Reconstruction à hauts risques de l’emblématique Tour de David à Jérusalem
Un reportage de la Douzième chaine montre la délicate et complexe restauration de ce site, situé à la porte de Jaffa, dans la Vieille Ville de Jérusalem
David est le fondateur et le rédacteur en chef du Times of Israel. Il était auparavant rédacteur en chef du Jerusalem Post et du Jerusalem Report. Il est l’auteur de « Un peu trop près de Dieu : les frissons et la panique d’une vie en Israël » (2000) et « Nature morte avec les poseurs de bombes : Israël à l’ère du terrorisme » (2004).

Ces derniers mois, les experts ont retiré le sommet de l’emblématique Tour de David, à Jérusalem, pour le reconstruire, avec un mélange de pierres neuves et de pierres d’époque.
Dans le reportage diffusé vendredi soir sur la Douzième chaine, les autorités ont révélé les détails des délicats travaux de restauration, effectués aussi discrètement que possible dans cette structure qui domine la porte de Jaffa, dans la Vieille Ville.
Les travaux ont été lancés de crainte que la Tour, vieille de 400 ans, ne s’effondre, ses deux derniers mètres ayant un urgent besoin de réfection.
Les travaux de restauration et reconstruction ont été d’autant plus délicats que, bien que le complexe de la Tour de David – également connu sous le nom de citadelle de David – ait livré des découvertes archéologiques datant de la période du Premier Temple, et bien qu’il s’agisse d’un symbole israélien considéré, à tort, comme lié au roi David, la Tour est en fait le minaret d’une mosquée construite dans le complexe à l’époque ottomane, il y a de cela 400 ans.
Cette Tour faisait partie d’un projet d’expansion de la citadelle initié par le sultan ottoman Soliman le Magnifique, qui a également restauré les murs de la Vieille Ville.
(La mosquée a été utilisée jusqu’en 1917, lorsque le général britannique Allenby a, depuis la citadelle, dans la Vieille Ville, déclaré prendre Jérusalem.)
Les pionniers sionistes ont adopté la citadelle, avec sa tour, comme symbole laïc de « puissance et d’espoir », par opposition au mur Occidental, éminemment religieux, explique Eilat Lieber, directrice du musée de la Tour de David.
Sa silhouette devient rapidement incontournable, que ce soit sur les cartes postales ou les menorot, en passant par les aliments et les vins.
Dans le reportage de la Douzième chaine, Lieber explique, à propos de ces travaux, que tous les organes de sécurité israéliens sont intervenus, parfois pour en demander le report « après le Ramadan, après la journée de Jérusalem, après la journée de la Nakba », de crainte d’un regain de tensions dans la Vieille Ville, très sensible, ou à Jérusalem-Est.
« Au final, nous nous sommes dit : ‘Si nous ne réparons pas la Tour et qu’il se passe quelque chose, ce sera encore pire… Il nous faut le faire’ », confie-t-elle.

Les inquiétudes entourant la stabilité de la Tour sont corroborées par le responsable de la tour de Pise, explique Lieber.
L’expert en ingénierie de l’Université de Padoue met en effet en garde contre le risque d’effondrement de la Tour, dont la dernière restauration remonte à l’époque mandataire, lorsque la pointe a été remplacée par du béton.

Yossi Vaknin, expert en protection et restauration de l’Autorité des antiquités d’Israël (IAA) à la tête du projet, explique que les entretoises en fer chargées d’assurer la cohésion des pierres de la Tour se sont élargies au fil du temps et des intempéries.
Les pierres se sont fissurées et usées, déstabilisant la structure, particulièrement au sommet.
« Elle s’effrite sous nos yeux », affirme Vaknin à la caméra, dans un reportage tourné au sommet de la Tour en 2022, donnant à voir les morceaux de fer boursouflés, les fissures et les pierres cassées.

« Vous démontez une icône de Jérusalem ? », lance à Vaknin le journaliste de la Douzième chaine.
« C’est pour sa survie », rétorque Vaknin.
La partie supérieure de la tour a donc été retirée. Un nouveau sommet a été construit à Shfaram, dans le nord d’Israël, en mélangeant pierres d’époque, prélevées sur le segment retiré, et pierres plus récentes.
La partie reconstruite est alors traitée pour lui donner « une apparence ancienne, authentique », et ressembler à l’original, précise Vaknin.

Lieber confie avoir mal vécu la (brève) période de travaux durant laquelle la Tour était sans sommet, même si elle savait pertinemment que c’était prévu.
« Je dois avouer que c’était perturbant, pour moi aussi. Je travaille ici au quotidien… Soudain, la tour n’avait plus de tête. Je savais que c’était prévu, mais c’était perturbant. »
Un employé musulman explique qu’au moment des travaux, les réseaux sociaux arabes fourmillaient de théories du complot affirmant à tort que « l’Autorité des antiquités d’Israël, les dirigeants juifs, les dirigeants ennemis mettaient à bas notre passé, celui de l’histoire musulmane ». Il ajoute : « je suis fier de ce que je fais » parce que c’est absolument nécessaire.

Selon le reportage, le nouveau sommet de la Tour a été installé en décembre dernier grâce à un matériau à base de basalte pour cimenter les pierres.
Le reportage permet de voir toutes les étapes de la restauration, avec en point d’orgue le remplacement du fleuron métallique ornemental au sommet de la Tour.

« J’ai passé beaucoup de nuits blanches sur ce projet », confie Vaknin, mais finalement, les travaux se sont déroulés sans problème.
Vaknin confie que le séisme de Turquie et Syrie, début février, lui « a vraiment fait sentir la mobilité du sol sous [s]es pieds », alors qu’il reste des travaux à finir à la citadelle.

Les échafaudages qui ceinturaient encore la tour ont été retirés la semaine dernière.
Ce week-end, le complexe de la Tour de David a été pris d’assaut par les visiteurs, mais les abords de la Tour sont restés fermés au public.
Selon le personnel du complexe, la Tour devrait prochainement rouvrir au public.