Mohammad Dahlane, en exil, prône un Gaza sans Hamas ni Abbas – New York Times
Dubaï et Ryad pourraient déployer des troupes et reconstruire Gaza, selon l'ancien chef de la sécurité de l'Autorité palestinienne à Gaza, qui convoiterait le poste de chef de l'AP
Lazar Berman est le correspondant diplomatique du Times of Israël
Un dirigeant palestinien indépendant soutenu par des gardiens de la paix arabes pourrait superviser la reconstruction de Gaza après la guerre entre Israël et le groupe terroriste palestinien du Hamas, a déclaré un éminent exilé palestinien et ancien homme fort dans une interview publiée mercredi.
Mohammad Dahlane, ancien chef de la sécurité de l’Autorité palestinienne (AP) à Gaza, a indiqué au New York Times qu’il pensait que « les dirigeants de l’Égypte, de l’Arabie saoudite et des Émirats [seraient] prêts à soutenir les processus visant à créer un État palestinien ».
Selon lui, le futur dirigeant palestinien reléguerait le président de l’AP, Mahmoud Abbas, à un rôle cérémoniel et pourrait demander à des pays tels que les Émirats arabes unis et l’Arabie saoudite de déployer des troupes et de financer la reconstruction de la bande de Gaza. De nombreux observateurs pensent que Dahlane convoite le poste pour lui-même.
Mais, « il faudrait cependant qu’Israël accepte la création d’un État palestinien », a-t-il ajouté. « Les principaux pays arabes sont très désireux de résoudre ce conflit. Pas seulement la guerre, mais le conflit dans son ensemble. »
« Pas d’Abbas, pas de Hamas », a ajouté l’ancien homme fort du Fatah. « De nouveaux visages à la tête de l’AP. »
Dahlane critique très ouvertement le Hamas depuis des dizaines d’années : « Compter sur la souffrance des gens, ce n’est pas diriger. Le peuple palestinien veut vivre. »

Au lendemain des Accords d’Oslo, les forces de sécurité de Dahlane ont opéré à Gaza d’une main de fer. Originaire de l’enclave de Gaza, il était à l’étranger lorsque le Hamas a pris le pouvoir par la force en 2007. Après s’être installé en Cisjordanie, il a été exclu du Fatah en 2011, accusé d’avoir empoisonné à mort l’ancien dirigeant Yasser Arafat.
Sa popularité potentielle en tant qu’alternative à Abbas a entraîné des tensions avec le dirigeant palestinien. En 2014, Dahlane a été condamné par contumace par l’AP pour diffamation et détournement de fonds.
Réinstallé aux Émirats arabes unis avoir été chassé du Fatah, il a été l’un des principaux conseillers du le président des Émirats arabes unis, Mohammed ben Zayed Al-Nahyane. Il est également resté actif dans la vie politique palestinienne. En 2017, il a négocié un accord entre l’Égypte et le Hamas pour maintenir l’approvisionnement en carburant de la centrale électrique de Gaza, faisant ainsi jouer son pouvoir diplomatique.
Des représentants de six pays arabes se sont réunis la semaine dernière en Arabie saoudite pour discuter d’un cessez-le-feu et de l’avenir de Gaza.
Dahlane a indiqué au New York Times qu’il essayait de convaincre le groupe terroriste palestinien du Hamas de céder la place à de nouveaux dirigeants palestiniens.

En octobre, Dahlan avait déclaré au magazine The Economist qu’une fois la guerre d’Israël contre le Hamas terminée, la bande de Gaza devrait être gouvernée par un gouvernement technocratique pendant deux ans, car il est « illusoire » de penser qu’une seule personne puisse prendre le pouvoir.
À la fin de cette période, qui devrait selon lui permettre d’unifier les factions palestiniennes divisées, des élections devraient être organisées sur la base d’un État palestinien, même si celui-ci n’a pas de frontières définies.
La question de savoir qui dirigera la bande de Gaza après le Hamas est particulièrement épineuse.
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a rejeté l’idée que l’AP dirige Gaza après la guerre, notamment parce qu’elle n’a pas condamné les atrocités commises par le Hamas le 7 octobre et parce qu’elle soutient financièrement les terroristes et leurs familles. Mais il n’a pas proposé d’alternative.

