armées, le général Joe Dunford, n’était pas venu présenter la mesure avec lui.
Le Pentagone a rallongé les délais d’application initialement envisagés pour prendre en compte leurs demandes, notamment en termes de formation des troupes, a souligné Carter.
Le Pentagone préparait cette décision historique depuis un an. Le ministre de la Défense avait demandé à ses services d’étudier la question avec une présomption favorable.
Carter répète souvent qu’il veut ouvrir au maximum l’éventail de recrutement de l’armée américaine, pour pouvoir attirer les meilleurs talents. Il a notamment levé en janvier les dernières restrictions sur l’accès des femmes aux postes de combat.
L’administration Obama avait déjà donné le droit aux homosexuels de servir ouvertement dans l’armée en 2011, en abolissant la loi dite « don’t ask, don’t tell » (« ne rien demander, ne rien dire ») de 1993.
Selon Ashton Carter, au moins 18 pays autorisent déjà les personnes transgenres à servir ouvertement dans l’armée, dont le Royaume-Uni, Israël et l’Australie.