Quand un jeune de moins de 30 ans rêve de bâtir dans le Néguev pour les moins de 30 ans
Initiative Noah espère fournir des logements abordables et développer la périphérie d'Israël grâce à un plan audacieux pour établir un nouveau quartier dans la ville d'Ofakim
Un groupe de jeunes de Tel Aviv a un plan pour réduire la crise du logement en Israël et, en même temps, développer les périphéries négligées du pays. Le plan, explique Ben Topor de l’Initiative Noah, est de s’établir, en tant que communauté, dans la ville isolée d’Ofakim, dans le Néguev.
« Nous réfléchissions à créer un nouveau mouvement qui résoudrait ce problème et nous avons trouvé la solution à Ofakim », continue Topor. « Donc l’idée était de fonder une organisation qui pourrait construire un nouveau quartier, qui fournirait des logements pour les jeunes mais, dans le même temps, développerait le pays ».
Les coûts du logement en Israël sont parmi les plus élevés au monde lorsqu’on compare les salaires et le coût de la vie, et acheter un appartement ou une maison dans le centre du pays, densément peuplé, est hors de portée pour de nombreuses personnes.
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Le prix des appartements a augmenté de 6,23 % par an depuis 2006. Acheter une maison en Israël coûte maintenant environ 148 mois de salaire, contre 76 en France ou 66 aux Etats-Unis. Un appartement de trois chambres à Tel Aviv coûte, en moyenne, 3 148 852 shekels (733 742 euros), et un acompte pour un appartement moins cher peut monter jusqu’à 400 000 shekels. Dans le même temps, les loyers ont augmenté de 60 % depuis 2008, avec un pic de 72 % à Tel Aviv. Plus de deux millions d’Israéliens sont en location, sur une population de huit millions.
Le problème a atteint un stade critique pendant les manifestations pour plus de justice sociale en 2011, quand des jeunes Israéliens ont campé dans des tentes sur le chic boulevard Rothschild à Tel Aviv, et à travers le pays, pour protester contre les prix du logement. Plus de 400 000 personnes avaient fini par rejoindre le mouvement.
Ben Topor, maintenant âgé de 28 ans, étudiait l’économie et l’Asie du Sud-Est à l’université de Tel Aviv pendant les manifestations, après un service de six ans dans le département de recherche de la direction du renseignement de l’armée israélienne.
Il a rédigé une dissertation sur la manière dont les jeunes et les nouvelles villes peuvent nourrir l’économie d’un pays, explique-t-il, et, avec des amis, il a eu l’idée assez osée d’établir une nouvelle ville à la périphérie d’Israël pour fournir des logements plus abordables destinés aux jeunes.
Ils ont baptisé ce projet « Initiative Noah ». « Noah » signifie « confortable » en hébreu [pratique aussi], faisant référence au désir du groupe de vivre confortablement en Israël. En outre ils ont commencé à élaborer le projet au Café Noah de Tel Aviv. Le nom rappelle également le Noah (Noé) biblique, et leur espoir d’attirer des jeunes couples, deux par deux, au sein d’une nouvelle communauté, précise Topor.
Il a présenté l’idée à ses amis et à ses connaissances du service militaire, puis a rencontré des fonctionnaires du gouvernement.
“Ils nous ont virés des réunions”, se souvient Topor.
Après avoir reçu son diplôme, Topor a trouvé du travail chez Cukierman Investment House à Tel Aviv [qui appartient à Edouard Cukierman, le fils de l’ex-président du Crif, Roger Cukierman]. La firme était impressionnée par son esprit entrepreneurial, acquis en partie grâce à Initiative Noah. Topor a grandi dans une famille d’entrepreneurs, explique-t-il. Son père était un inventeur aux multiples brevets, dont celui du mode ‘veille’ des ordinateurs.
Il a commencé comme analyste chez Cukierman en 2012 et dirige maintenant la branche de l’entreprise consacrée aux technologies vertes. La firme se concentre sur les investissements à l’étranger, surtout en Europe, aux Etats-Unis et en Chine.
Les compagnies industrielles israéliennes dans certains secteurs, comme celui des technologies vertes, ont souvent du mal à trouver des investisseurs, qui sont généralement très spécialisés et situés en dehors d’Israël, analyse Topor, qui figurait sur la liste de Forbes Israël « les 30 de moins de 30 ans » cette année.
Cukierman aide ces compagnies israéliennes à établir une stratégie et à trouver des connexions à l’étranger pour les investissements et les fusions-acquisitions.
« En Israël, vous avez beaucoup d’investissements, mais c’est principalement dans le cyber, principalement dans la technologie et la communication, de sorte que pour les entreprises israéliennes dans le secteur industriel, dans les technologies propres, c’est plus difficile de lever des fonds sur les marchés internationaux », a déclaré Topor. « En Israël, il y a beaucoup d’innovation, mais ils ne disposent pas des sponsors nécessaires pour financer ces entreprises. »
Topor, qui a étudié le chinois, indique que la Chine est surtout intéressée par des investissements dans l’acquisition d’entreprises matures et dans les industries traditionnelles comme l’agriculture, en partie pour atténuer le ralentissement de l’économie chinoise. Le fonds Cukierman’s Catalyst investit dans des sociétés israéliennes qui peuvent convenir à ce modèle pour le marché chinois.
