Nouvelle coalition : réactions politiques en Israël
Les députés du 37e gouvernement d'Israël se sont exprimés suite à l'annonce du Premier ministre désigné, Benjamin Netanyahu
Les législateurs du gouvernement sortant ont réagi jeudi à l’annonce de Benjamin Netanyahu affirmant qu’il avait réussi à former une coalition, la plus à droite jamais vue en Israël, tandis que les alliés du chef du Likud ont salué ce développement.
Netanyahu a informé le président Isaac Herzog tard mercredi soir qu’il avait conclu des arrangements avec ses partenaires de coalition pour former le 37e gouvernement d’Israël, quelques minutes avant l’expiration de son mandat.
Le Premier ministre sortant, Yair Lapid, a déclaré que les leaders d’extrême-droite Itamar Ben Gvir et Bezalel Smotrich avaient « réussi à former le gouvernement le plus extrême de l’Histoire du pays ». Le bureau de Lapid a indiqué qu’il prévoyait de tenir une conférence de presse jeudi soir à Tel Aviv.
Le ministre sortant des Finances, Avigdor Liberman, a également déploré cette annonce, soulignant les aspects de l’accord de coalition qui ont été faits pour satisfaire les partenaires d’extrême-droite et ultra-orthodoxe du bloc de Netanyahu.
« Il a réussi à assembler un gouvernement des ténèbres. Il a réussi à promouvoir un État halakhique« , a tweeté Liberman jeudi.
« Il a réussi à donner la priorité aux étudiants en yeshiva sur les soldats de Tsahal. Il a réussi à créer une ségrégation sexuelle sous les auspices de la loi. Il a réussi à enterrer la vision de [Theodor] Herzl et [Zeev] Jabotinsky », a écrit Liberman.
« Et maintenant, nous devrons réussir à combattre tout cela avec détermination et persévérance et promettre espoir et lumière aux citoyens d’Israël », a déclaré Liberman.
Le député principal de Yesh Atid, Ram Ben Barak, a réitéré la croyance largement répandue selon laquelle les partenaires de la coalition de Netanyahu avaient exigé une « preuve initiale de bonne foi » de ce qui leur avait été promis lors des négociations de la coalition, nécessitant des accords et des lois ratifiées, en raison du passif du leader du Likud de revenir sur ses accords avec ses alliés politiques.
« Malgré tout le formidable soutien que vous avez reçu, aucun de vos partenaires ne croit un seul mot de ce que vous dites et exige chaque engagement écrit en trois exemplaires », a-t-il écrit, s’adressant à Netanyahu. « Le compte à rebours vers l’effondrement total a commencé. »
La députée Yesh Atid, Michal Shir, a moqué l’annonce de Netanyahu mercredi soir : « Je l’ai fait », soulignant la mainmise que les partis de la coalition entrante attendue avaient pendant leurs négociations.
« Bibi se méprend – ils l’ont fait », a-t-elle tweeté, en utilisant le surnom de Netanyahu.
Cependant, un certain nombre de législateurs du Likud n’ont pas tardé à féliciter leur chef de parti, malgré les rumeurs de mécontentement de la semaine dernière dues au manque de portefeuilles disponibles pour les fidèles de Netanyahu après qu’il a satisfait les demandes des partis Shas, Yahadout HaTorah, HaTzionout HaDatit, Otzma Yehudit et Noam.
« Mes félicitations au chef du Likud et Premier ministre élu Netanyahu qui a informé le président ce soir qu’il avait réussi. Un gouvernement national stable sera bientôt établi en Israël », a tweeté Nir Barkat, législateur principal du Likud.
« Mes félicitations au Premier ministre Benjamin Netanyahu et à nos partenaires de coalition pour avoir mené à bien la tâche de former un gouvernement. Avec l’aide de Dieu, d’ici mercredi, nous voterons la législation à la Knesset et immédiatement après, nous formerons un gouvernement. Nous l’avons fait », a écrit Yoav Kisch, du Likud.
Smotrich a tweeté « tout vient à point, nous l’avons fait », et Ben Gvir a fait allusion au miracle de Hanoukka « au nom des miracles actuels ! ».
Conformément à la loi israélienne, le président de la Knesset, Yariv Levin, annoncera l’accord de coalition lors de la session législative de lundi. Après cela, Netanyahu aura sept jours pour faire prêter serment à son gouvernement, bien que certaines sources du parti disent que cela devrait avoir lieu avant la date limite du 2 janvier.
