Smotrich veut des « zones sans Palestiniens » autour des implantations de Cisjordanie
Selon le ministre des Finances, qui impute la montée de la violence à des "activistes de gauche", certaines récoltes d'olives doivent cesser afin de réduire les frictions
Le ministre des Finances Bezalel Smotrich a demandé lundi l’interdiction pour les Palestiniens de récolter des olives à proximité des implantations israéliennes de Cisjordanie, et a plaidé pour la création de zones d’interdiction « stériles » interdisant la présence de Palestiniens à proximité des implantations et des principales routes qui y mènent.
Dans une lettre envoyée au Premier ministre Benjamin Netanyahu et communiquée aux médias, le membre d’extrême-droite du cabinet, qui est également ministre délégué du ministère de la Défense, a affirmé qu’Israël ne parvenait pas à maintenir des niveaux de sécurité acceptables pour ses citoyens en Cisjordanie.
« Pendant des mois, j’ai alerté le cabinet et on m’a répondu par le dédain et le silence. Nous en payons tous le prix aujourd’hui. C’est fini », a déclaré Smotrich, en établissant une comparaison entre la spirale de la situation en Cisjordanie et le massacre du 7 octobre perpétré par le Hamas, au cours duquel quelque 3 000 terroristes palestiniens ont fait irruption en Israël par voie terrestre, aérienne et maritime, tuant plus de 1 400 personnes dans le sud d’Israël et prenant au moins 240 otages.
« Je ne permettrai pas que du sang supplémentaire soit versé sous ma surveillance et sur ma conscience (…) [en] n’intégrant pas également les leçons des événements de Simhat Torah [7 octobre] pour la Judée et la Samarie [la Cisjordanie] », a-t-il déclaré à propos de sa demande de zones tampons exemptes de Palestiniens.
« Israël doit créer des zones de sécurité stériles autour des communautés et des routes [juives] et empêcher les Arabes d’y pénétrer, y compris pour la récolte des olives. »
Smotrich a fait valoir que de telles mesures étaient nécessaires pour prévenir les attaques terroristes contre les résidents d’implantations ainsi que pour « donner un sentiment de sécurité en raison de la grande sensibilité et de l’engagement de nombreux hommes mobilisés, laissant les femmes et les enfants seuls ».
Il a également affirmé que les zones de sécurité empêcheraient « les frictions qui pourraient conduire à un embrasement de la région et nous causer un grand préjudice sur le plan international ».
Malgré cette affirmation, les actions visant à empêcher les agriculteurs palestiniens de récolter leurs olives feraient probablement l’objet de vives critiques de la part de la communauté internationale et pourraient exacerber les tensions en Cisjordanie.
Dans sa lettre, Smotrich affirme qu’il a évoqué la possibilité de créer des zones sans Palestiniens avec Netanyahu à plusieurs reprises au cours des dernières semaines et que le Premier ministre avait chargé le chef d’état-major de Tsahal, Herzi Halevi, de se pencher sur la question. Malgré cela, a-t-il ajouté, aucun changement de politique n’a été mis en œuvre ou examiné.
« C’est une folie que je ne suis plus disposé à tolérer », a-t-il écrit.
L’interdiction proposée de la récolte d’olives près des implantations israéliennes servirait également à éradiquer le problème « des activistes anarchistes [israéliens] de gauche qui ont embrasé la région », a-t-il écrit.
Selon le groupe israélien de défense des droits Yesh Din, plus de 172 actes de violence et de harcèlement commis par des résidents d’implantations à l’encontre de Palestiniens de Cisjordanie ont eu lieu dans au moins 84 villes et communautés palestiniennes depuis l’attaque sauvage et meurtrière du Hamas contre Israël le 7 octobre, qui a déclenché une guerre avec le groupe terroriste palestinien.
La semaine dernière, la police militaire a arrêté un soldat de Tsahal en permission, soupçonné d’avoir abattu le 28 octobre un Palestinien, Bilal Muhammed Saleh, qui était vraisemblablement en train de récolter des olives près du village d’As-Sawiya, dans le nord de la Cisjordanie. Aucune autre arrestation n’a été signalée.
Lors d’une réunion du cabinet la semaine dernière, le ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben Gvir a rejeté les préoccupations soulevées par le chef de l’agence de sécurité intérieure du Shin Bet, Ronen Bar, au sujet des attaques de résidents d’implantations, et aurait demandé pourquoi il fallait accorder autant d’attention aux « graffitis » que les jeunes Israéliens apposaient sur les propriétés palestiniennes.
Contacté par le Times of Israel, le porte-parole de Smotrich a précisé que le ministre faisait référence, dans sa lettre, aux Palestiniens et non à tous les Arabes.
Smotrich a déjà été accusé de racisme anti-arabe par le passé.
En mars 2023, il avait essuyé des critiques après avoir suggéré qu’Israël devrait anéantir la ville palestinienne de Huwara, en Cisjordanie, après qu’un terroriste de la ville eut tué deux jeunes frères israéliens.
À la suite de cet attentat, des résidents d’implantations extrémistes avaient saccagé cette ville de la région de Naplouse – incendiant des maisons et des voitures, faisant un mort et plusieurs blessés graves parmi les Palestiniens.
Au lieu de condamner l’attaque des résidents d’implantations, Smotrich avait déclaré à un journaliste lors d’une conférence financière que « la ville de Huwara doit être anéantie. Je pense que c’est à l’État d’Israël de le faire ».
Son appel à la création de zones exemptes d’Arabes en Cisjordanie intervient après qu’il a cherché à geler le financement de l’Autorité palestinienne (AP) en réponse à ce qu’il a qualifié de soutien à l’attaque terroriste du Hamas du 7 octobre.
Ces fonds font partie des droits de douane qu’Israël perçoit au nom de l’AP. Israël a déjà procédé à de telles déductions par le passé, à la suite d’une loi de 2018 concernant le paiement par l’AP d’allocations aux terroristes et à leurs familles. Mais il n’applique que partiellement cette politique, car les responsables sont parfaitement conscients que l’AP est dangereusement proche de l’effondrement financier.
Rejetant les appels des États-Unis lui demandant de débloquer les fonds, Smotrich a déclaré : « J’entends que certains pensent qu’alors que nos soldats et commandants héroïques sacrifient leur vie pour la défense de la patrie, nous devrions transférer de l’argent à cet ennemi méprisable en Judée et en Samarie. »
Sa position a été largement critiquée par ses collègues ministres, qui l’ont qualifiée d’injustifiée et ont mis en garde contre les dommages à long-terme qu’une telle décision pourrait entraîner.
Finalement, à l’issue d’un vote au sein du gouvernement jeudi, il a été convenu que les recettes fiscales pourraient être versées à l’AP en Cisjordanie, mais que les fonds destinés à Gaza, où l’AP aide à payer les salaires du secteur public, ne seraient pas versés.