Son travail dans les technologies vertes chez Cukierman l’aide désormais à développer Initiative Noah. Le plan maintenant n’est plus d’établir une ville entièrement neuve, mais de construire un nouveau quartier d’environ 1 100 unités de logement adjacentes à la petite ville de Ofakim, qui a une population d’environ 24 000 personnes, dans le nord du Néguev.
Initiative Noah a réalisé l’opportunité lorsque ses membres ont découvert qu’une gare étaient en cours de construction dans la ville et que la zone autour de la gare était relativement ouverte au développement.
« Nous profitons d’une d’opportunité qui n’existait pas jusqu’à présent. Il n’y avait aucun lien entre le train et le sud. Le nord du Néguev n’était pas connecté jusqu’à l’année dernière, alors maintenant il y a la possibilité de faire la navette entre le Néguev et le centre si quelqu’un veut travailler à Tel Aviv », a déclaré Topor.
Ils veulent que ce soit une communauté verte, a expliqué Topor. La communauté prévoit d’utiliser une infrastructure d’eau qui utilise des eaux usées, par exemple, et le quartier sera organisé pour que les résidents puissent se déplacer la plupart du temps à pied.
Il y aura 774 appartements et 330 maisons dans la communauté, que l’on appellera le quartier Noah. Les appartements se vendent pour une moyenne de 650 000 shekels (environ 150 000 euros). Les plans ont été approuvés récemment par le gouvernement et les organisateurs travaillent avec la municipalité de Ofakim. Ils espèrent commencer la construction dans environ un an, si tous les permis de construire sont obtenus d’ici là.
Les logements dans la périphérie sont relativement abordables désormais, a déclaré Topor, mais Initiative Noah prévoit que le quartier sera une communauté jeune et établie.
« L’ampleur est ce qui est innovant », a déclaré Topor. « Nous sommes un très grand groupe de jeunes adultes, des centaines. C’est une partie d’une communauté qui s’installe ensemble donc il y a beaucoup d’excitation ».
Environ 600 personnes se sont déjà inscrites pour s’installer dans la communauté, et elles commencent désormais une campagne de marketing financée. L’âge moyen des personnes qui ont signé est de 28 ans, et environ la moitié viennent du centre du pays.
Au début, il y avait des inquiétudes sur le fait d’attirer des jeunes du centre du pays vers la périphérie, où il y a moins de sorties culturelles qu’à Tel Aviv. Le plan pourrait être à peu près comparable à un groupe de jeunes de Manhattan, déménageant en masse dans la campagne de Pennsylvanie. L’idée de se déplacer en tant que communauté et de construire quelque chose a intéressé les gens, cependant, a déclaré Topor.
« Maintenant, du fait de la gare, les gens acceptent l’idée de vivre à une heure du centre, de sorte que même si une personne travaille à Tel Aviv et veut avoir la qualité de la vie nocturne, le train le permet. C’est à une heure de Tel-Aviv et à 15 minutes de Beer Sheva, l’arrêt de train suivant », a déclaré Topor.
Le logement abordable est la principale attraction pour la plupart des gens, mais les objectifs à long terme prévoient d’aider des communautés plus isolées dans des périphéries comme Ofakim. Le site d’Initiative Noah montre une citation de David Ben-Gourion, qui parlait souvent de ses grands espoirs pour le développement dans le Néguev.
« L’objectif principal est d’aider les jeunes adultes à trouver un logement abordable, mais le deuxième but est de développer Israël, pour aider les lieux à la périphérie qui ont besoin de jeunes et de sang frais », a déclaré Topor.
Certaines personnes qui ont signé vivent déjà à Ofakim et ont été inspirées par le projet pour rester dans la région, a expliqué Topor. Les résidents actuels sont intéressés par la valeur sociale et économique ajoutée que ce déménagement pourrait apporter à la région, et Topor n’a entendu aucune inquiétude concernant des préoccupations sur une hausse possible des prix des logements dans la région ou sur des inconvénients potentiels pour les gens qui y vivent déjà.
Pour la majeure partie, les premiers résidents feront les allers-retours vers Tel-Aviv ou Beer Sheva pour le travail, mais à terme, la communauté prévoit d’héberger un incubateur pour les technologies vertes et pour aider à développer le Néguev en général.
« Nous avons pensé à attirer des entrepreneurs dans les technologies vertes, comme l’eau, l’agriculture et les énergies alternatives, parce que nous pensions que le Néguev est une très bonne plateforme pour ces technologies. Le temps est beau, le soleil est parfait pour les innovations solaires », a déclaré Topor.
Il y a aussi un intérêt pour l’étranger à investir dans la communauté, y compris depuis la Chine.
Topor dit que leur modèle, en cas de succès, pourrait être mis en œuvre partout.
« Cela pourrait être une preuve du concept pour le reste des zones de la périphérie », a-t-il dit.
Originaire de Tel Aviv, il dit qu’il serait honoré de déménager vers le Néguev lui aussi.
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