Mayenne : Pose de deux Stolpersteine en mémoire de deux déportés juifs
Les deux pavés de la mémoire viennent rendre hommage à Levy Sztokman et Hersch Karez, arrêtés à Évron le 15 juillet 1942 puis déportés vers Auschwitz
À Évron, en Mayenne, deux pavés de la mémoire, des Stolpersteine, ont été posés ce mercredi en hommage à Levy Sztokman et Hersch Karez. Les deux hommes ont été arrêtés à Évron le 15 juillet 1942, puis incarcérés au camp de la ville, transportés à Angers et déportés vers Auschwitz.
La cérémonie, qui s’est déroulée à l’emplacement du camp où les deux hommes ont été détenus, est aussi venue commémorer les 80 ans de la déportation et l’extermination des Juifs.
Hersch Karez, envoyé au camp annexe de Jawischowitz, est décédé le 4 mars 1944. Levi Sztokman, envoyé au camp de Gusen, est mort le 1er avril 1945.
Joël Balandraud, maire d’Évron, Christophe Woehrle, président de l’association Stolpersteine, ont pris la parole lors de la cérémonie. Des membres de la famille des deux déportés, des personnalités civiles et militaires, la gendarmerie nationale, des associations patriotiques d’anciens combattants et des collégiens de Paul Langevin et des lycéens du Campus Orion ont aussi assisté à la cérémonie.
« Ils ont été transportés dans des camions au grand séminaire d’Angers, les familles séparées furent déportées par wagons à bestiaux, trois jours de trajets sans nourriture, sans eau, sans sanitaires… Sur les 824 personnes, il n’y eut que 20 survivants », ont déclaré les proches des déportés, a rapporté le site actu.fr.
[Partenariat Mémorial des déportés-Mayenne] Cérémonie d'hommage aux victimes du nazisme, Herch KAREZ et Lévi Sztokman, arrêtés parce que juifs le 15 juillet 1942 à Evron et déportés à Auschwitz par le convoi n°8.#Stolpersteine #archives #commémorer #transmettre #mémoire #Shoah pic.twitter.com/R8RsjTkWvD
— Ville d'Evron (@VilledEvron) November 30, 2022
La veille de la cérémonie, 371 collégiens et étudiants avaient assisté à la projection du film « Où est Anne Frank !« .
« Ce fut un honneur pour nous d’avoir pu parrainer ces pavés de mémoire », a déclaré un groupe de collégiens et étudiants. « Nous accueillons dans nos classes des Afghans, des Ukrainiens qui ont dû fuir leurs pays et nous sommes sensibles à l’importance de ces cérémonies. Que l’on soit noir, jaune, rouge ou blanc, que l’on soit juif, chrétiens ou musulman, il a toujours la même couleur, la même odeur, le sang ! »
Les élèves, parrains de ces pavés, reviendront sur place chaque année pour les polir et entretenir la mémoire. « On leur met à disposition un dossier pédagogique, c’est-à-dire qu’ils reçoivent des éléments des recherches effectuées en amont », a expliqué à France Bleu Christophe Woehrle. « Ce sont eux qui doivent retracer le parcours des victimes, donc il y a une proximité avec la victime, ce n’est plus qu’un nom, ça devient quelque chose de concret, on a même souvent des photos donc ça devient un visage et on leur explique que ça s’est passé chez eux et ça devient pour eux quelque chose de concret. »
En clôture de la cérémonie de mercredi, la chorale du conservatoire d’Évron a chanté les chansons « Erev Shel Shoshanim », « Hashivenue » et « Nuit et Brouillard ».
« Il ne s’agit pas juste de fabriquer des pavés et de les déposer », a indiqué Christophe Woehrle. « Il y a derrière tout ça toute la mise en œuvre de la recherche, ce qui faut faire pour mettre les informations sur les pavés et puis il y a la recherche des familles. »
Pour cette pose, il a reçu l’aide d’Elisabeth Dupleix, archiviste à Évron, qui a découvert l’existence d’un camp dans la commune. « Il a été construit au printemps 1940 pour accueillir d’abord les réfugiés de l’Aisne », a détaillé l’archiviste. « À l’arrivée de l’occupation allemande, il a servi de cantonnement à une partie des troupes allemandes et aux prisonniers français. À la fin de la guerre, il a été transformé en camp de prisonniers allemands, gardé par les Français. On ne sait pas comment M. Karez et M. Sztokman se sont retrouvés au camp, on suppose que c’est du fait de leur arrestation, ils ont séjourné quelque temps au camp et ils ont ensuite été déportés. »
Inscrits sur les pavés, « la première formule est toujours ‘Ici habitait’ et on met ensuite le prénom et le nom », décrit Christophe Woehrle. « On met également l’année de naissance, tout le parcours de déportation, avec la mention ‘Arrêté le’ puis les camps d’internement. »
Les poses de pavés de la mémoire sont régulières en France, comme partout en Europe.
Créés par l’artiste allemand Gunter Demnig, ils visent à rendre hommage aux personnes mortes dans les camps de concentration nazis. On compte aujourd’hui près de 85 000 pavés recouverts d’une plaque de laiton posés à travers 25 pays d’Europe depuis les années 1990.
Ils viennent rappeler le destin des victimes du nazisme, qu’elles soient Juives, Tziganes, homosexuelles, handicapées ou opposants politiques. Gravés à la main par le sculpteur Michael Friedrichs-Friedlander, ils sont généralement posés devant le dernier domicile des personnes, avant leur expulsion et leur déportation.
Fin 2020, la mairie de Paris avait refusé la pose de ces petits pavés de la mémoire dans les rues de la capitale, affirmant qu’ils n’étaient « pas adaptés au travail de mémoire parisien ».
En France, on trouve des pavés de la mémoire notamment dans les villes de Strasbourg, Bordeaux, Rouen ou encore en Vendée.