Le « héros juif » Natan Sharansly lauréat du prix Genesis 2020
L'ancien dissident soviétique devenu politicien israélien et chef de l'Agence juive, fera don de son prix et concentrera ses efforts sur la lutte contre l'antisémitisme

La Fondation du Prix Genesis a annoncé mardi le lauréat du prix 2020 et de la somme d’un million de dollars. Il s’agit de l’ancien dissident soviétique Natan Sharansky, pour « la lutte de toute sa vie pour les droits de l’Homme ».
« Cette récompense reconnaît l’extraordinaire lutte pour les droits de l’Homme, pour la liberté politique et les services rendus au peuple Juif et à l’Etat d’Israël », indique l’annonce, ajoutant que la remise du prix aura lieu à Jérusalem, le 18 juin 2020.
Sharansky rejoint le philanthrope Robert Kraft, l’actrice Natalie Portman, l’artiste Anish Kapoor, le violoniste Itzhak Perlman, l’ancien maire de New York Michael Bloomberg et le cinéaste Michael Douglas, également lauréats de ce prix, qui honore les individus inspirant la prochaine génération de Juifs à travers leurs accomplissements professionnels et leur engagement envers les valeurs juives et le peuple juif.
Isaac Herzog, actuel président de l’Agence juive pour Israël et directeur de la commission de sélection du prix, a décrit Natan Sharansky comme « un vrai héros juif et un être humain exceptionnel ».
Isaac Herzog est le successeur de Natan Sharansky, qui a dirigé l’Agence juive pendant deux mandats. Il s’agit de la plus grande organisation juive à but non lucratif du monde.
La commission du prix a déclaré que, selon la tradition suivie par les lauréats précédents, le vainqueur de cette année fera don de ce million de dollars à des organisations à but non lucratif.

Sharansky s’est dit « honoré » par cette distinction et a l’intention de profiter de ce temps en tant que lauréat pour parler de la recrudescence de l’antisémitisme et des efforts de délégitimation d’Israël.
« Ayant été élevé comme un Juif assimilé dans l’Union soviétique, j’ai découvert mon identité juive et mon appartenance au peuple juif grâce à Israël », a-t-il déclaré. « Ce lien avec Israël m’a donné, à moi et aux autres refuzniks, la force de nous battre pour les droits des Juifs et pour les autres peuples privés de leurs droits. »
« Aujourd’hui, alors que nous observons une montée de l’antisémitisme, provenant de la gauche et de la droite de l’échiquier politique, l’unité du peuple juif et notre lien à Israël est capital », a-t-il poursuivi. « Nous devons nous unir pour lutter contre la recrudescence de l’antisémitisme et les efforts de délégitimation d’Israël, en tant qu’un seul peuple ».
Sharansky, ancien prisonnier soviétique, a pu immigrer en Israël en 1986 après neuf ans passés en camp de travail et des mois de grève de la faim. Enfant prodige des échecs, il a gardé sa bonne santé mentale en isolement en jouant mentalement aux échecs. « J’ai joué à des milliers de parties, et je les ai toutes gagnées », avait-il raconté au New York Times en 1996, l’année où il a battu le champion d’échec Gary Kasparov.

En Israël, il est rentré en politique pour représenter les millions de Juifs d’ex-URSS qui l’ont suivi après la chute du communisme. Il a officié à la Knesset dans divers ministères et a représenté le Likud, parti de Benjamin Netanyahu en 2006, avant de prendre la direction de l’Agence juive.
Parmi ses efforts récents, on peut citer la recherche d’un compromis pour un espace égalitaire au mur Occidental et la demande d’une plus grande reconnaissance par le grand-rabbinat israélien des conversions effectuées par des rabbins officiant en dehors de l’État juif.
Sharansky a exposé ses expériences et ses idées dans trois livres qui ont chacun marqué les esprits. « Fear No Evil », devenu best-seller international, retrace ses mémoires sur la lutte pour l’émigration juive soviétique, son travail en faveur des droits de l’homme aux côtés d’Andreï Sakharov et sa survie dans les camps de prisonniers.
Dans « The Case for Democracy », il expose une philosophie diplomatique glanée dans sa compréhension intime du totalitarisme. Le livre a été cité par plusieurs dirigeants mondiaux.
Dans « Defending Identity », il explore les tensions entre le politique et la culture qui sont au premier plan de la politique européenne.

Le prix Genesis, surnommé le « Nobel juif », a fait l’objet d’une certaine controverse ces dernières années.
Il y a deux ans, l’actrice née en Israël Natalie Portman a refusé de venir à Jérusalem et de recevoir cet honneur parce qu’il devait être présenté par Netanyahu.
Elle avait annoncé qu’elle ne se rendrait pas en Israël pour la cérémonie de remise des prix, qui a ensuite été annulée. Portman a été accusée de soutenir le mouvement de boycott d’Israël, mais elle a déclaré qu’elle ne voulait pas être perçue comme soutenant Netanyahu.
La Genesis Foundation a par la suite décidé que la contrepartie monétaire du prix et une subvention supplémentaire d’un million de dollars offerte par le philanthrope israélien Morris Kahn seraient remis aux programmes d’autonomisation des femmes par l’entremise de la fondation.

La saga a été troublante pour la Fondation du Prix Genesis, qui dit qu’elle travaille dur pour empêcher que son travail philanthropique ne soit politisé.
Le lauréat de l’an dernier, Robert Kraft, était considéré comme un candidat beaucoup plus sûr, mais il s’est par la suite retrouvé impliqué dans un scandale de prostitution.
Le JTA a contribué à cet article.