Le Likud sera le parti le plus important de la nouvelle coalition du Premier ministre désigné. Toutefois, il sera tributaire des partis d’extrême-droite Otzma Yehudit, HaTzionout HaDatit et Noam, ainsi que des partenaires ultra-orthodoxes de longue date, le Shas et Yahadout HaTorah, pour conserver sa coalition majoritaire de 64 sièges à la Knesset, qui en compte 120 au total.
Bien que les partis appelés à revenir au pouvoir après un an et demi dans l’opposition soient largement dépendants les uns des autres, les partenaires de Netanyahu ont obtenu des concessions de grande envergure, tant sur le plan politique que sur celui des nominations, qui entraîneront une réforme du système judiciaire, pourront modifier les structures de commandement des services de sécurité, auront un impact sur la vie des Palestiniens, légaliseront et étendront rétroactivement les implantations, introduiront l’influence de l’extrême-droite dans l’enseignement laïc et étendront l’influence de la religion sur l’État et les institutions sociales.
Outre les portefeuilles et les changements de financement et de contrôle, trois changements législatifs très controversés et accélérés ont été exigés par les alliés de Netanyahu comme conditions sine qua non pour prêter serment au gouvernement annoncé.
Une tentative d’étendre le contrôle politique sur les forces de police par le futur ministre de la Sécurité nationale, Ben Gvir, leader du parti d’extrême-droite Otzma Yehudit, a été critiquée par le bureau de la Procureure générale pour ne pas avoir suffisamment équilibré l’indépendance de la police et l’autorité ministérielle.
Smotrich fait pression pour modifier la Loi fondamentale quasi-constitutionnelle qui sous-tend le gouvernement israélien, afin de permettre sa nomination en tant que ministre indépendant au sein du ministère de la Défense, chargé des implantations de Cisjordanie et de la construction palestinienne. Smotrich est partisan de l’annexion de la Cisjordanie, où vivent environ 500 000 résidents d’implantations israéliens et près de 3 millions de Palestiniens ; ce poste lui donnerait un contrôle sans précédent sur leur vie quotidienne.
Les critiques ont déclaré que sa nomination à ce poste sensible et les promesses de la coalition de légaliser les implantations illégales pourraient conduire à une annexion de facto et « brisera » les chaînes de commandement de l’armée.
Aryeh Deri, du Shas, exige également une modification de la même Loi fondamentale afin de pouvoir devenir ministre, malgré sa récente condamnation avec sursis pour fraude fiscale – sa deuxième condamnation, obtenue dans le cadre d’une négociation de peine après avoir convaincu le juge de son intention de se retirer de la vie politique.
Le nouveau gouvernement a également déclaré son intention controversée d’accroître le contrôle politique sur le système judiciaire. Trois projets de loi clés, actuellement en cours d’examen, prévoient l’adoption d’une clause dite « dérogatoire » permettant à la Knesset de rétablir toute loi invalidée par la Cour suprême, de placer les nominations judiciaires sous contrôle politique, par opposition à la commission de sélection des juges, et de scinder le rôle du Procureur général, qui est actuellement à la fois le chef du parquet et le conseiller juridique du gouvernement.
Le Likud a également déclaré qu’il envisageait de transformer les conseillers juridiques des ministères en postes de confiance, ce qui signifie qu’ils seraient embauchés et licenciés selon la volonté politique. Actuellement, les conseillers juridiques du gouvernement sont subordonnés au Procureur général, afin de préserver l’indépendance de leurs conseils.
Netanyahu est jugé dans trois affaires de corruption. Il nie les accusations et affirme que les accusations sont le produit d’une chasse aux sorcières à motivation politique. Alors que lui et certains de ses alliés ont publiquement nié que les réformes annoncées auront un impact sur les procédures judiciaires, d’autres y voient un lien évident.
La Procureure générale, Gali Baharav-Miara, a averti que la réforme judiciaire, ainsi que le blitz législatif en cours, pourraient faire d’Israël « une démocratie qui en aurait le nom, mais pas l’essence ».
Le changement de gouvernement marque un changement de ton majeur par rapport à la coalition sortante de grande envergure dirigée par les Premiers ministres Naftali Bennett et Yair Lapid, dont la coalition plurielle s’est unie en 2021 pour chasser Netanyahu après 12 ans de pouvoir, mais qui s’est effondrée après moins d’un an, déchirée par des dissensions internes.
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Carrie Keller-Lynn a contribué à cet article.