Il a également insisté sur le fait qu’Israël devait maintenir un contrôle sécuritaire sur l’ensemble de la zone située à l’ouest du Jourdain, ce qui laisserait un État palestinien, quel qu’il soit, moins souverain que celui qui pourrait y être créé.
Abbas et d’autres responsables de l’AP ont depuis longtemps accepté que leur futur État soit démilitarisé, et cela ne devrait donc pas poser problème à ce niveau.
Toutefois, la composition actuelle de la coalition de Netanyahu comprend des éléments d’extrême-droite qui sont encore plus hostiles aux Palestiniens que lui-même, poussant au déplacement massif des habitants de Gaza et appelant à la dissolution de l’AP. Déterminé à maintenir son gouvernement intact, le Premier ministre a évité de tenir des discussions sur la stratégie d’après-guerre, et encore moins d’accepter des concessions qui renforceraient la souveraineté palestinienne.
Cette position met Israël en porte-à-faux avec ses alliés.

En janvier, Netanyahu aurait rejeté une proposition du secrétaire d’État américain Antony Blinken, selon laquelle l’Arabie saoudite aurait normalisé ses relations avec Israël en échange de l’acceptation par Jérusalem d’offrir aux Palestiniens une voie vers la création d’un État.
La semaine dernière, un haut responsable de la Maison Blanche a déclaré qu’il n’avait « aucune confiance » dans le gouvernement Netanyahu, plus précisément en ce qui concerne sa volonté de prendre des « mesures significatives » en vue de la création d’un État palestinien, a rapporté le New York Times.
Un reportage de la chaîne NBC a également cité trois responsables de l’administration qui ont affirmé que celle-ci regardait au-delà de Netanyahu pour tenter d’atteindre ses objectifs dans la région, l’un d’entre eux ayant déclaré à la chaîne que le Premier ministre « ne sera pas là pour toujours ».
Depuis le 7 octobre, l’opposition à la création d’un État palestinien semble transcender les clivages politiques, certains membres du camp de la paix étant désillusionnés, tandis que d’autres estiment qu’une telle démarche constituerait une récompense pour les atrocités commises par le Hamas. Le président Isaac Herzog – de nature conciliante – a affirmé en décembre qu’aucun Israélien « sain d’esprit » n’envisage pour l’instant un processus de paix avec les Palestiniens.
Les États-Unis poussent également Abbas à réformer l’AP, notamment en lui donnant un rôle plus cérémoniel.
Au début du mois, des ministres de haut rang de l’Arabie saoudite, des Émirats arabes unis, du Qatar, de la Jordanie, de l’Égypte et de l’AP ont décidé, lors d’une réunion à Ryad, de présenter une vision politique commune pour la réhabilitation de la bande de Gaza et la création d’un État palestinien après la guerre entre Israël et le Hamas.
L’agence de presse officielle saoudienne (SPA) a rapporté que quatre diplomates de haut rang du Moyen-Orient ont réitéré leurs appels à des mesures « irréversibles » en vue de la reconnaissance d’un État palestinien au cours des pourparlers.
La plupart des pays arabes qui ont participé à la réunion ne souhaitent pas que le Hamas soit inclus dans la direction politique de Gaza après la guerre, mais ils pensent que le groupe terroriste palestinien parviendra à survivre sous une certaine forme et qu’un certain degré d’assentiment de sa part sera nécessaire pour faire avancer avec succès la réhabilitation de Gaza, a expliqué un diplomate au Times of Israel.
À la suite de l’attaque du 7 octobre, Israël a juré d’éliminer le groupe terroriste palestinien du Hamas, en lançant des frappes aériennes et une incursion terrestre qui aurait tué au moins 28 000 personnes, selon le ministère de la Santé dirigé par le Hamas à Gaza.
Les chiffres publiés par le groupe terroriste sont invérifiables, et ils incluraient ses propres terroristes et hommes armés, tués en Israël et à Gaza, et les civils tués par les centaines de roquettes tirées par les groupes terroristes qui retombent à l’intérieur de la bande de Gaza.
Tsahal dit avoir éliminé 10 000 terroristes palestiniens dans la bande de Gaza, en plus des quelque 1 000 terroristes qui ont pris d’assaut Israël le 7 octobre.
Jacob Magid a contribué à cet article.