Netanyahu interdit à ses ministres de se rendre au mont du Temple sans sa permission
Le Premier ministre rappelle le statu quo, mais la venue d'élus d'extrême droite témoigne d'une certaine clémence envers la prière juive sur place
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a dit à ses ministres, en préambule du Conseil des ministres dimanche, qu’il convenait désormais de lui faire part de tout projet de déplacement sur le site sacré du mont du Temple, à Jérusalem, et ce, suite à la venue d’un député d’extrême droite dans cette enceinte explosive dans la journée, alors même que les services de sécurité craignent une escalade majeure.
« Le Premier ministre a redit que les ministres ne pouvaient se rendre sur le mont du Temple sans son autorisation et que les demandes étaient à adresser à son secrétaire militaire », peut-on lire dans un communiqué du cabinet de Netanyahu.
Quelques heures plus tôt, le député Yitzhak Kroizer, membre du parti d’extrême droite Otzma Yehudit, s’était rendu sur le mont du Temple et depuis quelques semaines, la police laissait les Juifs y prier ouvertement, revenant en cela sur une pratique héritée d’un statu quo – non écrit -, en vertu duquel les Juifs ont accès aux lieux à certains moments et sous certaines conditions, à commencer par celle de ne pas prier.
Selon le cabinet du Premier ministre, Netanyahu aurait assuré les membres de son cabinet de sécurité que le statu quo n’avait pas changé, même s’il n’a pas fait grand chose pour empêcher les pratiques nouvellement autorisées sur le mont du Temple.
Le nombre de Juifs sur le mont du Temple a considérablement augmenté ces dernières années et les autorités ont eu tendance à y laisser faire la prière juive.
À la fin du mois dernier, un journaliste du Times of Israel avait lui-même été témoin de prières ouvertes et de prosternations sur le mont du Temple, et avait entendu des militants favorables à la prière en ce lieu saint dire que c’était devenu une habitude et que la police les laissait faire, jour après jour.
Le ministre de la Sécurité intérieure, Itamar Ben Gvir, par ailleurs chef du parti Otzma Yehudit, a effectué plusieurs visites publiques sur le mont du Temple depuis sa prise de fonctions en décembre 2022.
Il a déclaré à plusieurs reprises, ces dernières semaines et mois, que sa ligne consistait à autoriser la prière juive, en dépit des rappels de Netanyahu tenant au maintien d’un statu quo en place depuis plusieurs dizaines d’années.
Les propos de Netanyahu à ses ministres, ce dimanche, font également suite à une mise en garde de la part des autorités des services de sécurité sur les risques qu’une colère palestinienne sur la question du mont du Temple ferait courir pour Israël, en Cisjordanie comme à Jérusalem.
Très fortement investi sur le plan émotionnel, le mont du Temple, considéré comme le lieu le plus saint du judaïsme et le troisième lieu saint de l’islam, est souvent évoqué comme catalyseur des violences religieuses.
Lorsque le Hamas a lancé son attaque du 7 octobre contre Israël l’an dernier, qui a donné lieu à la guerre en cours, il a qualifié le pogrom d’ « Opération Al-Aqsa », nom en arabe du mont du Temple.
La mise en garde des services de sécurité, rapportée par la Douzième chaîne au cours du week-end, porterait particulièrement sur la période on ne peut plus sensible des jours précédant les Grandes Fêtes, propices à la venue de nombreux Juifs sur le mont du Temple, et ce alors même que l’Iran et ses mandataires font tout leur possible pour que la Cisjordanie se soulève, en lui fournissant de l’argent et des armes.
Dimanche matin, quelques heures après la diffusion de cette information et avant qu’un chauffeur de camion jordanien ne tue trois Israéliens dans un attentat terroriste au pont Allenby, entre la Cisjordanie et la Jordanie, le chef de l’opposition Yair Lapid a déclaré que cette mise en garde était « un drapeau rouge pour les forces de sécurité ».
« Si le gouvernement les ignore une nouvelle fois, alors les catastrophes qui se produiront seront de leur faute. Il faut impérativement faire le point avant les fêtes de Tichri et un gouvernement à la hauteur de l’événement », a-t-il écrit sur X.
L’armée israélienne a déjà alloué des ressources importantes à la Cisjordanie, ce qui ne fait pas taire les craintes d’une aggravation de la situation susceptible de requérir davantage de troupes encore, avec des conséquences négatives pour la guerre à Gaza, le front nord et la dissuasion contre l’Iran.
Lors d’un entretien avec l’ambassadeur américain Jack Lew dimanche, le président Isaac Herzog a rappelé « l’engagement sans équivoque d’Israël à préserver le statu quo sur le lieu saint ».
Un responsable des services de la présidence a par ailleurs fait référence, dans un communiqué, à la fois aux « accords politiques établis après 1967 » et à « l’esprit des décisions prises par les rabbins et personnalités religieuses de tout premier plan ces 100 dernières années ».
Certaines autorités juives orthodoxes interdisent depuis longtemps toute forme de présence juive sur le mont du Temple, de crainte de marcher sur une terre sainte tout en étant soi-même impur au regard de la loi religieuse.
Les communautés ultra-orthodoxes ont maintenu cette interdiction et leurs principaux rabbins ont dénoncé l’augmentation de la présence juive en ces lieux et la prière qui s’y pratique ouvertement.