Meyer Habib, bientôt ambassadeur d’Israël en France ?
L’élu franco-israélien n’a pas réagi au "Mazel Tov" jugé antisémite lancé sur Twitter (puis supprimé) par Clémentine Autain, l’une de ses opposantes de la Nupes
Meyer Habib, député sortant de la 8e circonscription des Français de l’étranger, a réagi ce dimanche soir, dans un communiqué et sur le plateau de la chaine i24News, à l’annulation vendredi par le Conseil constitutionnel de son élection en juin 2022. Il a été reconnu que ses soutiens s’étaient livrés à des « irrégularités et manœuvres de nature à altérer la sincérité du scrutin ».
« Je suis forcément un peu abattu et un peu triste ce soir mais je suis encore bien debout », a déclaré le député. « Je vais décevoir un peu tous mes ennemis, mais ils n’ont pas encore tué Meyer Habib », a-t-il ajouté, se disant « fort et déterminé ».
Le parlementaire, apparenté LR et élu dans la 8e circonscription des Français de l’étranger, a dénoncé des « manipulations » de son opposante, Deborah Abisror de-Lieme (LREM), qu’il qualifie de « mythomane ».
« Hélas, les calomnies, les mensonges et les manipulations ont eu raison du choix libre de mes compatriotes qui m’ont élu député pour la troisième fois. Cette décision se base sur de faux documents », a-t-il ajouté. Il a aussi condamné une « décision politique » du Conseil constitutionnel.
Un nouveau scrutin doit être organisé dans les trois mois. N’étant pas été déclaré inéligible, il devrait se représenter, mais a déclaré qu’il était « trop tôt pour commencer une campagne ou annoncer [sa] décision, [qu’il donnera] dans les semaines à venir ».
Réaction à l’annulation de mon élection par le Conseil constitutionnel. pic.twitter.com/hJZmPdw7sV
— Meyer Habib (@Meyer_Habib) February 5, 2023
Meyer Habib pourrait aussi devenir ambassadeur d’Israël en France, remplaçant Yaël German, qui a annoncé son départ en raison de l’orientation politique du nouveau gouvernement. À l’approche de la décision du Conseil, il expliquait en effet que le Premier ministre Benjamin Netanyahu, son ami, lui avait par le passé proposé le poste et que, « si la France [l’]abandonne, [il n’excluait] rien ».
"Hélas, les calomnies, les mensonges et les manipulations ont eu raison du choix libre de mes compatriotes qui m'ont élu député pour la troisième fois. Cette décision se base sur de faux documents""@Meyer_Habib
#LePrime pic.twitter.com/lAtmD72NVI
— i24NEWS Français (@i24NEWS_FR) February 5, 2023
Lors de cette élection dans la 8e circonscription des Français de l’étranger, qui recouvre notamment Israël, la Grèce et l’Italie, le Conseil constitutionnel a relevé que « des sympathisants de M. Habib avaient, en méconnaissance des dispositions de l’article L. 49 du code électoral, diffusé le jour du second tour de scrutin sur divers réseaux sociaux des messages appelant à voter pour ce candidat ».
Il note aussi que « M. Habib avait mis en place des permanences téléphoniques et des centres d’aide mobilisant un nombre significatif d’opérateurs à destination des électeurs rencontrant des difficultés pour voter par voie électronique » et qu’à l’occasion de ces appels, « il a pu irrégulièrement être proposé aux électeurs de voter par internet à leur place ».
Pour le Conseil constitutionnel, « ces irrégularités et manœuvres ont été, au regard de l’écart de voix constaté au second tour, de nature à altérer la sincérité du scrutin ».
« La plus haute juridiction française met fin à des années de manœuvres illicites pratiquées par Meyer Habib », s’est félicitée sur Twitter Deborah Abisror de-Lieme, candidate au prochain scrutin.
