Les Juifs réformés attendent des réponses alors que la Knesset reprend
Avec un nouvel accord de coalition, les Juifs non-orthodoxes d'Israël verront-ils d'autres annulations parmi les "réformes" nouvellement accordées ?
Amanda Borschel-Dan édite la rubrique « Le Monde Juif »
A première vue, 2016 avait l’air d’être une année record pour la communauté réformée juive. Le 31 janvier, le gouvernement avait adopté une décision acclamée et qualifiée d’ « historique, » promouvant la prière égalitaire au mur Occidental.
A peine quelques semaines plus tard, à la mi-février, la Cour suprême accordait aux mouvements réformistes et conservateurs d’Israël le droit à l’utilisation complète des mikveh d’Etat (bains rituels), une décision annoncée comme une « étape importante sur la voie de la pleine reconnaissance ».
Mais après que les verres de champagne ont été vidés, la communauté réformée juive s’est retrouvée dans une situation familière : alors que d’un côté le gouvernement donne, de l’autre, il tente de reprendre.
« Dans tous les cas, vous gagnez d’un côté et alors vous devez retenir votre souffle pour voir si ça va retourner à la Knesset pour voir si quelqu’un va essayer d’annuler votre succès en adoptant une loi pour tenter de l’empêcher », a déclaré Nicole Maor, avocate de premier plan du mouvement Réformé, le Centre d’action religieuse israélien.
Maor, qui traite en grande partie de l’aide juridique pour les immigrants, a déclaré au Times of Israel, lundi, qu’il n’est pas rare pour une « réforme » d’être suivie par des stratagèmes pour en retarder la mise en œuvre ou par une législation qui irait à l’encontre de la décision précédente.
« Ça a tout l’air du jeu du chat et de la souris », a déclaré Maor.
A titre d’exemple : après un tollé parmi les factions ultra-orthodoxes de la fragile coalition, le chef du personnel du Premier ministre Benjamin Netanyahu, David Sharan, a été chargé de former un comité pour examiner le compromis concernant le mur Occidental.
L’accord, un travail d’amour, de sueur et de larmes orchestré par le chef de l’Agence juive, Natan Sharansky, appelle à la construction d’un nouveau pavillon de prière permanent dans le parc archéologique Davidson, qui jouxte l’extrémité sud du mur Occidental.
Sharan, qui a été nommé secrétaire du cabinet le 23 mai, s’est vu attribuer 60 jours pour examiner le plan et rencontrer les différents acteurs impliqués dans la rédaction de l’accord. Il a jusqu’au 1er juin. Selon The Forward, seules une ou deux de ces réunions ont eu lieu.
Cette semaine, alors que le gouvernement redémarre avec l’ajout du nouveau ministre de la Défense Avigdor Liberman d’Yisrael Beytenu dans la coalition, il y a beaucoup de spéculations sur la façon dont, le cas échéant, les questions en suspens sur la religion et l’Etat seront affectées.
Selon l’article 36 de l’accord de coalition, un comité dirigé par le ministre du Tourisme Yariv Levin (Likud) sera créé pour discuter des questions de religion et d’Etat, composé de représentants des partis de la coalition. (Levin, on peut le rappeler, a été « boycotté » par les dirigeants réformistes après avoir déclaré à la mi-février que le mouvement représente un « monde mourant » qui a succombé à l’assimilation).
On a pu voir le comité Levin comme un forum dans lequel le parti de Liberman serait en mesure de contrecarrer les lois proposées par les ultra-orthodoxes, puisqu’aucun projet de loi sur l’État ou la religion ne peut progresser sans le soutien unanime des membres du comité.
D’un autre côté, la coalition devrait voter en bloc si ces projets de loi arrivaient jusqu’à la Knesset, une disposition qui va bientôt être testée puisqu’un projet de loi rejetant la décision de la Cour suprême d’ouverture des mikveh de l’Etat à des conversions non-orthodoxes est en cours de préparation.
La décision du tribunal a été décriée instantanément après son annonce, par le chef rabbin sépharade Yitzhak Yosef, qui a dit que la « décision malheureuse [de la cour] de permettre aux Juifs réformistes et aux conservateurs de s’immerger dans des mikveh destinés à servir l’ensemble du public est scandaleuse ».
Il n’est donc pas surprenant qu’un projet de loi visant à interdire l’usage aux non-orthodoxes ait été rapidement proposé par les membres du parti YaHadout HaTorah et fortement soutenu par Shas, parti fondé par le père de Yossef Ovadia. Le projet de loi a passé un premier vote du comité législatif le 14 mars. Le 6 juin, une réunion du comité de suivi aura lieu avant la première lecture de la loi à la Knesset.
Bien qu’il y ait des indications que certains bains rituels de l’Etat ont déjà commencé à autoriser des conversions non-orthodoxes, dans le cadre de l’accord de coalition nouvellement signé, dans le prochain vote sur une loi rejetant l’utilisation non-orthodoxe de bains rituels de l’Etat, Yisrael Beytenu doit voter en accord avec le bloc de la coalition à l’appui du projet de loi.
Dans une conversation avec le Times of Israel lundi, Maor de IRAC s’est montrée toujours optimiste pour un progrès pour les Juifs réformistes et conservateurs en Israël.
La semaine dernière, dans la foulée d’une décision généralisée du tribunal le 1er avril appelant à l’acceptation des conversions orthodoxes indépendantes en Israël, la Haute Cour a ordonné au bureau du procureur général d’expliquer pourquoi les non-orthodoxes convertis, dont les conversions ont été effectuées en Israël ne sont pas admissibles à la citoyenneté en vertu de la loi au retour.
Le nouveau gouvernement a 60 jours pour répondre.