Ma réaction suite à la décision d’annulation de l’élection législative de la 8e circonscription des Français de l’étranger par le Conseil Constitutionnel ???? pic.twitter.com/9denyeYQs9
— Deborah Abisror – de Lieme (@DeborahLieme) February 3, 2023
Une réaction de Clémentine Autain jugée antisémite
Après l’annulation de l’élection du député franco-israélien, Clémentine Autain, élue Nupes de Seine-Saint-Denis, s’est elle fendue d’un commentaire qui lui a valu une avalanche de critiques.
« Mazal Tov », a-t-elle ironisé sur Twitter, reprenant la formule hébraïque utilisée en guise de félicitations.
Aussitôt, de très nombreux internautes ont accusé la députée d’antisémitisme – ce dont est très régulièrement accusé son parti, la France insoumise (LFI), en raison de nombreuses déclarations ou actions dérangeantes.
« Imaginez qu’un député Nupes d’origine maghrébine voit son élection annulée et qu’une députée RN tweete ‘Inch Allah’. C’est ce qu’a fait Clémentine Autain avec Meyer Habib (que je ne porte pas du tout dans mon cœur) », a par exemple tweeté Julien Bouchet, élu à la ville de Clichy.
Face à cette avalanche de réactions, Clémentine Autain a rapidement tenté de rectifier le tir.
« Même si Meyer Habib ne parle que d’Israël et pour éviter que les mauvais esprits ne s’échauffent, je le dis dans toutes les langues de la 8e circonscription », a ajouté l’élue LFI, en s’exprimant en italien, en grec, en turc et en persan.
« Mon propos a heurté certains d’entre vous de bonne foi. Je préfère retirer mon tweet et éviter toute polémique inutile », a-t-elle finalement écrit, supprimant ses deux messages précédents.
Ce propos que vous effaçâtes était d’écrire Mazel Tov! pour saluer l’annulation de l’élection de Meyer Habib . Mon imagination est impuissante à décrire votre réaction si le député RN de Fournas avait salué d’un Mabrouk ! l’annulation d’un député d’origine musulmane.Exécrable. https://t.co/v4ADHdxy0B
— G-William Goldnadel (@GWGoldnadel) February 4, 2023
« Ce serait bien de considérer systématiquement la parole des concernés comme de bonne foi », lui a répondu le commentateur Rafaël Amselem, résumant une pensée largement partagée. « Ce n’est pas pour notre bon plaisir, ni pour le goût de la polémique, qu’on s’amuse à dénoncer le traitement calamiteux de l’antisémitisme au sein de LFI. »
Clémentine Autain et Meyer Habib ont toujours été vivement opposés idéologiquement. Par le passé, l’élu de droite a accusé son opposante d’antisémitisme et de complaisance face au terrorisme palestinien.
Droite radicale israélienne
Meyer Habib, 61 ans, homme d’affaires franco-israélien, est un proche du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu. Il a d’ailleurs appris la nouvelle de l’annulation de son élection alors qu’il l’accompagnait lors de sa visite à Paris, et a longtemps été l’un de ses relais en France, quitte à s’opposer aux positions diplomatiques de Paris.
Les deux hommes ne cachent pas cette amitié de longue date : pour les législatives de 2017, Benjamin Netanyahu, déjà Premier ministre, avait enregistré une vidéo de soutien, tout sourire à ses côtés, diffusé sur le compte Twitter du candidat.
Élu depuis 2013 dans la huitième circonscription des Français de l’étranger, Meyer Habib est réputé à l’Assemblée nationale pour relayer les éléments de langage de la droite radicale religieuse israélienne.
En 2022, il avait mêlé des rabbins à sa campagne des législatives.
Depuis novembre 2021, il est visé par une enquête pour « détournement de fonds publics » suite à un signalement de Tracfin, les enquêteurs soupçonnant des irrégularités dans la rémunération de ses collaborateurs parlementaires.
« Je me tiens évidemment à la disposition du parquet pour apporter tous les justificatifs ou documents utiles qui établiront la parfaite régularité de leurs situations et ma totale probité », avait-il réagi au moment de la révélation de l’enquête, en novembre 2022.
« S’agissant de prétendues irrégularités dans la campagne électorale, il s’agit de propos diffamatoires », avait-il assuré.